[INTERVIEW] Bandit Bandit : « On est rempli de plein de sentiments »

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« On a mis tout ce qu’on avait de meilleur en nous pour ce disque »

Arrivé le 25 mars 2019 avec son premier single « Maux », Bandit Bandit s’est tout de suite imposé dans le paysage de la scène rock française et est devenu l’un des groupes les plus prometteurs de sa génération avec Last Train. Maëva et Hugo se sont confiés à quelques jours de la sortie de leur premier album 11H11 qui sort ce vendredi chez Backdoor Records.

bandit bandit groupe français
Hugo et Maëva par Boby Allin

Votre album sort ce 29 septembre 2023, comment ressentez-vous ce moment si particulier ?

Maëva: On est rempli de plein de sentiments, il y a de l’excitation, du soulagement et de la peur aussi…

Hugo : C‘est un gros mélange de sentiments qui arrivent par vague. L’album est terminé depuis pas mal de temps et c’est ça qui est frustrant quand tu es artiste. On y est enfin et on a hâte de reprendre la route des concerts.

Avoir son premier album entre les mains, c’est … ?

Hugo : C’est une fierté indescriptible. C’est un bébé et tu te refais tous les mois et années d’écriture et de composition pour ce disque. On se revoit avec Maeva quand on était confiné dans le sud de la France, ça te renvoie à plein de souvenirs en fait…

Maëva : J’en ai carrément chialé avec tout ce qu’on a pu vivre avec la création de ce disque et c’est un premier album en plus, c’est assez important. Il y a une symbolique derrière tout ça, on l’a enfin dans les mains et maintenant c’est au public et aux médias de décider de ce qu’il en sera.

Toxique Exit, premier single de 11H11 sorti le 3 avril 2023.

Ce premier album semble ouvrir un nouveau chapitre dans l’histoire de Bandit Bandit ?

Maëva : Les 2 premiers ep’s sont considérés comme le premier chapitre de l’histoire de Bandit Bandit, que ça soit dans le style, le son ou les personnes avec qui on a travaillé. Et pour ce deuxième chapitre… Je n’aime pas dire que c’est l’album de la maturité, ça fait cliché. Mais avec le temps qu’on a pu y consacrer, il a eu le temps de maturer en fait. On a mis toutes nos envies et tout ce dont on rêvait car le format album est parfait pour cela. On a mis tout ce qu’on avait de meilleur en nous pour ce disque.

Hugo : Le confinement a été une période très triste mais on a eu le temps de réfléchir à ce qu’on voulait car avec Bandit Bandit, on a le souhait de vous proposer une musique qui évolue et de ne pas refaire ce qu’on a déjà fait dans le passé. Donc oui, les 2 premiers ep’s ont ce même univers sans pour autant perdre le fil rouge.

Maëva : Ouais, c’est ce que j’ai envie de dire aux personnes qui nous suivent depuis le début et qui sont férus de « Nictalope » et « Maux ». Dans cet album il y a des surprises avec des choses qui vont peut-être surprendre les gens, mais on garde cette base hyper agressive avec des riffs bien gras, de grosses guitares et une batterie énorme.

Hugo : C’est ce qu’on a toujours dit depuis le début, Bandit Bandit est un mélange de chansons françaises et de rock anglo-saxon pur et dur.

Maux, premier single sorti le 25 mars 2019.

11h11 le titre de l’album, fait allusion à ces heures miroirs qui annonceraient un changement positif dans nos vies ?

Maëva : C’est tout à fait ça.

Hugo : Exactement, on tombait tous les jours sur cette heure quand on était en studio et on y est resté 1 mois, et c’était assez ouf en fait. Il y a comme une dualité avec le nom Bandit Bandit et les heures miroirs et lorsqu’on s’est renseigné, on a vu qu’il y avait comme une sorte de connexion aux anges, quelque chose d’assez fort en fait …

Maëva : Ouais et le 11 en numérologie est un chiffre assez fort qui parle de trouver la voie, de s’assumer et de s’exprimer pleinement…

Hugo : … Et de renaissance aussi.

Vous sentez-vous prêts à assumer un éventuel succès de l’album ?

Maëva : Les personnes qui travaillent avec nous y croient et nous aussi mais on sait que dans la musique on peut avoir de belles comme de moins belles surprises. Mais on va défendre cet album avec conviction que ça soit sur scène ou dans les médias.

Hugo : On a la chance d’être bien accompagné, on a l’impression d’avoir une force de frappe un peu plus importante qu’avant. Les premières retombées sont très positives, et on est vraiment fier des nouveaux morceaux qu’on va défendre en live, car le rock ça se défend surtout en live.

Auriez-vous peur de vous retrouver sous les feux des projecteurs du jour au lendemain avec la sortie de l’album ?

Hugo : Oui et non, on sortirait de l’adolescence peut-être, mais là, on a la tête sur les épaules avec l’âge, et nous sommes deux. On sait ce qu’on veut et ce qu’on ne veut pas, ça nous fait pas plus peur que ça…

Maëva : Ouais, nous sommes assez ancrés comme personne, on connaît ce métier et on sait ce qu’il faut faire et ne pas faire…

Hugo : … Et puis on n’habite pas à Paris. On n’est pas en représentation à chaque sortie, là on se sent chez nous et avec nos potes. Et c’est de la musique qu’on fait.

La Marée, deuxième single de 11H11 sorti le 24 mai 2023.

A l’écoute de l’album, on ressent une certaine influence et admiration pour l’esthétique des 60’s. Je pense bien évidemment aux titres « Pixel », « Nictalope », « Dimension » qui figurent sur vos 2 premiers ep’s mais surtout au magnifique « Si J’avais Su »  en 3ème piste.

Hugo : Quand on l’a écrit on s’est dit : « On tient un single ! », et nous sommes allés jusqu’au bout avec ce titre. Il fait plus pop et solaire que ce qu’on a fait par le passé, avec un côté sixties et moderne et une influence à la Gainsbourg sur certains aspects. Et ce que j’aime avec « Si J’avais Su », c’est le côté chaud/froid avec des couplets lugubres et des refrains plus solaires …

Maëva : La référence c’est la période Love On The Beat de Gainsbourg et les albums qu’il a faits dans les années 80’s. C’est vraiment le côté cold wave très froid.

Hugo : On a ajouté beaucoup plus de synthés sur l’album avec des influences à la MGMT qui donne ce côté très cold.

Si J’avais Su, troisième single de 11H11 sorti le 15 septembre 2023.

Quelle a été votre réaction à l’annonce de la disparition de Jane Birkin?

Maëva : J’étais trop triste et j’ai foncé chez le libraire du coin pour me procurer son Munky Diaries que j’ai lu en 4 jours et j’ai adoré. J’ai pas envie de parler de Jane Birkin au passé car elle est vraiment incroyable et elle fait partie des personnes qui ne vieillissent pas malgré les décennies qui défilent, elle est intemporelle autant dans son discours que dans ce qu’elle représentait, elle est irrattrapable…

Hugo : Ouais elle est libre depuis le début. Elle passait un peu pour une nunuche au début dans les interviews mais elle savait ce qu’elle faisait et de quoi elle parlait. J’ai adoré son dernier album produit par Etienne Daho. De A à Z, c’est une femme qui a été incroyable et méga inspirante…

Maëva : Ouais c’est une grosse référence pour nous, et son livre est génial, on a l’impression d’être tout prêt d’elle, vu qu’on la suit de ses 11 ans jusqu’au début des années 80’s. Elle est hyper fraîche, vraie, abordable et brut.

Bandit bandit Serges Gainsbourg
Hugo et Maëva devant chez Serge Gainsbourg, mars 2021. Photo : Léa Grandjean.

Vous faites partie de ces rares groupes de rock à chanter en français actuellement, et lorsqu’on écoute et lit vos paroles, on sent que vous prenez un réel plaisir à jouer avec les mots.

Hugo : Ouais carrément et on y prend de plus en plus goût à écrire des textes en jouant avec les mots, et cet album est moins nombriliste car on regarde les choses autour de nous maintenant…

Maëva : En termes d’écriture et de style on est allé plus loin, on a réécrit les textes juste avant d’enregistrer les voix en studio. On a eu de grosses réflexions entre nous et avec l’équipe pour pousser le concept un peu plus loin, on a repris tous les textes mots par mots.

Hugo : Au début on voulait que ça sonne et maintenant c’est vrai que le fond est aussi important que la musique et tout le monde nous dit que ça doit être un exercice difficile mais non, car on se sent sincère à le faire comme ça.

Chanter en français est l’une des forces du groupe alors ?

Hugo : Oui clairement, avant « Maux » on écrivait en anglais et depuis la sortie du premier single en 2019, on n’a pas réécrit de textes en anglais pour affirmer notre langue. On aime notre langue et on essaie de la chérir comme on peut.

On a souvent tendance à vous identifier aux Bonnie & Clyde du rock français ?

Maëva : Il y a toujours quelque chose de désinvolte dans notre musique même si on explore un peu plus la pop ou d’autres lieux du rock, il y a toujours ce truc de Bandit Bandit qui ronronne…

Hugo : Ouais, il y a toujours ce truc sensuel, sexy et de feu avec Bandit Bandit. Il y a toujours ces mots là qui reviennent, c’était la base de notre brainstorming de départ en 2018 et je trouve que ce truc avec les Bonnie & Clyde nous va bien en fait.

La reprise de Bonnie & Clyde pour les 30 ans de la disparition de Serge Gainsbourg.

Tout le monde peut s’identifier à vos chansons, mais lorsqu’on écoute attentivement les paroles de 11H11, on ressent le caractère personnel de vos textes. Les paroles de : « Des Fois » et de « Mauvais Garçon » sont d’ailleurs assez évocatrices.

Hugo : « Des Fois » est une chanson qui parle de rupture et avec Maeva on a vécu des moments assez douloureux pendant l’enregistrement et on se disait qu’on écrivait sur nous à ce moment là. Ce groupe et ces paroles, c’est nous mais pas que, par exemple « Pyromane » traite du mouvement #meetoo et #musictoo car on a été confronté à ces problèmes. « Lucky Luke » parle de féminicide et d’autres sujets plus engagés sur le monde. Et pour « Mauvais Garçon », c’est la seule chanson qui n’est pas de nous et c’est Jean Grillet, alias Chien Noir qui nous a offert le texte. Pour le concept des paroles, il donne la parole à la muse de « Venus In Furs » du Velvet Underground avec ce point de vue presque féministe.

Maëva : C’est totalement ça, dans le rock on a souvent pris des muses et on les a rendu muettes. Pour le coup, il a voulu lui donner la parole. Et c’est en 2020 lors des Francopholies qu’on a fait en acoustique à cause du covid, qu’il est venu nous voir en nous proposant un texte qu’il avait écrit depuis des années et qu’il ne savait pas à qui offrir. Il pensait qu’il était fait pour nous. Il a écrit des chansons pour Vanessa Paradis par exemple, et avec Hugo ont était assez frileux de chanter les textes de quelqu’un d’autre car nos textes sont propres à nous et même parfois de l’ordre de l’intime. Mais quand on a lu ce texte, on en est tombé tout de suite amoureux et on a été vraiment flatté qu’il vienne vers nous avec ce texte là.

Bandit bandit groupe français
Sur la scène des Francofolies en 2021.

Tout l’album parle d’amour mais à partir du point de vue de la rupture : on se clashe, on pleure, on essaie de comprendre, on s’excuse et on raisonne l’autre.

Hugo : Il y a un peu de tout ça oui mais on n’a pas fait une Track List en fonction de la manière dont une histoire peut se passer. Il y a beaucoup de nous dans l’album et on connaît tous ça, l’amour change et évolue et avec Maeva on reste des âmes sœurs quoi qu’il arrive.

 Maëva : J’adore « La Montagne » en live elle est vraiment trop cool, elle est hyper groovy et même avec mon corps je la ressens différemment, et « Méchant Garçon » aussi.

Hugo : On est tous d’accord dans le groupe avec « La Montagne » parce que c’est un truc qu’on n’a pas l’habitude de faire, elle a ce groove un peu à la David Bowie ou Talking Heads et on la rallonge de ouf en live.

Maëva : « Pyromane » aussi elle est terrible, elle donne trop envie de faire de la baston.

Comment vos nouveaux titres se marient-ils en live avec les anciens  qui figurent sur vos 2 premiers Ep’s ?

Hugo : Tu prends des titres comme « Curseur » avec des riffs un peu plus stoner qui marchent hyper bien avec des titres comme « Néant » par exemple. Au début on s’est demandé comment on allait faire pour le live, mais ce qui est bien avec l’album, c’est qu’on a des tempos assez rapides qui permettent de faire la bringasse en live.

Côté rythmique, Anthony est derrière les fûts et Ari tient la basse mais aussi la guitare ?

Hugo : C’est vrai que Bandit Bandit est un duo mais on ne peut pas parler d’eux parce que c’est eux qui jouent leurs parties en studio avec leurs sons et leurs arrangements pour sublimer les chansons et on les remercie très fort. J’ai envie de remercier également Yoann notre ingé son qui est notre père spirituel (rire) et toutes les personnes qui nous suivent sur la route. La famille s’agrandit et c’est cool.

Bandit bandit
Anthony, batteur de Bandit Bandit. Photo : Velasco.

A chaque concert, Maëva nous parle de la parité hommes / femmes via le #morewomenonstage. Peux-tu nous en toucher quelques mots ?

Maëva : Surtout aux lecteurs oui, parce que les hommes devraient se sentir concernés par ce message là. More Women On Stage a été lancé par Lolla Frichet des Pogo Car Crash Control et ça a été comme un cri de ralliement. Même si on ne se connaît pas, on a envie de se serrer les coudes pour cette cause et c’est un super mouvement car des concerts sont organisés avec des masterclass et j’ai envie de dire « N’attendez pas qu’on vous donne votre place, prenez-là ! » parce qu’une nana est aussi bonne qu’un mec sur scène. Arrêtez donc de jouer à l’amicale des mascu et ouvrez un peu plus vos esprits et oreilles.

Tu dois être fière d’être l’une des portes paroles du mouvement alors ?

Maëva : Fière je ne sais pas, mais ce qui résonne le plus en moi c’est d’avoir des filles plus ou moins jeunes et qui viennent me dire : « Plus tard, j’aimerais faire ce que tu fais. », je pense à cette petite Lana par exemple. C’est super cool, car il y a un besoin hyper important de représentation car quand tu regardes les programmations des festivals et que tu vois qu’il n’y a que 14% de femmes programmées, tu te dis qu’il y a un réel problème.

Certains essaient de faire des soirées 100% féminines, c’est bien pour le marketing mais ça donne un semblant de culpabilité. Faites des prog’ totalement égalitaires et on en reparlera ou du moins essayez d’en faire. Tu prends le Pointu Festival qui te programme qu’une nana sur 4 jours, c’est se foutre de la gueule du monde, car des groupes de nanas qui déchirent, il y en a pléthore.

Bandit Bandit Troyes 2021 Nos Rêves Font Du Bruit
Festival Nos Rêves Font Du Bruit, Troyes 2021. Photo : Gian Alex.

Vous avez commencé la musique assez jeune – notamment toi Hugo – et Bandit Bandit est à l’aube de sa carrière. Comment vous imaginez-vous dans 20 ou 30 ans ?

Hugo : (rire) Mais j’aurai 1000 ans dans 30 ans. Je serai toujours dans la musique, à écrire pour moi ou d’autres artistes en studio ou en résidence…

Maëva : Il me pique mon idée (rire). Faire une résidence serait trop bien, avant j’étais dans la relation Presse avec des groupes internationaux et même de jeunes groupes et si j’en ai la légitimité j’aimerais les accompagner dans des endroits safe pour les faire évoluer car on sait que dans cette industrie, c’est encore gangrené par des personnes malveillantes et aux mœurs légères. Donc, si j’ai la légitimité de le faire, je le ferai avec plaisir.

Hugo : Et si Bandit Bandit est encore là ça serait le top.

Merci Maëva et Hugo pour cette interview et à bientôt sur la route du rock.

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Bandit bandit en concert

 

Gian, septembre 2023.

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