Pissarro, premier peintre à comprendre la lumière
«Peignez généreusement et sans hésitation pour garder la fraîcheur de la première impression. Ne vous laissez pas intimider par la nature au risque d’être déçu du résultat»
Camille Pissarro, l’ impressionniste, est né le 10 juillet 1830 dans une colonie danoise des Antilles, l’ile de St Thomas. Il va passer sa scolarité dans la région parisienne, où il aime visiter des musées et commence à dessiner.
Sa volonté de devenir peintre va vite s’imposer. Il travaille occasionnellement à « l’Académie Suisse » où il côtoie Monet, Guillaumin, Cézanne.
Camille Pissarro un peintre paysagiste
C’est à l’exposition Universelle de 1855 qu’il fait la connaissance de Corot, cette découverte va le diriger vers la peinture paysagiste.
Une grande maturité se dégage de ses tableaux, sa façon de moduler les couleurs engendre à la fois la profondeur et une grande précision dans ses compositions.
Pruniers en fleurs (1877)
Un village au flanc de la colline délimite le jardin et les arbres en fleurs du premier plan. Les toits, en haut du tableau semblent s’accrocher au ciel moutonneux. Camille Pissarro immortalise les branches chargées de fleurs par une multitude de petits coups de pinceau qui se superposent et qui illuminent le tableau. Le camaïeu de vert et les gris-bleus s’opposent au blanc des fleurs. Le peintre provoque les vibrations avec les contrastes des couleurs.
Lors de son séjour à Londres en 1870, il découvre John Constable, Joseph M.W. Turner, Richard Bonnington.
Pissarro & Cézanne
C’est en 1872 que l’artiste accueille Cézanne, leur travail en commun est un moment important pour le monde de la peinture et s’avère fertile pour l’un et l’autre.
«L’humble et colossal Pissarro, ce fût un père pour moi. C’était un homme à consulter quelque chose comme le bon Dieu» sont les termes employés par Cézanne à l’égard du peintre.
Au fil du temps sa peinture va évoluer, aux paysages s’ajoute des personnages, des couleurs avec plus de contrastes s’installent.
Il signera quelques tableaux divisionnistes sous l’influence de Seurat. Mais son admiration pour ses amis impressionnistes, Monet, Renoir et Degas font qu’il s’éloigne de cette méthode pointilliste.
Pissarro a été un révolutionnaire et un novateur dans son art en appliquant des techniques scientifiques, tel que les théories de Chevreul* et les découvertes d’Helmholtz**
Immersion dans une partie de l’œuvre de Camille Pissarro en vidéo :
Gelée blanche de 1873
L’un des plus beaux paysages d’hiver, où la lumière est subtile, faite de bleues et de roses. Le champ couvert de givre est troublé par l’ombre des arbres, hors cadre, faites de stries bleues.
Les toits Rouges, coin de village, effet hiver (1877)
Dans ce tableau la palette de couleurs de Camille Pissarro s’est enrichi pour restituer l’émotion visuelle que suscite chez lui les paysages.
Le bleu intense du ciel nous renvoi au bleu des fenêtres. La couleur rouge des champs fait écho aux toits. Les arbres au premier plan font écran aux maisons. Cette composition bien structurée et aux tonalités fortes n’a pas eu, au départ, les faveurs des critiques, pour qui l’œuvre n’avait pas beaucoup de concordance avec la réalité…
Jeune fille à la baguette (1881)
Camille Pissarro apporte la lumière par les touches de verts de l’herbe.
Pour atteindre la couleur sombre de la chemise, le peintre ajoute au bleu, du blanc, du gris et du jaune. La jupe est réalisée par un mélange subtil de couleurs. Une atmosphère de quiétude se dégage de cette composition, la jeune fille semble perdue dans ses rêves.
La Cueillette des pois (1887)
Camille Pissarro utilise la technique du « divisionnisme » dans ce tableau. Une méthode vite abandonnée par le peintre.
Une œuvre confisquée à un collectionneur juif sous l’occupation et acheté légalement par des américains en 1995. La cour de cassation de Paris a mis fin à trois ans de procédure le 1er juillet 2020, et tranché en faveur des descendants de Simon Bauer. Durant l’occupation de la France ce marchand d’art a été spolié de ses œuvres par les nazis.
Le jardin de Camille Pissarro à Eragny (1898)
Cette toile est la rencontre entre la quiétude de la campagne et les tonalités joyeuses et vives des fleurs. Les touches de bleu intense du ciel s’opposent avec le brun-rouge de la terre. Cette palette de couleurs est mise en valeur par le camaïeu de vert des arbres et des plantations.
Le Boulevard Montmartre, un matin d’hiver Camille Pissarro 1897
Spectacle de la vie urbaine dans cette toile, inspiré par ce qu’il peut découvrir de la fenêtre de son logement. C’est presque une vue à vol d’oiseau sur ce boulevard animé par les calèches et les promeneurs, soigneusement représentés. Les différentes tonalités de bleu adoucissent cette scène de la ville.
Le peintre a réalisé toute une série de tableaux sur le Boulevard Montmartre, à différentes heures de la journée. Pissarro est incontestablement le peintre des paysages de villes.
Le Boulevard Montmartre la nuit 1897
Un seul exemplaire pour cette exceptionnelle réalisation ; la lumière est savamment étudiée.
L’œuvre de Pissarro est l’une des plus représentatives et la plus influente de l’ère impressionniste. Selon Octave Mirbeau, critique d’art en 1892.
«Pissarro a élargi le rêve en étant le premier à comprendre la lumière»
* Les études du chimiste Michel-Eugène Chevreul (1786-1889), sur la décomposition de la lumière par le prisme et sur le cercle chromatique ont beaucoup intéressé les peintres impressionnistes.
**Hermann Von Helmholtz (1821-1894) scientifique qui a notamment apporté des contributions à la perception des couleurs.
Nic Blanchard-Thibault
A lire aussi :▬ Claude Monet, l’impressionniste
▬ L’impressionnisme et la période nacrée d’ Auguste Renoir.