Gros Boris, comme un hiatus entre ombre et lumière

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En ces temps troublés, les poètes rock sont de retour…

Gros Boris chante l’amour et la mort dans un décor cosmique, exhumant le romantisme, la pensée Nietzschéenne, et une certaine chanson française, à l’occasion de la publication de son premier EP, Comme un Hiatus. Fusionnant ses courants majeurs, et ravivant ses racines folks, c’est le Rock dans toute sa diversité qui en sort grandi.

GROS BORIS - Comme un hiatus
Pochette réalisée par Solenn Aricie et Thomas Wienc

Dans les coulisses d’un pays en proie au Covid-19, de nombreux talents affûtent leur instruments en silence. Si le spectacle vivant est menacé, ces artistes n’ont pas renoncé, nourrissant leur œuvre d’un climat pesant, ou de leurs envies d’ailleurs. Certains patientent, d’autres extériorisent leurs frustrations. Gros Boris fait partie d’une troisième catégorie, ceux profitant du silence pour explorer leurs paysages intérieurs. Si j’évoque un groupe dans la réalisation, Comme un hiatus résulte surtout de la conception, et de la vision d’un homme : Boris Khederian.

Boris Khederian
Boris Khederian (credit Barbunin Desjardins)

En 2018, après s’être aguerri au sein de diverses formations en tant qu’auteur, compositeur et interprète, il s’attèle à l’écriture d’une œuvre intimiste. L’univers, le texte, et la qualité d’interprétation sont déjà là. Sa rencontre avec le guitariste arrangeur Brice Chandler va lui permettre de sublimer ses visions poétiques.

Ce dernier amène dans ses valises, sa six-cordes et sa culture américaine. Il apporte également son expérience au niveau de la réalisation et du mixage. Soutenu par des musiciens chevronnés, Raphaël Leroy-Alcantara, Vincent Pedretti, et Victor Mechanik (basse, percussions et claviers), Gros Boris accouche à l’automne 2020 d’un premier EP 5 titres, particulièrement riche et ambitieux.

Un clair-obscur envoutant

Dès les premières mesures, on peut sentir le rythme frénétique et aérien nous soulever de terre. Lorsque la voix s’élève du purgatoire des enfers, c’est pour plonger l’auditeur au cœur de la tempête. Dans les océans démontés de l’âme humaine. Une cavalcade à la fois sauvage et sereine, balisée par un riff de guitare extirpé des cavernes, à la mode Morricone. L’harmonica miaule sous les coups de cravache et la diligence effleure le bord des falaises.

Dans une danse désespérée, Boris Khederian fait naître un nouveau souffle poétique. Il adresse un hommage à Miossec et Dominique A (le nom du groupe est inspiré d’un de ses titres), passe un coup de polish sur la tombe d’Alain Bashung, et ressuscite au passage, le cadavre de Noir Désir. Un convoi suicide majestueux, qui vous agrippe pour ne plus vous lâcher. « Printemps noir. Printemps amer. Fin de l’histoire. Trait au cutter. »

Gros Boris – Printemps Noir

Mais Gros Boris fait plus que magnifier les tourments de l’âme. Il peut aussi vous faire traverser le voile, en sortant de la structure linéaire. Contaminé par la rage tant aimée du rock’n’roll, c’est le souffle de trente ans d’éclectisme pop qu’il régurgite alors, avec une classe inouïe.

“Je vois le texte comme une photographie émotionnelle. J’aime m’éloigner du réalisme, essayer de mettre des mots sur mes sensations. Sans nécessairement raconter une histoire linéaire, ou construite.”

La fougue du rock alternatif semble alors se mêler harmonieusement aux sonorités nouvelles. Le message se pare de métaphores pour diluer le verbe en sonorités, mais touche la cible en plein cœur. On s’accroche à chaque mot pour que le plaisir perdure. Ce poète ne touche pas nos oreilles, il embrasse directement nos sens…

Gros Boris – Pandore

Outre sa voix hypnotique et sa prose fascinante, Boris Khederian fait un choix qui ne peut que ravir le public orphelin de Noir Désir. Il refuse de trancher entre rock et chanson française

“L’esprit de ‘Comme un hiatus’ se situe à la lisière entre une certaine chanson française et un certain lyrisme rock.”

Le titre Spider s’ouvre sur des harmoniques carillonnantes. Le thème tourne, obsédant, et orchestre une danse macabre. Métaphore d’une araignée prise à son propre piège. Si le phrasé rappelle celui de Bertrand Cantat, ou de Gaëtan Roussel (Louise Attaque), Boris Khederian affirme son style. D’ailleurs, il puise autant chez ces grands paroliers que dans le verbe de L.F Céline, ou le cinéma de Jim Jarmusch. Les grands artistes sont souvent le résultat de grandes influences…

Gros Boris – Spider

Les racines du rock’n’roll sont sous-jacentes, bien qu’elles surgissent fréquemment, disséminées dans le paysage musical de Gros Boris.

L’harmonica et les rythmes marqués se glissent dans les compositions de manière subtile. Célébrer le blues du delta avec un peu de technologie et pas mal de feeling, les Black Keys s’y étaient déjà employés avec succès. Si Gros Boris possède d’autres racines, il dispose de sources d’inspiration communes. Le blues et le folk du sud des Etats-Unis sont indéniablement présents entre les lignes instrumentales de l’album.

Gros Boris – El Nino

De Comme un hiatus émane puissance et intensité. Mélodie du langage et instrumentaux visuels. En somme, si vous êtes en quête d’une valeur montante du rock hexagonal, ne cherchez plus. Gros Boris saura combler vos attentes avec ce premier EP. En attendant de pouvoir les admirer sur scène…

Serge Debono

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