Quand on cause musique afro-américaine de la fin des années 70, Funk et Disco viennent immédiatement à l’esprit. Mais Pure Hell va vite réduire à néant ce qui ressemble un tantinet à un cliché. Car ce pur enfer là, est habité par une bande de démons ralliés à la cause du Punk Rock.
La nouvelle scène musicale
1974. Les États-Unis, et surtout la côte Est, voient se développer une nouvelle scène peuplée de gamins bien décidés à relancer le Rock’n Roll sur les chemins chaotiques du danger, du brutal et de l’immédiat. New York s’agite au son des Ramones, Cleveland s’électrise sous haut voltage avec les Dead Boys tandis que Rhode Island se réinvente dans la philosophie sonique et arty des Talking Heads. Et Philadelphie dans tout ça ? Pas d’opportunités dans cette ville, semble-t-il, pour quatre jeunes blacks qui s’ennuient ferme et ne trouvent pas dans la déferlante « groove et paillettes » du moment de quoi canaliser leur frustration.
Ce qui leur parle, à ces quatre là, c’est Detroit et ses deux groupes phares qui ouvrirent le bal des enragés à la fin des sixties, j’ai nommé les Stooges et les MC5 dont ils connaissent les morceaux sur le bout du manche. La rage devient trop forte. L’aventure les tente. Elle s’appellera Pure Hell.
Pure Hell – Noise Addiction
Après avoir bossé un répertoire conséquent, le groupe décide de partir à l’assaut du foyer électrique le plus proche, la Big Apple, alias New York. Ils découvrent le mythique CBGB, berceau du mouvement, traînent avec les New York Dolls pour lesquels ils vouent un véritable culte, croisent Sid Vicious car Kenny, le chanteur, avait connu au collège une certaine Nancy Spungen, copine attitrée du bassiste des Pistols. Cette rencontre leur vaudra d’ailleurs d’ouvrir pour ces mêmes Sex Pistols lors de leur tournée US. Ce qui ne leur apportera guère de visibilité, tant cette virée américaine des anglais s’avéra catastrophique.
Pure Hell – I Feel Bad
Bref, la vie du groupe vire à la galère. Nous sommes en 1978. Quatre ans déjà depuis les première répétitions à Philadelphie et la reconnaissance tarde à pointer le bout de son nez. Entre temps le quatuor a confié son destin à un manager du nom de Curtis Knight. Cette collaboration débouche enfin sur l’enregistrement d’un album dont le titre, « Noise Addiction », reflète bien l’ambiance. Pour un premier jet, l’opus impressionne. Ca joue bien, et même très bien, dans l’esprit d’un Rock‘n Roll hyper sauvage mais qui n’en oublie pas pour autant une certaine technicité.
Detroit touch ?
Complètement ! Côté compos, rien à jeter. Homogène mais pas répétitif. On sent que les gars jouent leur va-tout et sortent les tripes. Hélas les espoirs fondés sur le disque vont fondre comme un vinyl laissé négligemment sur une plage arrière par un jour de canicule. Des embrouilles avec ce cher Curtis seraient à l’origine du fiasco. L’album sortira, oui… Mais 28 ans plus tard, en 2006 ! Triste record… Au bout du compte leur seule production de l’époque consistera en un seul et unique single, une reprise atomisée du « These Boots Are Made For Walkin’ » de Nancy Sinatra. La suite ? Malgré une petite tournée en Angleterre relativement bien accueillie, Pure Hell décide de jeter l’éponge.
The dream is over.
Pure Hell : These Boots Are Made For Walkin’
Le groupe tentera bien par la suite un retour mais la guigne semble toujours coller aux basques de nos héros maudits. Un second album aurait du voir le jour mais, bien qu’adoubé par Lemmy et Trent Reznor qui participèrent à l’affaire, la galette semble toujours coincée au fond de quelques abîmes juridiques…
Trop Garage pour les punks ? Trop Punk pour les garagistes ?
Pure Hell avait peut-être le cul entre deux chaises, mal perçu dans une époque où en matière de musique on ne plaisantait pas avec l’esprit tribal. Curtis Knight les présentait comme Le « premier groupe Punk Noir au monde ». Mais Pure Hell est bien plus que ce slogan un brin réducteur. Et si les Bad Brains et Henry Rollins les citent parmi leurs influences premières, c’est que chez Lucifer il n’y a pas de fumée sans feu…
Line-up :
Kenny « Stinker » Gordon : chant
Michael « Spider » Sanders : batterie
Preston « Chipper » Morris : guitare
Lenny « Steal » Boles : basse
Pour info, il existe un CD compilant l’intégralité de leurs enregistrements de 1978 et qui s’intitule « Noise addiction 1978 New York and London sessions » . Le CD est accompagné d’un DVD live filmé en studio en 1978 pour une télévision new yorkaise. 30 minutes de show incluant 2 titres inédits.
POUP