It’s Only Rock’n’Roll, le dernier Stones de l’orfèvre Mick Taylor

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Le public et les critiques sont unanimes, les Rolling Stones ont produit leurs albums les plus aboutis entre 1969 et 1974. Une période correspondant au passage de Mick Taylor dans leurs rangs.

Quand on vient d’enchaîner quatre albums du niveau de Let It Bleed, Sticky Fingers, Exile on Main Street et Goats Head Soup, difficile de ne pas décevoir son public. Sans compter qu’au début des années 70, les Stones contraints de s’exiler cumulent les cailloux dans leurs chaussures.

Les Stones s’en sortent toujours

rolling stones 1974

Pourtant, les multiples procès et affaires de dopes ne semblent pas avoir d’emprise sur les créations du groupe, ni même sur sa popularité. Au contraire, ces scandales sanctifient le statut de bad boys des Glimmer Twins (Jagger-Richards). Le duo va même se substituer au producteur Jimmy Miller, grand artisan du son de leurs derniers albums.

richards - jagger (Stones)
Keith Richards and Mick Jagger Amsterdam 1973

Alors bien sûr, ce n’est sans doute pas le meilleur opus d’une longue carrière riche en rebondissements. Mais difficile de bouder l’entame très “stonienne” de l’album, dans laquelle Mick Taylor assure déjà l’essentiel en mimant à merveille le toucher du “Keef”, pendant que ce dernier tient la basse…

The Rolling Stones – If You Can’t rock Me

La passion que Jagger et Richards éprouvent pour la soul et le rythm and blues n’est un secret pour personne. Après avoir repris le titre “My Girl” aux Temptations en 1967, ils adaptent l’entraînant “Ain’t too proud to beg”. On retrouve aux ivoires le prestigieux claviériste Billy Preston, déjà présent sur leurs trois derniers opus. Deuxième single extrait de l’album, le titre grimpe à la 17ème place du Billboard.

The Rolling Stones – Ain’t Too Proud to Beg

Comme souvent avec les Stones, l’enregistrement est chaotique, et s’étale sur près de six mois dans les studios Musicland (Munich). Entre novembre 1973 et mai 1974. Les états d’âme de Mick Taylor qui a le sentiment ne pas être accepté, ni valorisé, commencent à se faire sentir au sein du groupe.

mick taylor
Mick Taylor & Keith Richards

Si certains prétendent que le titre éponyme “It’s Only Rock’n’roll” est une dédicace de Mick Jagger au guitariste virtuose, le chanteur ne l’a jamais confirmé. Ce qui est certain, c’est que le texte fait référence aux nombreuses critiques s’abattant sur les Stones à chaque nouvel album. Jagger déplore le fait que le groupe soit pris au sérieux de manière excessive, alors que “ ce n’est que du rock’n’roll”.

mick jagger

Le titre est composé par Mick Jagger au cours d’une jam-session avec les Faces. Ron Wood, futur Stones, tient la 12 cordes sur l’enregistrement, et aurait apporté la structure instrumentale sur laquelle Keith Richards a ajouté des overdubs. David Bowie était également présent dans les chœurs, cependant il ne figure pas sur la version définitive. Enfin, fait assez rare pour être signalé, ce n’est pas Charlie Watts qui joue la partie batterie, mais Kenney Jones (Faces, The Who).

The Rolling Stones – It’s Only Rock’n’roll

On peut tordre le nez sur un ou deux titres faciles, mais qui peut résister aux premières mesures de “Dance Little Sister” ?! Un standard de rock’n’roll un peu éclipsé par le titre éponyme. Pourtant, Jagger s’y impose à nouveau comme “la voix du rock”, alternant un chant impatient avec des bégaiements tombant à point nommé. Le jeu de Keith Richards retrouve sa sauvagerie contagieuse, et le rythme frénétique alpague l’auditeur comme au temps des sixties.

The Rolling Stones – Dance Little Sister

Il n’est jamais aisé de concilier un style puisant dans le blues traditionnel et les sonorités nouvelles. et il faut leur reconnaître une chose, en cette année 1974, les Rolling Stones s’en tirent à merveille. Même si l’apport du percussionniste Ray Cooper, ainsi que de la triplette magique des ivoires, Jerry Hopkins, Billy Preston et Ian Stewart, arrangent bien leurs affaires.

La virtuosité et l’imagination de Mick Taylor sont également au rendez-vous sur des morceaux tels que “Time Waits For No One” (instrus et arrangements). L’intéressé explique avoir puisé les sonorités de son solo lors d’une tournée des Stones au Brésil. Les percussions de Ray Cooper intégrant tambourins et maracas renforcent le côté latino. Les claviers tourbillonnants sont l’œuvre de Nicky Hopkins. La partie de synthétiseur, instrument encore rare, est jouée par le bassiste Bill Wyman.

Time Waits For No One

Le titre final évoque l’épuisante surveillance subie par le groupe dans une politique sécuritaire. Cette délicieuse piste funky aux accents disco clôture l’album. Un groove inspiré de Sly & Family Stone, où Mick Taylor, le guitariste trop discret, tire sa révérence… à la basse ! Ce n’est pourtant pas un désaveu. Les Stones d’alors, aimaient échanger leurs rôles. C’est ainsi que l’on retrouve Mick Jagger à la guitare-rythmique, Keith Richards à la wah wah, et Bill Wyman aux synthétiseurs.

Fingerprint File

Pochette

 

stones

Après avoir vu son travail sur le livre Rock Dreams, Mick Jagger invite le peintre belge Guy Peellaert à assister aux séances d’enregistrement. Il accepte de réaliser la pochette de l’album. Celle-ci représente les Rolling Stones comme des divinités sur les marches d’un temple, entourés de filles en tenues grecques. Peellaert refuse le contrat d’exclusivité qu’on lui propose, et réalise quelques semaines plus tard la pochette du nouvel album de David Bowie (Diamond Dogs).

Départ de Mick Taylor, arrivée de Ron Wood

Une fois l’album plié, lassé de voir les Glimmer Twins encaisser les bénéfices de ses contributions, Mick Taylor décide de mettre un terme à ses souffrances en quittant le groupe.

Mick Taylor

“Les Stones sont un groupe différent. Je m’en suis rendu compte lorsque je les ai rejoints. Ce n’est pas vraiment leur capacité musicale, c’est juste qu’ils ont un certain style et une attitude unique.”

Bien qu’ayant contribué à rendre leurs compositions plus fluides et aériennes, les Stones ne font pas de sentiment. Ils lancent un casting de guitaristes dès son départ, en décembre 1974, dont Ron Wood sort vainqueur, malgré les auditions de Jeff Beck et Rory Gallagher.

Ron Wood

L’album “It’s Only Rock’n’roll” grimpe à la deuxième place des charts anglais. Depuis la publication de “Beggars Banquet” (1968) c’est la première fois qu’ils ne culminent pas au sommet. Il n’en faut pas plus aux médias d’outre-manche pour annoncer la chute des Rolling Stones. L’inoxydable groupe saura s’en accommoder.

Les albums suivants seront plus vertement critiqués, sans pour autant parvenir à les destituer de leur titre. Le plus grand groupe de rock du monde survivra aux nouvelles modes, non sans faire quelques concessions. Bien malin celui qui aurait pu leur prédire au milieu des seventies une telle longévité, alors que le groupe semblait être en permanence au bord de l’implosion. Il faut croire que les pierres roulent, mais ne tombent jamais.

Serge Debono

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