Frissons
Dominic Sonic ! Ce gars-là, alias Dominique Garreau, faisait partie de nos héros / hérauts d’un Rock à la Française différent au début des années 90, au même titre que Kat Onoma, Jad Wio, Kid Pharaon ou Passion Fodder, entre autres. A l’aise autant à la guitare électrique – sur sa fameuse demi-caisse Firstman rouge – qu’en acoustique, le dandy breton proposera plusieurs albums dont les deux premiers demeurent incontournables – Cold Tears en 1989 et Dominic Sonic en 1991 -. Gardant toujours la fidélité des fans, Dominic n’arrêtera jamais… Jusqu’à sa mort le le 23 Juillet 2020, à 55 ans, “d’une putain de maladie”.
En Juin 2020, Dominic Sonic sait. Il n’aura plus le temps. Il contacte Romain Baousson pour de nouveau enregistrer. Ce seront ses derniers mots, ses derniers accords… Puis la vie et la mort passent. Les années aussi. Pour illuminer ces paroles et honorer leur pote, Baousson invite les amis du chanteur à jouer avec et pour sa voix. Nous les citerons en fin d’article, toutes et tous. Lorsque les trois Beatles restants ont travaillé sur les démos de Lennon au milieu des années 90, Paul McCartney a déclaré qu’ils avaient eu l’impression que John était vraiment là, à enregistrer avec eux. Peut-être les compagnes et compagnons de musique de Dominic ont-ils ressenti les même frissons ? Cette émotion, nous la percevons à l’écoute de ces onze titres.
Comme avant
En ouverture, Pendant ce temps-là, accroche par son piano, ses chœurs féminins et son côté Stones Seventies. Et bien sûr, la voix de Dominic Sonic. Tout le long du disque, un peu hautaine, nasillarde, narquoise ou sensible, elle nous rejoint, comme avant. Qu’avons-nous fait, qu’avons-nous dit affiche un beau duo avec Miossec sur un lit de guitares et d’orgue.
Dominic Sonic – Qu’avons-nous fait, qu’avons-nous dit – Qu’avons-nous fait (2024)
Puisqu’il n’y a rien à enfer, plus voltaïque, rappelle les belles heures de la seconde version d’ A S’y Méprendre, le single qui avait cartonné en 1990. Les deux thèmes suivants, Ça va être moche et A ma décharge, offrent des récitatifs poétiques proches de Bashung. On ne l’a peut-être pas assez mentionné, mais Dominic peaufinait ses textes en Anglais comme en Français, cherchant une route personnelle entre réalisme et symbolisme sans tomber dans la pédanterie. Musicalement, le premier sonne acoustique et orientaliste, le second irradiant d’électricité, notamment grâce au saxo de Daniel Paboeuf. Saluons ici le remarquable ouvrage de mise en ondes par Romain Baousson.
A ma décharge
Après l’instrumental bien-nommé L’interlude, La çoise offre un retour de la gouaille près du comptoir. Ça discute et ça s’oublie un peu sur fond d’accordéon et de houblon. Par contre, pour Accordez-moi et Celui qui part, on ressort les amplis et les distorsions des guitares incisives. Ces deux chansons semblent nouer un dialogue, l’une dans une prière qui vous perce le cœur l’autre dans une amère certitude…
Accordez-moi
L’album se ferme sur deux sombres merveilles. Dans J’ai mal, les larsens et les fuzz s’unissent au violon pour un autoportrait déchirant de la douleur. Avec Voler enfin, Dominic Sonic appelle à une catharsis finale alors que ses amis dessinent des chœurs et des ultimes notes de cordes majestueuses.
Voler enfin
Ont participé à ce disque :
Alain Richard, Christophe Miossec, Daniel Paboeuf, Etienne Granjean, Franck Hamel, Fred Gransard , Gaël Desbois, Goulven Hamel, Hakim Hamadouche, Jacques Auvergne, Jérôme Coudann, Laetitia Shériff, MirabelleGilis, Olivier Mellano, Patrick Sourimant, Pete Le Roux, Pierre Corneau, Romain Baousson, Thomas Schaettel, Tox Geronimi, Yves-André Lefeuvre.
Photo de la pochette : Jérôme Sevrette
Bruno Polaroïd / Illustration par POUP
Dominic Sonic : Qu’avons-nous fait / IDO Productions (Leur site) – Sortie le 29 Mars 2024