Le musée du Belvédère à Vienne en Autriche
Avec le musée du Belvédère à Vienne [Autriche], voici le 1er épisode d’une série d’immersion dans le patrimoine artistique européen dans laquelle nous visiterons les musées les plus prestigieux. Ces lieux hébergent des trésors qui sont la vitrine et les racines de notre civilisation.
Le “Belvédère” bâti en 1723 pour le prince Eugène de Savoie est un chef-d’œuvre de l’architecture baroque. Depuis 1903 il est l’un des plus anciens musées du monde.
Le “Belvédère” abrite des œuvres d’art du moyen âge jusqu’à nos jours. Les courants du XIX et XX -ème siècles constituent le noyau le plus important des collections et apportent une renommée internationale au musée du Belvédère.
Le classicisme est représenté par Jacques Louis David
Bonaparte franchissant le Grand Saint-Bernard : Une représentation de Napoléon Bonaparte lors du franchissement du col alpin du Grand Saint-Bernard, c’est le début de la seconde campagne d’Italie. Jacques-Louis David a réalisé cinq versions du tableau afin de satisfaire diverses commandes, dont trois à des fins de propagande par Napoléon lui-même. Dans ses œuvres David sait parfaitement mettre en valeur les événements historiques.
Le romantisme par Caspar David Friedrich
Paysage rocheux dans la Elbsandsteingebirge,1822-1823 : Friedrich peint la nature d’une façon grandiose et tourmentée.
La partie supérieure du tableau, lumineuse, s’oppose aux rochers sombres du premier plan ; le pin arraché peut exprimer une menace ou la peur que peuvent ressentir les hommes.
La période Biedermeier
Ferdinand Georg Waldmüller, peintre, écrivain autrichien et célèbre représentant du mouvement artistique Biedermeier. Il étudie à l’académie des beaux-arts de Vienne, puis copie les œuvres des grands maîtres pour se perfectionner. Rapidement le peintre s’intéresse à la nature, il perfectionne à ce point sa peinture pour atteindre le réalisme photographique. Son sens des couleurs lui permet de réaliser des paysages remarquables.
Ramassage de branchages dans la forêt viennoise, 1855 : Waldmüller trouve son inspiration dans les régions rurales d’Autriche et offre à l’observateur une version romantique de la vie paysanne.
L’expressionnisme
Egon Schiele est le chef de fil de ce mouvement qui peint une réalité plus subjective et pessimiste.
Mère avec deux enfants III,1915-1917 : Des personnages aux regards vides. Le pessimisme exprimé dans cette toile est en accord avec les mots du peintre, écrits dans son journal : “Tout dans la vie est mort !’’
Sécession Viennoise
Le point d’or du musée : les œuvres de Gustav Klimt
“Judith I” 1901 Le début du “Cycle d’or”
Ici l’héroïne devient une femme séductrice et meurtrière, son regard toise l’observateur. Son corps se détache de l’or qui envahit la toile. En arrière-plan une représentation de la frise du palais assyrien de Sennacherib à Ninive.
L’histoire du Belvédère
Le Belvédère, est une œuvre de l’architecte autrichien Johann Lukas von Hildebrandt. Deux palais se font face au milieu de jardins aux allusions ésotériques ; les quatre éléments, le Parnasse et l’Olympe sont évoqués. Après le décès du prince Eugène de Savoie, la nouvelle propriétaire, l’Impératrice Marie-Thérèse d’Autriche y installe la collection impériale, visible par le public. Le Belvédère est le premier musée au monde accessible à tous.
En 1919, l’ensemble du Belvédère est acquis par l’État. L’Österreichische Staatsgalerie devient définitivement un musée qui héberge l’art médiéval et baroque de l’Autriche, mais surtout des chefs-d’œuvre des XIXème et XXème siècles.
Le Belvédère inférieur est édifié en premier, il est la résidence d’été du prince.
Par la suite, le fabuleux Belvédère supérieur est érigé entre 1717 et 1723.
Palais destiné à la représentation, de somptueuses fêtes y sont données. La remarquable chapelle, la grande salle de Marbre et la galerie d’art des XIXème et XXème siècles témoignent de la richesse du lieu.
Les collections du Belvédère à Vienne
Les œuvres de Ferdinand Georg Waldmüller :
Les Prémices du printemps dans la forêt de Vienne 1861 au Belvédère :
L’empreinte de l’hiver est encore présente, cependant une certaine allégresse se dégage du tableau ; au premier plan les premières fleurs de printemps, les visages heureux des personnages révèlent leur bonheur. Waldmüller peint une nature optimiste.
Le Matin du Saint-Sacrement – 1857 :
Un tableau lumineux pour cette représentation de la vie paysanne, thème emblématique de Waldmüller. Le réalisme est associé à une riche palette de couleurs, ce qui fait du peintre le principal interprète du mouvement Biedermeier autrichien.
Egon Schiele, de la Sécession à l’impressionnisme à Vienne
La découverte de Gustav Klimt et du mouvement artistique de la Sécession viennoise est une étape fondamentale pour Schiele, mais rapidement balayée au profit de l’expressionnisme. Sur la toile le peintre autrichien retranscrit parfaitement les angoisses de ses personnages. Egon Schiele laisse une solide empreinte, identifiable entre toutes, sur la peinture européenne. Les générations suivantes sont fortement influencées par son travail.
L’étreinte 1917 :
Un couple s’enlace sur des draps froissés, c’est un autoportrait de Schiele et de son épouse, Edith. Une référence au tableau Le Baiser de Gustav Klimt qu’il admirait. Ici la tendresse se conjugue avec le sentiment d’angoisse, signature du peintre autrichien.
La mort et la jeune fille 1915 au musée du Belvédère :
Le tableau est réalisé durant une période tourmentée puisque Schiele est mobilisé, c’est la 1ère guerre mondiale. L’homme, dans un manteau sombre attire vers lui la jeune femme. Les deux protagonistes, les yeux dans le vague expriment un sentiment de tristesse, sans doute à la perspective de la séparation.
Quatre arbres (Allée de châtaigniers en automne) 1917 :
Schiele nous offre un paysage paisible. Les bandes bleues du ciel s’opposent à la lumière rouge et chaude du soleil. Les arbres aux troncs fins et élancés font contraste.
Le Médecin et physicien Dr Hugo Keller 1918 :
Passionné d’art et de littérature, le docteur Koller fût un généreux donateur pour les peintres. Ce tableau commandé par le mécène est une ode à la littérature ; les livres envahissent la toile.
Tournesols 1911 :
Les tournesols un sujet souvent associé à Vincent Van Gogh ; Egon Schiele s’est aussi emparé de ce thème pour révéler sa mélancolie.
Les impressionnistes
Claude Monet “Le Chemin dans le jardin de Monet à Giverny” 1902 :
Son jardin “extraordinaire’’ est devenu le thème favori de Monet. Ici, l’allée qui se dirige vers la demeure du peintre est une merveille chromatique. Les contours disparaissent, les couleurs s’entremêlent pour former le dessin.
Pierre-Auguste Renoir Baigneuse aux cheveux dénoués 1903 :
Renoir peint une femme aux formes voluptueuses avec délicatesse. Une chevelure généreuse entoure le visage. En arrière-plan sa robe et son chapeau sont soigneusement posés.
Vincent Van Gogh La plaine d’Anvers 1890 :
Le paysage semble imprégné du bleu-vert du ciel. La profondeur révèle l’étendue de la plaine. Au premier plan les points rouges et orange attirent le regard.
Le symbolisme
Entre 1880 et 1910 le courant artistique Symboliste s’installe. L’image est onirique au détriment d’une représentation matériel ; c’est une rupture avec la peinture traditionnelle.
Les Mauvaises mères 1894 de Giovanni Segantini :
Lumière glaciale, les branches d’arbres morts s’entremêlent avec des femmes au buste nu et portant leur enfant. Selon les experts Segantini se serait inspiré d’un poème indien du XIIème siècle “Nivana’’ écrit par le moine Pandjavalli de Mairondapa et traduit par l’ami du peintre Luigi Illica.
Ces vers racontent l’histoire de mères ayant tué leur enfant, et contraintes de résider dans des landes désolées jusqu’au pardon de l’enfant.
Émotion 1900 de Ferdinand Hodler :
Hodler nous offre une œuvre majeure du symbolisme. Une représentation onirique pour exprimer les émotions. La jeune femme à la robe légère s’immisce devant un pré fleuri entouré d’un chemin clair.
Gustav Klimt, point d’or du Musée du Belvédère
“Le Baiser” de Klimt est un symbole intemporel, c’est son tableau le plus célèbre. L’or domine et s’oppose au décor fleuri du tapis. La représentation du couple plonge l’observateur dans l’irréel.
Sonja Knips 1898 :
Une mécène influente du mouvement sécessionniste. La jeune femme assise semble prête à se lever, l’élégance se conjugue avec une certaine mélancolie. Klimt représente le personnage de façon subtile, la robe de tulle est légère, et se dessine avec des contours vaporeux.
Les fleurs à l’angle du tableau et le carnet rouge dans la main de Sonja Knips apportent un accent coloré. Gustav Klimt signe ici ses talents de portraitiste.
Jardin rural avec tournesols 1906 :
Un pré fleuri envahit toute la toile. Les larges feuilles et les grandes fleurs des tournesols se révèlent sur un lit riche d’une grande variété de fleurs. Klimt nous offre un monde de rêve “fleuri” où les feuilles et les fleurs semblent éternelles.
Champ de coquelicots 1907 au Belvédère :
Klimt ne représente pas fidèlement la nature, il nous offre un décor floral telle une mosaïque où les tesselles rouges des coquelicots accrochent notre regard. En haut du tableau une haie cache un fin ruban de ciel gris bleuté.
Allée dans le parc du château Kammer 1912 :
Gustav Klimt utilise une multitude de couleurs pour réaliser le tronc et les branches des arbres. Entre les troncs nous percevons les rives de l’Attersee ; le peintre aimait passer l’été au bord du lac autrichien. Cette toile peut nous faire penser à Van Gogh.
Dame au chapeau et au boa 1909 au Belvédère :
Le portrait est raffiné, c’est la représentation d’une femme élégante. Sa chevelure volumineuse est couverte d’un chapeau noir en rappel du boa. Les objets rouges en arrière-plan apportent une touche colorée au tableau.
Les dernières toiles de Klimt :
Portrait de Johanna Staude 1917-1918 au musée de Vienne :
Un portrait inachevé qui s’inscrit parmi les derniers tableaux de Gustav Klimt. En prenant une direction différente le peintre nous offre ici une représentation simplifiée, le portrait est fidèle. Johanna Staude, enseignante et peintre, est souvent le modèle de Klimt et de Schiele. Le bleu du manteau s’oppose au camaïeu orange du fond de la toile. Le col “vaporeux” est en accord avec la mode de l’époque.
Adam et Ève 1917-1918 :
Gustav Klimt présente une Ève au visage rayonnant entouré d’une longue chevelure bouclée. Un corps, charnu, couleur de nacre occupe tout l’espace ; Adam en couleur sombre se serre contre elle ; le personnage reste inachevé, tout comme le manteau fleuri.
L’épouse 1918 :
Au centre une femme au visage serein, la couleur bleue de son manteau contraste avec les tons orange dominants. A ses côtés un homme entouré de femmes. A droite du tableau un corps de femme, inachevé, ses jambes écartées dévoilent son intimité sous sa robe.
C’est la dernière toile de Gustav Klimt, qui disparaît le 6 février 1918.
En 2023 le musée du Belvédère fête ses 300 ans.
Des événements et des expositions sont programmés l’année durant comme « Le Belvédère. 300 ans au service des arts » et « Klimt. Inspired by Van Gogh, Rodin, Matisse… » Le Belvédère héberge la plus grande collection au monde de tableau du peintre autrichien.
Nic Blanchard-Thibault