Un périple meurtrier au son du blues
Quatre ans après la publication de son second opus, le groupe Coffee revient avec Amok, un mini-album conceptuel et savoureux.
De 1991 à 2004, la paire Hervé Templier (chant et batterie) et Hervé Broquet (guitare) constitue le noyau dur de la formation parisienne Soul Finger. Les deux musiciens tentent ensuite l’aventure en duo. Une formation ultra réduite, façon Black Keys, qu’ils baptisent “Coffee”. Un troisième larron, le guitariste Samuel Rumeur, les rejoint en 2011.
A cette époque, avec ses deux guitares suintant le blues et le rock psyché, Coffee est déjà un power-trio imaginatif, aux influences affirmées. Après avoir publié un mini-opus suivi d’un Ep, l’album Nobody’s Perfect voit le jour en 2020.
Coffee – Apollo (Nobody’s Perfect)
En parlant d’influences, celles de Coffee respirent le bon goût et convergent autour d’un axe central… le blues !
“Si l’on veut faire court, on pourrait dire qu’elles couvrent toute la musique populaire entre John Lee Hooker et Jack White.”
Entre ces deux orfèvres, le trio cite également Buddy Guy, The Doors, Jefferson Airplane, Creedence Clearwater Revival, Donovan, Morphine, The Clash, Kat Onoma, Black Keys ou encore James Brown.
Coffee possède des oreilles fines, et un esprit aventureux. Samuel Rumeur ayant troqué sa guitare pour une basse vient doper la section rythmique du trio. Ils peuvent désormais aborder un projet plus ambitieux…
Amok, second album du groupe publié le 31 janvier 2024, est un polar blues-rock. Il s’ouvre sur un riff nocturne et lancinant. Le chant de Hervé Templier, évoquant la grande époque du rock psyché, fait poindre l’aurore, et nous conte l’histoire d’un homme à la fois désorienté et soulagé. Il erre dans les rues et confesse avoir commis un crime. Incapable d’expliquer le déroulement des évènements, il propose de dessiner son histoire…
Coffee – Feelin’ Fine (Amok)
En ethnologie, l’amok désigne une rupture de l’équilibre interne, un accès de violence manifesté par un individu, et ne prenant fin qu’une fois son crime accompli.
L’album de Coffee décline le périple de son protagoniste en sept séquences, et donc sept titres. L’histoire d’un homme amoureux rendu fou par la guerre et la jalousie. Un homme usé, déçu, et fatigué de rêver, trouvant dans le meurtre et la vengeance, un exutoire à son malheur.
En français, ou en anglais, le blues et les miaulements d’harmonica de Coffee sonnent aussi authentiques qu’un groupe de Nashville. Le blues du sud des Etats-Unis est omniprésent. Et quand ils s’aventurent en terrain funky, les locaux de AM Stud où ils enregistrent, exhalent même le parfum du nord-ouest de l’Alabama, et des studios Muscle Shoals…
Coffee – The Nightmare (Amok)
A l’heure de la dématérialisation, l’idée de proposer une œuvre musicale dans un emballage soigné peut paraître désuète à certains. Il n’empêche que lorsqu’une œuvre puise autant dans l’imagination, le visuel vient souvent nourrir, ou décupler, le plaisir de l’auditeur.
Et comme Coffee sait mêler les genres, les influences, et les époques avec harmonie, le CD de l’album Amok est glissé dans un classieux package (signé Eric Daumont), façon club de jazz et polar américain des 50’s. Ce dernier abrite également un livret comportant de superbes illustrations correspondant au récit dessiné du protagoniste. Un contenant à la hauteur du contenu joué par Coffee, grisant et hypnotique.
Si vous souhaitez les écouter en live, Coffee sera en concert le 22 mai aux Disquaires, 6 rue des Taillandiers (Paris 11ème). En attendant que Amok soit disponible sur les différentes plateformes, vous pourrez en profiter pour vous procurer sur place le précieux sésame.
Serge Debono