Élévation

Ce matin du Dimanche 30 Mai 2010, la radio est branchée sur Classic 21, la station rock de Belgique. La journaliste annonce un grave accident automobile à Bruxelles. On apprendra le lendemain que Denis Wielemans, le batteur de Girls In Hawaii, en est la victime, à 27 ans. Denis, le petit frère, un excellent musicien et « quelqu’un de lumineux et solaire », précisera ensuite le frangin Antoine Wielemans. Le groupe vacille.
Antoine et Lio Vancauwenberge, les deux chanteurs / guitaristes et fondateurs du collectif expliqueront plus tard leur sidération puis la longue épreuve du deuil, et la nécessaire résilience, malgré la douleur et le manque. Chacun de leur côté, ils recommencent à écrire, ne sachant pas trop ce qu’il adviendra par la suite.
« J’avais peur qu’on se retrouve avec deux albums solos, confirme Lio. Parce que les textes d’Antoine étaient très personnels. Que je n’étais pas le frère de Denis. Je n’arrivais pas à me positionner. Je n’avais pas envie de gâcher tout son travail. Que notre disque ressemble à un building mal fait. Avec le temps, je ne sais pas comment on y est parvenu mais on est arrivé à assembler un beau puzzle, à tisser un joli motif. »
– Interview de Girls In Hawaii en 2013 – Le Vif

Ever Rest
De ces atermoiements, cinq ans après Plan Your Escape (Lire Girls In Hawaii : les albums From Here To There et Plan Your Escape) émerge finalement leur troisième album en Septembre 2013, Everest. La pochette, avec son sommet enneigé, ainsi que son titre en triangle, illustre le besoin d’élévation de l’équipe. Celle-ci d’ailleurs se recompose : François Gustin remplace Christophe Léonard aux claviers tandis que Andy Reinhard reprend les baguettes et les tambours. Évidemment, cette nouvelle collection de onze titres, dédicacée à Denis, porte le poids du deuil – Ever Rest -, dès les premières notes de Spring, Misses, Mallory’s Heights ou le poignant Not Dead.
Girls In Hawaii – Not Dead – Everest (2013)
Mais la tristesse est transcendée par d’autres thèmes, essayant de dépasser le trauma. Dans cette quête, Lionel et Antoine délaissent leur instrumentation habituelle voire même leur style pour utiliser plus de claviers dont des synthés dans des orchestrations oscillant vers la Musique Électronique. Comme le superbe Switzerland, incontestablement, l’une des chansons les plus abouties de Girls In Hawaii, et l’une des plus ascensionnelles que nous connaissions. Écoutez cette escalade émotionnelle à partir du leitmotiv « He knew it, he knew it… »
Girls In Hawaii – Switzerland – Everest (2013)
Il faut saluer ici le travail de production par Luuk Cox ainsi que le mixage de Tchad Blake (Lisa Germano, Pearl Jam, entre autres…). Les deux, à leur manière, ont aussi poussé les six à se dépasser le long du disque. Ainsi, un titre tel Rorschach, qu’on pourrait plus associer au Depeche Mode actuel, qu’aux auteurs des vignettes parfois pastorales de From Here To There…
Girls In Hawaii – Rorschach – Everest (2013)
Notons qu’une version double album contenant des « Besides » paraîtra également en édition limitée, avec entre autres raretés une reprise du cultissime Sister Europe des Psychedelic Furs, une réinterprétation qu’il serait dommage de négliger.
Girls In Hawaii – Sister Europe / The Psychedelic Furs – Everest Deluxe Edition (2013)
La reconnaissance immédiate de ce troisième opus difficile mais libérateur conduira à une autre épreuve : une nouvelle tournée. Un retour exemplaire car sous l’emblème lumineux d’un triangle pink floydien, les Girls In Hawaii – avec cette fois Boris Gronemberger à la batterie – atteindront la perfection dans la restitution de leurs derniers titres comme des déjà classiques de leur répertoire. Tout en dégageant toujours autant de sensibilité.
A suivre…
Bruno Polaroïd / Illustration par POUP












