Le musée du siècle d’or hollandais
Avec Le Rijksmuseum à Amsterdam, nous plongeons dans le Siècle d’Or. C’est le 2ème épisode de notre série d’immersion dans le patrimoine artistique européen. Ce musée peut combler tous les passionnés de la peinture hollandaises du XVIIème siècle. Les peintres de cette époque saisissent et fixent sur la toile les nuances de la lumière. Les collections comprennent des œuvres d’artistes tels que Rembrandt et les élèves de ce dernier, Frans Hals, Wallerand Vaillant, Abraham Mignon, Meindert Hobbema, Pieter Hendricksz. de Hooch…
Cette année, le Rijksmuseum organise la plus grande rétrospective consacrée à Johannes Vermeer. Une exposition exceptionnelle qui a demandé le concours des musées du monde entier.
Les collections du siècle d’or au Rijksmuseum
Maria Van Oosterwijck 1671- de Wallerand Vaillant
Peintre et graveur, Wallerand Vaillant a fait preuve de hardiesse pour élaborer la technique de la gravure en manière noire et du dessin à la pierre noire. Dans son œuvre, le portrait tient cependant une place importante. Ses voyages au cœur des cours européennes ont fécondé son art, il réalise de nombreux portraits des plus grands souverains d’Europe ainsi que des chefs d’état étrangers. Retenons également à son actif des natures mortes et tableaux de genre.
Un portrait peint avec délicatesse. Les nuances et les reflets de la robe témoignent d’une grande observation. La palette et les pinceaux font référence à la femme peintre. Maria Van Oosterwijck était une peintre néerlandaise, élève de Jan Davidsz de Heem, spécialiste de la nature morte florale. Les milieux aristocratiques apprécient tout particulièrement son travail.
Abraham Mignon ” Nature morte aux fruits, huitres et compotier de porcelaine” 1660-1679
Le peintre offre une composition baroque impressionnante. Les éléments sont dessinés avec précision et virtuosité. La description est presque scientifique en montrant l’enveloppe et l’intérieur des éléments.
Meindert Hobbema “Le moulin à eau ” 1666
Élève de Jacob Van Ruisdael, il a une renommée de grand paysagiste. Le moulin est le symbole du pays. Les meuniers y concassaient le malt en vue de la fabrication de la bière. Ils sont de précieux commanditaires pour les peintres.
Frans Hals ‘’Portrait de mariage d’Isaac Massa et Beatrix Van der Laen’’ (1622)
Portraitiste reconnu, ses coups de brosse capture l’expression de ses personnages. Son style brut aboutit à une grande finesse, comme ici dans la représentation d’un couple d’un rang élevé ; Le riche marchand Isaac Massa épouse Béatrice Van der Lean, la fille du Bourgmestre de Haarlem.
Rembrandt : “La Ronde de nuit”
C’est la représentation de La Compagnie de Frans Banning Cocq, milice bourgeoise des mousquetaires d’Amsterdam. Bien que réalisé de jour l’utilisation d’un apprêt au bitume de Judée assombri le tableau. Dix-huit membres de la compagnie sont à l’origine de cette commande pour la grande salle de la Maison des arquebusiers, siège de la milice.
Exposition Vermeer au Rijksmuseum
Vermeer transforme le quotidien en extraordinaire. Il sublime des scènes qui passeraient inaperçues, une femme lisant une lettre, des représentations de tâches ménagères, la mise en valeur d’une rangée de maisons… Il réalise ses compositions avec des objets choisis avec soin. Sa haute connaissance de la lumière lui permet de peindre des tableaux proches de la réalité. Les tissus brillent, les ombres sur les murs et les objets attirent notre regard.
En faisant des rappels de ses couleurs, Vermeer crée des ensembles harmonieux. Il construit ses œuvres en superposant plusieurs couches de couleur finement appliquées.
La Laitière 1660
Johannes Vermeer transforme une scène banale en chef-d’œuvre en jonglant avec les formes et les couleurs. La lumière de la fenêtre est traitée de façon minutieuse. L’angle de la pièce reste dans l’ombre, un panier d’osier est accroché près d’un récipient en cuivre ou laiton qui renvoie des reflets brillants. Sur la table le peintre réalise une nature morte où les nuances de bleus s’opposent aux dégradés de brun et d’ocre. Ce premier plan est un élément essentiel du tableau, l’harmonie des couleurs se conjugue avec l’esthétique.
La Lettre d’amour, 1669 – 1670
Le tableau est typique de l’œuvre de Vermeer. Nous découvrons deux personnages au travers d’une porte et du rideau levé ; une servante et sa maîtresse lisent une lettre. Le temps semble suspendu à cette lecture.
La Ruelle 1658
La toile représente une partie de la rue et des pittoresques maisons. La seule vue urbaine avec “Vue de Delf” pour Vermeer.
Les personnages semblent absorbés par des tâches quotidiennes.
Une étude d’archives du XVII ème siècle aurait permis de localiser “La Ruelle”. La maison de droite aurait appartenu à une tante du peintre ; la mère et la sœur de Vermeer résidait en face, sur le même canal.
Femme lisant une lettre 1663 de Vermeer
Le bleu, traité en camaïeu, domine dans la toile. Des effets lumineux suggèrent la présence d’une fenêtre sur le côté gauche. La sérénité semble se dégager du tableau, provoquée par l’harmonie des couleurs.
Van Gogh avait lui-même remarqué cette œuvre comme en témoigne une lettre du 29 juillet 1888, adressée à Émile Bernard (peintre et écrivain français) :
« Ainsi, connais-tu un peintre nommé Vermeer qui, par exemple, a peint une dame hollandaise très belle, enceinte. La palette de cet étrange peintre est : bleu, jaune citron, gris perle, noir, blanc. Certes, il y a dans ses rares tableaux, à la rigueur, toutes les richesses d’une palette complète ; mais l’arrangement jaune citron, bleu pâle, gris perle, lui est aussi caractéristique que le noir, blanc, gris, rose l’est à Vélasquez.»
La jeune fille à la perle 1665
Le fond presque noir apporte un puissant effet de relief à ce portrait, où “tronie”, mot néerlandais utilisé au XVIIème siècle signifiant “visage” ; c’est un genre distinctif de la peinture de l’âge d’or. La jeune femme, vu de profil, fixe le regard sur le visiteur et semble vouloir lui parler. Pour le vêtement du modèle le jaune-marron s’oppose au col d’un blanc brillant. L’emploi de couleurs pures limite la gamme de tonalité, l’utilisation de vernis de même couleur accentue les ombres. Admirable technique du peintre qui juxtapose les tonalités en les fondant les unes et les autres pour estomper les lignes. Remarquons le reflet d’or de la perle pendant à l’oreille de la jeune femme.
Femme écrivant une lettre et sa servante au Rijksmuseum
Un lourd rideau vert occupe le premier plan, c’est la particularité de Vermeer.
Sur la gauche une fenêtre aux motifs géométriques apporte la lumière. A remarquer le riche tapis d’orient rouge à motifs noirs et jaunes qui recouvre la table. La jeune femme, au corsage clair écrit, derrière elle une autre femme regarde la fenêtre.
Le tableau reprend un grand nombre d’éléments déjà trouvés dans des précédentes réalisations, intérieur bourgeois, lumière apportée par une fenêtre à gauche, rideau au premier plan… Vermeer paraît obsédé par la géométrie et la perspective ; un dispositif optique proche d’une chambre noire.
La Vue de Delft
Dans cette vue matinale de Delf, Vermeer saisi l’instant où un rayon de soleil illumine les habitations. Le peintre traite la lumière à un moment précis, c’est une particularité de ce tableau. L’ensemble des constructions se découpent sur un ciel nuageux.
La Dentellière 1671
Ce tableau de petite dimension représente une jeune femme absorbée par sa broderie. Le fond neutre donne toute sa valeur au personnage qui se détache sur le blanc grisé. Le rouge des fils apporte une pointe de couleur et s’oppose au bleu du coussin.
La Liseuse à la fenêtre (1657) au Rijksmuseum
L’un des tableaux les plus célèbres de Vermeer. Une jeune femme, éclairée par les rais lumineux de la fenêtre parcourt une lettre. Le travail d’ombres et de lumière est traité avec délicatesse.
La scène, intime, se décline derrière un rideau, comme souvent dans les tableaux de Vermeer.
Au premier plan nous retrouvons un tapis d’orient.
La Dame au collier de perles -1664
Une femme vêtue d’une veste de satin jaune bordée d’hermine se tient devant un miroir, sans doute pour mettre un collier de perles. La lumière de la fenêtre à gauche illumine la scène.
L’Allégorie de la Foi au Rijksmuseum
Une toile peinte entre 1670 et 1674, considérée comme la dernière œuvre du peintre. Le visage d’une femme tourné vers un orbe en verre est le symbole de la foi. A ses pieds une pomme, un serpent gît sur le carrelage à damier.
Sur le mur, la “Crucifixion”, tableau inspiré de celui de Jacob Jordaens.
Le verre de Vin
La toile représente un intérieur hollandais éclairé sur la gauche par deux ouvertures entrouvertes, montrant un même vitrail. Le quatre-feuilles du centre révèle une figure allégorique colorée, et des armoiries.
Une femme en robe rouge assise devant une table finit son verre de vin. Près d’elle un homme, la main sur le pichet semble vouloir la resservir. Nous sommes vraisemblablement dans une scène de séduction.
Walter Liedtke dit de cette œuvre :
« aucune analyse s’attachant aux conventions artistiques ne peut parvenir à suggérer la beauté pure et l’extraordinaire raffinement d’un tableau tel que Le Verre de vin, qui peut être considéré comme la première de ses œuvres de complète maturité. »
Jeune fille au chapeau rouge au Rijksmuseum
Ce tableau ou “tronie” fait partie des plus petites toiles de Vermeer. La jeune fille occupe tout l’espace et semble toiser l’observateur.
Le chapeau rouge en fourrure attire le regard. Des petites touches blanches apportent la lumière en opposition à la tapisserie mate de l’arrière-plan. Les tapisseries réalisées à la fin du XVIe siècle dans le sud des Pays-Bas semblent avoir inspiré le peintre.
L’Officier et la jeune fille riant
C’est une rencontre entre un homme élégant et une jeune femme. Le chapeau bordé de fourrure indique son statut de soldat. Son écharpe noire est en fait une cartouchière. La lumière douce de la fenêtre illumine le visage de la jeune femme.
Le peintre joue les contrastes avec des ombres finement peintes et les touches claires plus épaisses.
En arrière-plan une représentation de la Hollande et la Frise-Occidentale, issue d’une carte réelle de Balthasar Florisz van Berckenrode, 1620.
La Maîtresse et sa servante au Rijksmuseum
Une lettre semble susciter l’interrogation d’une jeune femme et de sa servante. La coiffure sophistiquée, les perles à ses oreilles et autour de son cou, la fourrure de son manteau indique le milieu aisé de la protagoniste. La fenêtre non visible dans la représentation se reflète dans les objets posés sur la table.
La femme à la balance
Une femme tient une balance avec délicatesse, elle semble attendre qu’elle se stabilise ; sans doute pour peser les objets en or et argent posés sur la table.
La petite fenêtre, sur la gauche, illumine le tableau du “Jugement dernier” placé en arrière-plan. Vermeer s’est probablement inspiré d’une œuvre flamande pour réaliser cette version.
Le rideau jaune devant la fenêtre confère une lumière chaleureuse dans la pièce. Remarquons le visage serein de la jeune femme. Comme souvent chez Vermeer, la veste est bordée de fourrure.
La Leçon de musique interrompue
Au XVIIe siècle la pratique musicale est associée à la séduction ; ce sont les membres de la haute société qui sont formés à la musique. Le thème amoureux est renforcé par la présence du tableau de Cupidon en arrière-plan ; une représentation que nous retrouvons dans d’autres toiles de Vermeer. La lumière douce qui s’échappe de la fenêtre sur la gauche engendre une certaine sérénité.
L’exposition au Rijksmuseum est ouverte jusqu’au 4 juin 2023.
Nic Blanchard-Thibault
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