The Jeff Beck Group, pionnier du hard et all-star band

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Chronique d’un mastodonte éphémère

The Jeff Beck Group aurait pu connaître le même destin que Led Zeppelin

The Jeff Beck Group

En 1967, Jeff Beck s’est déjà forgé une solide réputation dans le métier. Jimmy Page (Led Zeppelin) n’y est pas étranger puisque c’est sur ses recommandations qu’il démarre quelques années plus tôt comme musicien de studio. C’est encore le “prince noir de la guitare” qui lui permet d’intégrer les Yardbirds, en remplacement d’Eric Clapton.

Jimmy Page & Jeff Beck

Malgré un caractère et une personnalité difficile à appréhender (les Pink Floyd n’oseront pas lui proposer la place de Syd Barrett), son aura est indéniable et son talent fait l’unanimité.

Le groupe de Jeff Beck

Inspiré par son expérience chez les Yardbirds, Jeff Beck se met en tête de réunir un éventail des plus grands musiciens de la scène rock du moment, et ainsi fonder l’un des premiers Supergroup de l’histoire. Il recrute Rod Stewart (chant), Ron Wood (guitare et basse), Mickie Waller (batterie), et fait même appel au sorcier des ivoires, le claviériste Nicky Hopkins. Epaulés par Peter Grant, manager des Yardbirds et futur bienfaiteur de Led Zeppelin, ils bénéficient également de la production de Mickie Most (The Animals, Terry Reid).

Leur premier opus, Truth, enregitré à Londres entre les studios Abbey Road, Olympic, et De Lane Lea, paraît le 29 juillet 1968. Pour des raisons évidentes de marketing, la pochette de ce premier album est uniquement ornée du nom du guitariste.

Jeff Beck – Rock my Plimsoul

Son association avec le jeune Rod Stewart est l’essence même du groupe. Trois des titres figurant sur l’album Truth sont le fruit de leur complicité. Un dialogue constant entre un screameur aux accents soul et un guerrier de la six cordes.

Rod Stewart & Jeff Beck
Rod Stewart & Jeff Beck

La même base sur laquelle s’appuiera bientôt Jimmy Page avec la trouvaille Robert Plant. Un monstre blues à deux têtes qui va entraîner le rock sur une voie plus puissante et subversive que jamais…

Jeff Beck – Let me love you

En plus de posséder un guitar hero et un chanteur prodigieux, l’apport conjugué de Ron Wood, et de Micky Waller, batteur itinérant comptant déjà une demi douzaine de groupes à son actif, permet à la formation de trouver une assise solide pour ses solistes. Keith Moon (The Who) supplée Waller de ses baguettes magiques sur deux titres. Notamment Beck’s Bolero, piste instrumentale aérienne, dominée par une guitare psychédélique

Jeff Beck – Beck’s Bolero (Truth)

Moon The Loon est également crédité aux timbales pour le titre Ol’ Man River, en tant que “ You know Who”… Un titre mettant en valeur le registre soul de Rod Stewart. L’instrumental possède le doux écho des 50’s, et le chanteur régurgite avec bonheur, de longues heures à écouter l’oeuvre de Sam Cooke

Jeff Beck – Ol’ Man River

La rencontre entre Rod Stewart et Ron Wood fera date, puisqu’il arrive encore fréquemment aujourd’hui aux deux compères de partager un album, ou une scène.

Nicky Hopkins

Cet album est éclaboussé par le talent du pianiste Nicky Hopkins, ayant déjà régalé les Who, les Kinks et les Rolling Stones. Il sera plus présent encore sur l’album suivant, mais s’illustre déjà sur cette nouvelle composition signée Beck/Stewart

Jeff Beck – Blues Deluxe

Enfin, deux membres du futur Zeppelin font aussi leur apparition. Jimmy Page, de manière discrète, en tenant la douze cordes sur le titre Beck’s Bolero. Un titre où l’on peut entendre la basse de John Paul Jones. Comme Page, ce dernier écume les studios depuis ses 18 ans. Organiste, bassiste et arrangeur, il livre une remarquable partition d’orgue hammond sur Ol’ Man River, et You Shook Me (Willie Dixon)…

Jeff Beck – You Shook Me

Truth est un album qui jouit donc d’une pléiade de talents confirmés, ou en devenir, d’où émerge la voix époustouflante de Rod Stewart.

The Jeff Beck Group

Comme si les planètes s’étaient soudainement alignées pour offrir un écrin de velours à ce diamant brut.

The Jeff Beck Group

Le second album, Beck-Ola, publié cette fois sous le nom “The Jeff Beck Group” est enregistré en l’espace de quinze jours, au printemps 1969. Le groupe se pâme dans une puissance maîtrisée, tandis que Rod Stewart badigeonne le tout d’une soul de plus en plus sauvage. The Jeff Beck Group se permet même de dépouiller un titre du King

The Jeff Beck Group – Jailhouse Rock

Pour celui que l’on surnomme alors “Rod The Mod”, le style et la tenue vestimentaire n’ont rien de futiles. Comme c’est le cas chez les Small Faces, ils définissent une philosophie de vie, et une appartenance à un certain type de jeunesse. 

The Jeff Beck Group – Jailhouse Rock

Inévitablement, le sujet fait irruption dans les paroles du chanteur. Sur un riff tonitruant de Beck, façon Led Zeppelin (avant l’heure), Stewart fasciné comme toute sa génération par le roman initiatique Sur la Route, nous narre la vie d’une pierre qui roule, de job en job, mais toujours avec ses long boots espagnoles…

The Jeff Beck Groupe – Spanish Boots

Quelques mois avant la sortie de Led Zeppelin II, album étalon du hard rock, Jeff Beck, Ron Wood, et Tony Newman venu tenir les baguettes, durcissent déjà le propos. Sur un instrumental au son lourd et puissant, ils propulsent le boogie dans une autre sphère. Si le lyrisme construit et les harmonies diaboliques du dirigeable leur font défaut, ils possèdent déjà cette faculté à osciller entre paradis et enfer…

The Jeff Beck Group – Rice Pudding

L’édition d’origine, publiée en juin 1969, ne comportait que huit pistes. Quelques trouvailles sont venues garnir les rééditions. Comme cette belle reprise saluant les influences britanniques du groupe. Un titre écrit par Hank Marvin (The Shadows) pour le King British, le chanteur Cliff Richard.

Throw Down a Line

Jeff Beck souhaitait intituler l’album “Cosa Nostra”, proposition rejetée par EMI Records pour sa connotation mafieuse évidente. Le guitariste se rabat sur Beck Ola, le surnom que lui donnait Peter Grant (manager des Yardbirds et de Led Zeppelin) à ses débuts.

La pochette représentant une pomme verte géante, est une œuvre du peintre René Magritte, baptisée La Chambre d’écoute, et représentant assez bien la puissance sonore significative de l’album.

Comme Truth, ce deuxième opus ne connaît pas une grande réussite au Royaume-Uni, mais parvient encore une fois à séduire l’Amérique. Mieux distribué que le précédent, il touche également le public français.

L’emprise fatale de Jeff Beck

Malheureusement, les dissidences entre certains membres minent le groupe. Malgré deux bons albums, le guitariste caractériel fait les frais de sa mauvaise communication. L’année suivante, Ron Wood ne supportant plus ses humeurs, s’en va rejoindre les Faces. Rod Stewart ne tarde pas à le rejoindre. Beck voit sa formation imploser, à quelques mois seulement du Festival de Woodstock.

On considère généralement Led Zeppelin comme le premier groupe hard rock de l’histoire. Mais bien évidemment, un courant ou un genre musical n’est jamais l’œuvre d’un groupe ou d’un artiste isolé. D’ailleurs, en jetant un œil à la chronologie des albums parus à la fin des années 60, on remarque que que la sortie du premier opus du dirigeable est précédée de quelques semaines par celle du premier album du Jeff Beck Group. Ce dernier aurait donc pu devenir le chef de file d’un rock endurci.

Mais la somme de talents n’est pas une garantie de réussite, en particulier sur la durée. On parle souvent de l’alchimie reliant les membres de Led Zeppelin. S’il existe une part de hasard dans ce phénomène, nul doute que la personnalité plus effacée de Jimmy Page, a permis à Plant, Jones et Bonham, de donner leur pleine mesure.

Serge Debono

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