MADRUGADA, de l’aube à l’aube.
Un groupe culte norvégien, avec un nom espagnol désignant l’aube, citant le meilleur de l’americana et méconnu en France : Madrugada bien sûr !
Madrugada se forme au milieu des années 90, à Stokmarknes, un port de Norvège, avec Frode Jacobsen à la basse, Jon Lauvland Pettersen à la batterie, Robert S. Burås aux guitares, et enfin Sivert Høyem au chant. Ils rejoignent Oslo et adoptent leur nom hispanique après une conversation de bar avec le poète Øystein Wingaard Wolf. L’aube d’un nouveau groupe et d’un nouveau siècle…
INDUSTRIAL SILENCE
Le premier album Industrial Silence sort en 1999. Dès l’ouverture, le fameux Vocal, le ton est donné : une excellente section rythmique, quelques nappes d’orgue, et surtout un duo remarquable, avec un guitariste, Burås, au jeu puissant et fin – souvent sur Fender -, tout en émotion et en sobriété, et un chanteur envoûtant, Høyem, un crooner baryton rock entre Jim Morrison et Nick Cave.
MADRUGADA – Vocal – Industrial Silence (1999)
Musicalement, le disque évoque à la fois le Gun Club, Chris Isaak voire Iggy Pop, un rock à guitares hanté, marqué par l’imaginaire urbain et les espaces solitaires, avec un rare sens de l’électricité et de la mélancolie.
MADRUGADA – Higher – Industrial Silence (1999)
Ce premier opus est une réussite complète. Il se vend comme des petits pains en Norvège où le groupe devient culte en quelques mois tandis que le titre Vocal commence à circuler sur les radios européennes, dont françaises…
Les gars tournent un peu partout sur le continent, et il faut avoir vu le quatuor sur scène pour en saisir toute l’intensité.
MADRUGADA – Strange Colour Blue Live (2005)
GUITARE ET VOIX
Les trois albums suivants confirment le style et la pertinence de Madrugada avec parfois des titres plus sombres et violents (LPs The Nightly Disease / 2001 et Grit / 2002) ou plus épiques (The Deep End / 2005), tandis que leur popularité grandit en Norvège bien sûr, et également en Grèce ou en Belgique…
Chaque volume du quartet contient son lot de pépites. Ainsi sur leur second disque, The Nightly Disease en 2001, cette ouverture tout en magie noire, un clin d’œil à Dr. John…
MADRUGADA – Black Mambo – The Nightly Disease (2001)
…Ou le tumultueux Stories From The Streets, sous influences espagnoles assumées, sur le LP The Deep End en 2005.
MADRUGADA – Stories From The Streets – The Deep End (2005)
Enfin, Majesty, superbe ballade extraite de Grit en 2002, l’un de leurs plus beaux titres, aux paroles énigmatiques avec crescendo vocal et solo de Fender au sommet. Frisson garanti en concert.
MADRUGADA – Majesty Live (2005)
CRÉPUSCULE
Mais en 2007, le 12 Juillet, le guitariste Robert S. Burås décède brutalement pendant les sessions d’un nouveau disque. A 31 ans. Choqué, privé de son feu follet, le gang réduit à un trio, décide de terminer symboliquement l’album, Burås ayant déjà enregistré ses ultimes parties de guitares.
Intitulé avec pudeur Madrugada, cet opus assombri par le deuil conclut l’aventure en 2008, accompagné d’une dernière tournée hommage.
MADRUGADA- Look Away Lucifer – Madrugada (2008)
NOUVELLE AUBE
Une décennie plus tard, Madrugada se retrouve pour les 20 ans du désormais classique Industrial Silence. Le trio originel est notamment rejoint par Cato Thomassen à la guitare, en digne successeur de Robert S. Burås. Les concerts sont exceptionnels, l’accueil du public réconfortant, ce qui relance la créativité du groupe, avec des singles annonciateurs d’un nouvel album en Janvier 2022 : Chimes At Midnight.
MADRUGADA – Nobody Loves You Like I Do (2021)
MAJESTUEUX ET CLASSIEUX
14 ans donc après le traumatique LP Madrugada, retour de nos Norvégiens, aidés de Cato « Salsa » Thomassen et Christer Knutsen aux guitares et claviers, comme en live. L’album Chimes At Midnight, à l’intitulé shakespearien, présente un ensemble de titres majestueux et classieux, avec une section de cordes, dans l’esprit des sombres dandys de Tindersticks ou des Walkabouts. On pense aussi parfois aux regrettés Grant Lee Buffalo.
Le chanteur Sivert Høyem sort le grand jeu émotionnel. On reste suspendu à sa voix magnifique, a-t-il d’ailleurs déjà aussi bien chanté ?
MADRUGADA – Call My Name – Chimes At Midnight (2022)
Les guitares de Thomassen et Knutsen sont également impériales, l’ombre de Robert S. Burås plane plus d’une fois sur ces créations. Quant à la rythmique Jacobsen / Pettersen, elle s’affiche à nouveau exemplaire dans ses nuances.
Les gars ont décidé de ne pas proposer de brûlots incendiaires (Sauf en vidéo…), pas de tempos rapides ni d’explosions de distorsion, mais plutôt des montées et descentes d’intensité, une dramaturgie romantique maîtrisée depuis longtemps par le groupe.
Un bel album pour une nouvelle aube…
MADRUGADA – Chimes At Midnight Full Album (2022)
Nb : Les œuvres solo de Sivert Høyem « The Voice » sont aussi plus que recommandables.
Bruno Polaroïd