Ritchie Valens, une étoile filante dans la constellation du rock

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Chronique du destin tragique d’un jeune talent des 50’s

L’histoire de Ritchie Valens est celle d’un teenager américain d’origine mexicaine, fan de rock, et dont le nom évoque une tragédie et quelques tubes de la fin des années 50 d’une fraîcheur inégalée.

Ritchie Valens

Ritchie Valens, un artiste doué, pionnier du rock latino. Sa carrière n’a duré que huit mois, et son existence s’est achevée dans sa 18ème année. Mais comme l’a démontré le succès du film La Bamba en 1987, sa musique et son histoire ont laissé une empreinte indélébile.

Sa famille et ses amis l’appelaient Ricardo. Ricardo Valenzuela. Mais au panthéon du rock, le Kid de Pacoima répond à jamais au nom de Ritchie Valens…

Ritchie Valens – Ooh My Head

Richard Steven Valenzuela Reyes voit le jour le 13 mai 1941 à Pacoima, un quartier mexicain de la région de la vallée de San Fernando (Los Angeles). Son enfance dans ce quartier populaire et défavorisé, est bercée par des airs mariachis, de la musique flamenco, ainsi que les sonorités du jump blues et du rhythm & blues. Dès l’âge de 5 ans, sous la férule de son père, il s’initie à la guitare, à la trompette et à la batterie.

Ritchie Valens – Malaguena

En 1954, Ritchie a 13 ans quand le rock de Presley déboule sur les ondes radios. Une véritable révélation qui l’incite à se consacrer à la guitare.

Un instrument que Ritchie trimballe en bandoulière durant son adolescence au sein de la Pacoima Junior High School. Cheveux gominés et gilet blanc, il incarne déjà un genre de Elvis latino, affolant les mirettes, et les oreilles de ses jeunes camarades.

Ritchie Valens – Rockin’ All Night

L’histoire qui suit n’est peut-être pas sans lien avec le funeste destin de Ritchie Valens. Certains trouveront matière à étayer l’idée que les malédictions existent ou que l’avenir est écrit à l’avance. Ou que la théorie développée dans la saga de films Destination Finale est fondée, et qu’il arrive que la Mort s’y prenne à deux foix pour récupérer son dû. D’autres, y verront un simple et malheureux hasard…

Le 31 janvier 1957, un avion de l’US Airforce et un autre appartenant à la compagnie Douglas Aircraft, entrent en collision au-dessus de la vallée de San Fernando (Los Angeles). Le second s’écrase dans la cour d’école de la Pacoima Junior High School, où 200 élèves suivent un cours d’éducation physique.

Ritchie Valens aurait dû se trouver parmi eux mais il s’est fait dispenser afin de se rendre à l’enterrement de son grand-père. Il échappe de peu à la mort, mais trois de ses camarades sont tués par les débris, et plusieurs de ses amis sont grièvement blessés. Cet évènement est connu aux Etats-Unis sous le nom de Tragédie de Pacoima. C’est ainsi que commencent les cauchemars du jeune guitariste. Des cauchemars incessants et une phobie de l’avion qui va le poursuivre jusqu’à son propre accident, le 3 février 1959.

Ritchie Valens – Bluebirds Over The Mountain

Le film biopic La Bamba ne fait pas réellement mention de ce premier accident, sans doute par respect pour les familles concernées, mais aussi pour rendre les rêves du jeune rocker plus prémonitoires. Néanmoins, on peut voir à plusieurs reprises, le sommeil de Ritchie Valens tourmenté par un crash assourdissant. Notamment en ouverture du film, une scène restituant la Tragédie de Pacoima, est bercée par le titre aérien Sleepwalk (du duo Santo & Johnny).

La Bamba (1987) – Scène d’ouverture (Santo & Johnny – Sleepwalk)

En effet, ce traumatisme bien légitime, va hanter les nuits et l’esprit du jeune rocker, au point de générer chez lui une phobie de l’avion. Un mal qu’il va s’efforcer de combattre afin de ne pas renoncer à son rêve. Devenir une star du rock, et mettre sa famille à l’abri du besoin…

Ritchie Valens – Boney Moronie

Ritchie n’a que 16 ans, et bien qu’autodidacte, il est déjà un musicien accompli, capable de composer et d’improviser. Son talent ne fait aucun doute. Si bien qu’un beau jour, alors qu’il s’apprête à faire ses débuts sur scène avec The Silhouettes, le groupe de son école, un de ses amis a l’idée d’envoyer une invitation à Bob Keane, producteur de la petite maison de disques Delfi-Records.

Ce dernier est convié à venir écouter celui que Pacoima surnomme déjà “Le Little Richard de la Vallée”. Cette comparaison incite Bob Keane à venir jeter une oreille. Très vite, il comprend que ce Richard Valenzuela est de la graine de star.

Ritchie Valens – That’s My Little Suzie

Ritchie Valens – Framed

Bob Keane l’invite à passer une audition dans un studio aménagé dans le sous-sol de sa maison. Sur un enregistreur deux pistes, le tout premier en stéréo, et avec deux micros à condensateur, Keane saisit les premiers délices du Kid de Pacoima, guitare et chant, sans se douter que ces prises brutes constitueront bientôt un trésor pour les fans éplorés.

Ritchie Valens – Ritchie’s Blues

En mai 1958, complètement séduit par sa voix, son talent de guitariste, son style, et sa faculté à composer comme son aîné Eddie Cochran, Bob Keane propose à Ritchie, un contrat chez Del-Fi Records. Afin de pouvoir toucher un large public, il lui demande de délaisser le nom de Richard Valenzuela pour celui de Ritchie Valens. Un peu réticent à l’idée de froisser sa famille en écourtant son patronyme, il se laisse finalement convaincre.

Ritchie Valens enregistre son seul et unique album lors d’une belle après-midi de juillet 1958. Quelques jours plus tard, il publie un premier single plus que prometteur…

Ritchie Valens – Come On Let’s Go

A l’automne 1958, Ritchie Valens quitte définitivement le lycée pour se consacrer à sa carrière. Mais à cette époque, la promotion d’un artiste s’effectue d’abord par le biais de la radio, ensuite par les tournées dans lesquelles plusieurs vedettes ou aspirants partagent la scène. Les disques de Ritchie se vendent bien, et l’heure est à la jeunesse triomphante, il est donc très sollicité.

Ritchie Valens – The Paddi-Wack Song

Encore tourmenté par la tragédie survenue dans son école, Ritchie Valens refuse presque toujours les déplacements en avion et privilégie le bus, mais doit se faire violence en certaines occasions, comme lors de son passage dans l’émission de Dick Clark enregistrée à Philadelphie. En novembre, il s’envole aussi pour Hawaii, et se produit aux côtés de Paul Anka et Buddy Holly.

Ritchie Valens – Dooby Dooby Wah

A New York, le Dj et organisateur de tournées Alan Freed, l’intègre à sa programmation. Ritchie côtoie alors ses idoles Chuck Berry, Eddie Cochran, Jackie Wilson, Bo Diddley, et les Everly Brothers. En janvier 1959, il entame une longue tournée baptisée The Winter Dance Party. Buddy Holly est en tête d’affiche, en compagnie de Big Bopper, Frankie Sardo, et Dion and The Belmonts.

Ritchie Valens – Hurry Up

J’en arrive donc à cette funeste tournée hivernale dans le Midwest…

The Day The Music Died

Rappelons que nous sommes aux prémices de la grande industrie musicale, et donc à la préhistoire de l’organisation des tournées de grande envergure. Les conditions de vie sont épouvantables. Les concerts s’enchaînent, et les nuits passées à dormir dans un bus privé de chauffage laissent des traces. Carl Bunch, le batteur de Buddy Holly, doit renoncer. Il est admis à l’hopital en raison de graves gelures aux pieds. Dans un premier temps, remplacé par le batteur des Belmonts, Ritchie Valens et Buddy Holly assurent chacun leur tour la partie batterie pour les Belmonts. Avant que Ritchie ne tombe malade.

Mais son deuxième single, Donna, dédié à sa petite amie, vient d’entrer dans le top 20. Dans chaque ville où il passe, Ritchie sent le public réceptif à sa voix et à son feeling. Alors, malgré l’épuisement, il poursuit la quête de son rêve.

Donna

A l’époque, Buddy Holly, grande vedette du festival, n’a que 22 ans. Ce texan au physique de premier de la classe, a sorti deux tubes l’année précédente avec les Crickets. Peggy Sue et That’ll Be The Day.

Buddy Holly est rôdé aux tournées calamiteuses, seulement après un concert à Clear Lake (Iowa), les organisateurs viennent de lui imposer une date supplémentaire. Il craque et fait affréter un monomoteur, un Beechcraft Bonanza, à destination de Moorhead (Minnesota), afin de pouvoir récupérer un peu et dormir quelques heures. Buddy propose à Ritchie Valens et au chanteur et disc jockey Jiles Perry Richardson (alias The Big Bopper) de partager les frais d’avion.

La première tragédie du rock’n’roll

En réalité, l’appareil ne comporte que trois sièges passagers. Buddy Holly a omis de compter ses deux musiciens, Waylon Jennings (pionnier de la Country Outlaw) et Tommy Allsup. Le premier cède sa place à Big Bopper, lui aussi malade et mal en point. Bien que tourmenté par sa phobie de l’avion, Ritchie Valens, éreinté, demande à Allsup de lui céder la sienne. Ce dernier propose de la jouer à pile ou face. Ritchie l’emporte.

Chambreur, Buddy Holly souhaite à ses deux musicens « de bien se geler dans le bus« . Ce à quoi Waylon Jennings rétorque :

 » J’espère que ton vieil avion va s’écraser ». 

Un plaisanterie malheureuse qui va hanter le pauvre Jennings durant des années.

Ritchie Valens
Waylon Jennings et Buddy Holly

Voilà comment se joue le destin de ces trois musiciens. La suite, c’est l’histoire d’une météo clémente qui vire subitement vers minuit, et d’un pilote bien trop jeune et non-habilité aux vols de nuit. Il perd le contrôle de l’appareil et se crashe dans un champ de maïs de l’Iowa.

Ritchie Valens
Ritchie Valens, Big Bopper et Buddy Holly par José Correa

Le 3 février 1959, la radio annonce le décès de Big Bopper, Buddy Holly et Ritchie Valens, plongeant la jeunesse américaine dans la stupeur et les larmes.

Ce jour est baptisé aux Etats-Unis The Day The Music Died, le jour où la musique est morte. L’expression peut paraitre démesurée, néanmoins, on ne trouve pas trace dans l’histoire du rock, ou de la pop, d’une disparition le même jour de deux talents aussi affirmés, et dont la musique a ressurgi au fil des décennies.

Cry Cry Cry

La Bamba est un air traditionnel de mariage mexicain. Quelques mois avant sa disparition, Ritchie Valens avait souhaité en faire une adaptation rock après avoir testé son succès auprès du public lors de ses concerts.

Publié en face B du single Donna à la fin de l’année 1958, le titre connaît un démarrage plutôt lent. Mais lorsque tombe la terrible nouvelle, il se met à caracoler en tête des hit-parades. Un peu comme Otis Redding avec Sittin on the Dock of the Bay, Ritchie Valens n’aura donc pas eu le temps de jouir de son plus grand succès. Celui auquel il est régulièrement associé. Le tout premier tube de rock latino. Un titre ayant éveillé une vocation chez un autre californien d’origine mexicaine. Un certain Carlos Santana.

La Bamba

Huit mois de carrière. Huit mois seulement. C’est peu pour marquer les esprits. Surtout pour un jeune homme de 17 ans. Pourtant, bien plus que sa fraîcheur et son enthousiasme, Ritchie Valens laisse le souvenir d’un artiste doué qui avait su par sa personnalité et son talent de compositeur, se faire une place au milieu des fabuleux Elvis Presley, Ricky Nelson, Jerry Lee Lewis, Gene Vincent, Eddie Cochran, Buddy Holly, Chuck Berry et Little Richard. Si bon nombre d’entre eux ont quitté ce monde très jeune, il restera le benjamin chéri d’une lignée ayant changé le monde.

D’ailleurs, quelque temps après sa mort, Elvis Presley avait tenu à rencontrer Donna Ludwig, son grand amour. Afin qu’elle lui raconte qui était Ritchie Valens, et quelle était la vie de cette étoile filante brillant à jamais dans la constellation du rock.

We Belong Together

Serge Debono

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