Jefferson Airplane – Surrealistic Pillow, le revelateur de Frisco

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Jefferson Airplane est un pur produit de la contre-culture et de la scène psychédélique embrasant la ville de San Francisco au milieu des sixties. Après des débuts timides, l’arrivée de la chanteuse Grace Slick propulse le groupe au sommet…

Quelques années avant la création de Jefferson Airplane, au début des sixties, tandis que la beat generation se régénère au cœur de San Francisco, Marty Balin, compositeur-interprète, enregistre deux singles ignorés sur le label Challenge Records.

Jefferson Airplane
Marty Balin

Inspiré autant par l’émergence du rock anglais, que par Bob Dylan, il tente une nouvelle expérience au sein d’une formation folk (The Town Criers). Malgré des compositions prometteuses et quelques belles reprises, cette nouvelle tentative se révèle infructueuse…

The Town Criers – 900 Miles

En 1966, Marty Balin décide de créer son propre groupe après avoir assisté à un concert des Byrds.

Les débuts avec Signe Anderson

Il enrôle Signe Anderson, chanteuse folk envoûtante, le banjoïste Paul Kantner, et le virtuose de la guitare classique Jorma Kaukonen. Quand au batteur Skip Spence, il est recruté d’avantage pour son état d’esprit et son look que pour ses talents. Dans tous les cas, le groupe est un pur produit de l’esprit contestataire régnant alors sur la ville de San Francisco.

Jefferson Airplane
Jefferson Airplane (à droite Signe Anderson & Marty Balin)

L’appellation « Jefferson Airplane » est un hommage rendu par Marty Balin au blues-man Blind Lemon Jefferson. Elle fait aussi référence à un avion de conception uniquement américaine (en opposition à la vague britonne de l’époque). Enfin, selon certains freaks, dans le jargon de l’époque l’expression désignait également une allumette usagée servant à tenir un joint de marijuana devenu trop court.

Une chose est certaine, la côte ouest réputée autrefois pour sa scène folk, voit l’acid-rock gagner le cœur de la jeunesse californienne. Comme c’est le cas du côté de Los Angeles avec les Doors et Love, la créativité est de mise. On n’hésite pas à mélanger les genres, et l’idée de planer le plus haut possible prédomine.

Marty Balin rachète une ancienne pizzeria, le Matrix, qu’il transforme en ballroom psychédélique, afin d’offrir une visibilité à son groupe.

En août 1966, ils enregistrent un premier album intitulé « Takes off ». Ce dernier est plaisant,  mais manque cruellement de relief. Il faut dire que certaines pistes mettant en valeur le duo Balin-Anderson sont inexplicablement évincées par la production. Comme ce titre qui refait surface en 1974 sur la compilation « Early Things »

Jefferson Airplane – High Flyin’ Bird

Quand la chanteuse Signe Anderson, maillon essentiel de la formation, décide d’interrompre sa carrière pour élever son enfant, Marty Balin se croit maudit.

L’arrivée de Grace Slick, et l’envol de l’Airplane

En effet malgré les talents évidents de la vocaliste, « cet heureux événement » va permettre à l’Airplane de décoller enfin. Skip Spence à qui l’on reproche ses abus de LSD est remercié. Il est remplacé par le batteur de jazz Spencer Dryden qui posera sa griffe sur l’album à venir. Mais les deux apports majeurs sont l’arrivée du bassiste Jack Casady, bientôt surnommé « le Hendrix de la basse », et la chanteuse Grace Slick, future égérie du mouvement hippie californien.

Jefferson AirplaneSurrealistic Pillow

Grace Slick amène dans ses valises une véritable pharmacie, stimulants et psychotropes en tout genre… mais également deux titres qui ne vont pas tarder à faire la différence. Surrealistic Pillow est porté par le succès de « Somebody to love », hymne d’une génération prônant l’amour libre, et premier single extrait de l’album. En réalité ce titre est l’œuvre de Darby Slick (beau-frère de la chanteuse). Il est publié une première fois en single par son groupe The Great Society mais ne dépasse pas les frontières de San Francisco. Remanié par Marty Balin et Grace Slick, il perd son côté garage. Gros succès en radio et au billboard, il devient l’un des atouts majeurs de Jefferson Airplane.

Jefferson Airplane – Somebody To Love

« Rien qu’une pilule et tu grandis, rien qu’une, et te voilà petit.

Celles que te donne ta mère n’ont aucun effet.

Va, demande à Alice, lorsqu’elle mesure dix pieds de haut…« 

Le deuxième titre, « White Rabbit », parait en juin et vient consolider la renommée du groupe. Il est également issu du répertoire de The Great Society. Un genre de Boléro de Ravel où se mêlent des paroles étranges et l’univers de Lewis Carroll (Alice au pays des merveilles). Quelques mois plus tard, l’influence de ce dernier sur les héritiers de la Beat Generation se retrouvera dans l’oeuvre de Syd Barrett (Pink Floyd).

Jefferson Airplane
Grace Slick

Sans refrain, ni réel couplet, il va pourtant devenir un standard du rock psyché de la fin des années 60, et sera repris maintes fois par la suite, notamment au cinéma (Platoon, Las Vegas Parano). Un crescendo halluciné dont l’ode aux psychotropes échappe étrangement à la censure. Le site officiel de Jefferson Airplane explique quelle était l’intention réelle de Grace Slick

« Grace a toujours dit que White Rabbit était une gifle à l’attention des parents qui lisaient à leurs enfants des histoires comme Alice au pays des merveilles — où Alice utilise diverses substances pour se transformer — et qui ne comprenaient pas pourquoi leurs enfants grandissaient pour essayer des drogues. »

Jefferson Airplane – White Rabbit

Bien qu’éclipsé sur le plan médiatique par l’aura de la chanteuse, ces deux tubes internationaux permettent enfin aux œuvres de Marty Balin de connaitre une plus large diffusion. En effet, cinq des titres composant ce deuxième album relèvent de ses talents. Comme celui à suivre, mettant à l’index les apollons sculptés traquant leurs proies sur les plages de Californie…

Jefferson Airplane – Plastic Fantastic Lover

En bon troubadour, il offre deux ballades, douces et sucrées, où sa voix androgyne fait merveille. Balin confiera plus tard avoir écrit cet arpège déchirant juste après son premier joint de marijuana..

Jefferson Airplane – Comin’ back to me

La seconde, « Today », est un titre rêveur à la douceur obsédante. Cadencé par le tambourin, le riff principale est exécuté par Jerry Garcia (Grateful Dead).

Grateful Dead
Jerry Garcia

Le guitar-héro exerce tout du long une grande influence sur l’enregistrement de « Surrealistic Pillow ». Bien que non-crédité, il semblerait qu’il ait apporté sa contribution sur de nombreux titres. C’est également lui qui parraine Jefferson Airplane la même année au Festival de Monterey.

Jefferson Airplane – Today

Dans la lignée des groupes folk des sixties, le duo vocal domine les débats. Pourtant, il semble que pour la première fois, les codes sexuels soient inversés. La voix angélique et les textes romantiques de Marty Balin d’un côté. Le grain de prêtresse mystique et la prose vindicative de Grace Slick de l’autre. Cette particularité donne au groupe un visage des plus insolites, mis en valeur par des musiciens hors-pair.

Grace Slick & Marty Balin
Grace Slick & Marty Balin

Dés sa sortie, l’album grimpe à la troisième place du Billboard américain. Les concerts de Jefferson Airplane deviennent alors de grandes messes psychédéliques, célèbres dans toute la Californie. Ce succès permet au groupe d’enregistrer son troisième album la même année. « After Bathing’s at Baxter’s » sera moins grand public, plus expérimental, mais tout aussi convaincant.

Serge Debono

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