COLUCHE – Un mec, une histoire

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COLUCHE – Un mec, une histoire

Coluche

« Misère, misèèèèère-reu. C’est toujours sur les pauvres gens que tu t’acharnes obstinément »

Coluche, une institution, un incontournable trublion. Butinons un mec et une histoire, de la gaudriole aux Restos du Cœur.

Les débuts télévisuels du « mec », versant humoriste, se situent chez Guy Lux au printemps 1974. Cet « espace-temps » suspendu, parcourue de ressortissants suisses, où un individu cherche ses lunettes tombées dans ce qu’il croit être la Loire alors qu’il s’agit de la Seine entraîne deux types de réactions. 1- C’est quoi cette histoire à la c… étirable à l’infinie et qui se termine en queue de poisson ? 2- Fallait oser, c’est génial ! V’voyez ce que cela sous-tend ? Mais peut-être que sans vos lunettes … D’autant plus que, si Coluche, le personnage « clownesque », naît publiquement ce jour-là, Michel Colucci, lui, n’a pas attendu la télé pour débuter.

COLUCHE – C’est l’Histoire d’un Mec

1969, visitons le Café de la Gare, du côté de Montparnasse. La troupe sévissant sur sa petite scène se compose de Romain et Sotha Bouteille, de Miou Miou, Patrick Dewaere, Henry Guibet et Coluche. L’ambiance est communautaire, propice au partage et aux mœurs légères. On peut sans paraître ridicule émettre l’idée que la liberté d’esprit pratiquée par ces initiateurs donnera un jour naissance à la Troupe du Splendid.

Lorsque Michel devient Coluche, les frontières s’effacent, il adopte la politique du « no limit ». Tous les thèmes et/ou sujets de société, et/ou du quotidien, sont susceptibles de faire l’objet d’un sketch. Son imagination coule, intarissable, les idées foisonnent. Bien qu’étant « fleurie », sa prose fait honneur au verbe : « Grossier mais pas vulgaire ».

Je me Marre !

Promoteur de l’absurde, il applique son principe au contenu des messages publicitaires…

« Madame, je vois que vous achetez un baril d’Ariel. Si je vous le reprends et que je vous en donne deux où il n’y a rien d’écrit ? Oh ben non alors ! Vous voyez, il faut vraiment être con pour pas prendre deux barils à la place d’un ! … »

« … Parce que moi, blanc, je sais ce que c’est comme couleur, c’est blanc. Moins blanc que blanc, je m’doute, ça doit être gris clair. Mais plus blanc que blanc j’vois pas… Qu’est-ce que c’est comme couleur ? C’est nouveau, ça vient de sortir »

… suivant en cela une logique implacable.

COLUCHE – La Publicité

Coluche endosse les costumes de ses contemporains comme d’autres leurs vestes. Ainsi, dans la peau d’un « blouson noir », expression devenue désuète et désignant de la « mauvaise graine », il nous assène des « vérités » que personne n’aurait osé affirmer. En humour, pas d’interdits :

« Dieu a dit : il y aura des hommes blancs, des hommes noirs. Il y aura des hommes grands, des hommes petits. Il y aura des hommes beaux, des hommes moches et tous seront égaux, mais ça sera pas facile … Et puis il a ajouté : il y en a même qui seront noirs, petits et moches, et pour eux, ce sera très dur »

Le Blouson Noir

Et puis un jour, « beau » ou « moche », selon les points de vue, il décide de se présenter à l’élection présidentielle de 1981. Comme slogans, il a le sens de la formule savoureuse : « Jusqu’à présent, la France est coupée en deux, avec moi elle sera pliée en quatre ». Il affirme qu’il est le « Candidat nul », pour « Emmerder la droite jusqu’à la gauche».

Crime de lèse-majesté ? Après moult péripéties plus ou moins médiatisées, dont des menaces de mort, ça ne l’amuse plus, sa candidature « l’emmerde », il se retire. On ne rigole pas avec les politiques. MM Bérégovoy ou Boulin ? Un commentaire ?

Après tout, il y a davantage à se marrer ailleurs, la chanson par exemple. Le temps de quelques semaines, l’ami Coluche rejoint le Grand Orchestre du Splendid en tant que chanteur. Sur « La Salsa du Démon », moulé dans des collants rouges, une grappe de raisin en guise de cache-sexe, il fait fureur ! Chansonnier, il a également pratiqué le micro en solo avec des titres comme « Misère » ou « J’y ai dit viens ». Si ses textes invitent à la drôlerie, leur interprétation s’ouvre au double-sens, à l’insertion d’une « vérité » entre deux facéties.

COLUCHE – J’y ai Dit Viens

En septembre 1985, l’humoriste enfourche un nouveau cheval de bataille (soufflé par D. Balavoine ?). Alors devenu chroniqueur radio, il imagine les Restos du Cœur. Loin, bien loin des débats politiques stériles, ce sera la réussite que l’on connait. La prochaine et 38ème campagne des Restos s’ouvrira le 21 novembre 2022.

La même année, l’artiste se permet de battre un record du monde de vitesse en moto. Un comique rondouillard débordant de sa combinaison en cuir à l’assaut des initiés les plus affûtés ! Padre ! Tout fout le camp ?!

Et puis il y a le cinéma. Des films « rigolos » comme Banzaï (1983), Deux Heures Moins le Quart Avant Jésus-Christ (1982), des seconds rôles, Le Pistonné (1970) ou Elle Court, Elle Court la Banlieue (1972), des péloches entre deux eaux, Le Maître d’Ecole (1981) et puis « LE » film : Tchao Pantin (1983). Césarisé, Coluche reçoit son prix en déconnant mais, au fond de ses yeux, un sentiment reluit : « Merci ».

Tchao Pantin – Extrait

Qu’aurait-il pensé de notre quotidien, qu’aurait-il exprimé à propos des attentats de Charly Hebdo ? Des Gilets Jaunes ? Du Covid ? Nul ne peut le dire mais il y a fort à parier qu’il l’aurait fait haut et fort. Coluche, grande gueule ? Assurément. Essentiel ? Probablement. Oublié ?

« … jamais, au grand jamais, son trou dans l’eau n’se refermait, cent ans après coquin de sort il manquait encore » (G. Brassens)

Coluche nous quitte en juin 1986, les cheveux au vent sur une 1100. Dans sa maison, Il avait installé une « boite à billets ». Si vous aviez un problème d’argent, vous pouviez vous servir. Les copains d’abord …

Thierry Dauge

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