Au bon vieux temps du rockabilly…
Johnny Burnette était promis à une grande carrière. Pourtant les ombres conjuguées de Presley, Cochran, Vincent et Nelson l’ont éloigné de la gloire, avant qu’un malheureux accident ne l’emporte définitivement.
Articulé autour de son lead-singer, le Rock’n’roll Trio représentait la formation type des années rockabilly.
A l’instar des Blue Moon Boys d’Elvis Presley, ce combo sans batteur était composé d’un chanteur et guitariste rythmique, Johnny Burnette. D’un soliste, Paul Burlison, et d’un contrebassiste, Dorsey Burnette (frère du chanteur).
Débuts dans l’ombre du King
Et si j’évoque Elvis Presley, ce n’est pas anodin. En effet, bien que l’enfance de Johnny Burnette à Memphis fut plus misérable encore que celle du King, tous deux fréquentèrent la même école. Adolescents, ils travaillèrent également dans la même entreprise. On pourrait ajouter que sur certains titres, l’accent de Memphis et leur culture commune, donnent à Johnny Burnette des airs de son altesse. Les similitudes s’arrêtent là…
Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio – Lonesome Train (on a lonesome track)
Malheureusement, Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio n’obtiennent pas les faveurs de Sun Records. Ils vont donc chercher leur bonheur dans la grosse pomme New Yorkaise. En 1957, Coral Records leur permet d’enregistrer leur premier album, et leur premier tube. Un titre repris plus tard par Johnny Winter, The Stray Cats, ou encore Robert Gordon
Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio – Rock Billy Boogie
Mais le véritable standard de Johnny Burnette, reste le titre Train Kept a Rollin’…
Dans l’histoire du rock
Une reprise de Tiny Bradshaw (1951). La version du trio comprend un riff saturé assez étonnant pour l’époque. En réalité, comme pour le célèbre Rocket 88 (titre précurseur du rock), le son saturé et distordu figurant sur l’enregistrement résulte d’un malheureux accident. L’ampli du guitariste Paul Burlison avait été malmené lors d’un déplacement.
Ce titre fondateur immortalise sur microsillon ce défaut faisant le charme du morceau. Par la suite, quelques excellentes reprises verront le jour. Par les Yardbirds, Led Zeppelin, Aerosmith, ou encore les Dogs.
Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio – Train Kept A Rollin’
The Rock’n’roll Trio use de ce nouvel effet de manière plus ostensible encore, sur le titre Honey Hush. Cette pépite du rockabilly n’a pourtant pas obtenu la reconnaissance qu’elle méritait.
Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio – Honey Hush
Ayant enregistré leurs disques avec une section rythmique, ils se mettent en quête d’un batteur. L’éminent Carl Perkins leur recommande son cousin Tony Austin. Le trio devient un quatuor et élargit sa palette. Dorsey Burnette interprète même quelques titres durant l’année 1956. Pourtant, à son grand dam, le groupe est rebaptisé “Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio”.
Johnny Burnette & The Rock’n’roll Trio – Rock Therapy
Les guerres d’égos se multiplient et les bagarres deviennent fréquentes. Lors d’une énième altercation avec son frère, Dorsey Burnette quitte le groupe. Pour compenser son absence, on recrute Johnny Black, frère de Bill Black (contrebassiste d’Elvis).
Carrière en solo
Après un premier opus prometteur, le groupe est finalement dissous. Dorsey et Johnny Burnette se réconcilient dans l’écriture, en délivrant des compositions pour Ricky Nelson et Roy Brown.
La suite voit Johnny Burnette entamer une carrière solo. Le rockabilly s’est éclipsé derrière la pop, et c’est le twist qui fait désormais swinguer la jeunesse américaine. Le titre Dreamin’ grimpe très haut dans le Billboard et lui offre une renommée internationale en 1960.
Johnny Burnette – Dreamin’
La même année, il conforte ses talents de crooner en obtenant un nouveau succès avec le titre You’re Sixteen, dont Ringo Starr fera un tube en 1974.
Johnny Burnette – You’re Sixteen
https://www.youtube.com/watch?v=7f6m9T9qgtk
D’ailleurs, les Beatles et la vague britannique sonneront le glas du rock primal. Mais il était écrit que le rockabilly devait s’éteindre dans le drame et la stupéfaction. Les départs d’Elvis à l’armée, de Chuck Berry en prison et de Little Richard dans les voies du seigneur, avaient déjà plombé sérieusement l’affaire.
Après les décès de Buddy Holly, Ritchie Valens et Eddie Cochran, la liste des tragiques disparitions s’enrichit d’un nouveau nom. Le 14 août 1964, Johnny Burnette pêche tranquillement sur l’étendue de Clear Lake, au nord de San Francisco, quand son bateau est percuté par un cabin cruiser. Projeté dans l’eau, le chanteur se noie avant l’arrivée des secours. Il n’avait que 30 ans.
Serge Debono