The CARDIGANS – My Favourite Game
Lorsqu’on cite The cardigans, deux chansons viennent tout de suite à l’esprit, « My Favourite Game » extrait de l’album Gran Turismo (1998) et « Lovefool » tiré de First Band On The Moon (1996). Ces deux « scies » pop et mélodiques continuent de parcourir les ondes FM du monde entier alors que le groupe n’a rien produit depuis 2005, c’est dire leur niveau d’impact. Et si les radios les jouent c’est que le public est réceptif, que les programmateurs plébiscitent ou elles seraient depuis longtemps passées aux pléthoriques oubliettes de l’oubli collectif. Après les médailles d’or glanées par ABBA, devant Volvo et Saab, la deuxième plus grande réussite à l’exportation de la Suède ?
The CARDIGANS – My Favourite Game (1998)
Outre des combos de Metal, de Stoner ou de Desert Rock dont les scandinaves se font une spécialité, outre Suede dont le patronyme ne reflète pas la nationalité, The Cardigans, sans passer par la case Grand Prix de l’Eurovision (CF Lordi), sont donc parvenus à fondre les neiges éternelles dans le sillage de leur illustre aîné. Il serait trompeur et paresseux de cantonner le groupe aux deux singles précités. Si la ligne musicale suivie expose finesse et raffinement précieux, la science diabolique de la composition dont font preuve les musiciens suscite l’intérêt, engage l’écoute.
Been It (1996)
Facteur favorable, le chant de Nina Persson. Quoi qu’on en pense, les similitudes avec celui d’une Vanessa Paradis sont réelles, de ces voix susurrées qui supposent des lèvres entrouvertes où des Castafiore exposent leurs amygdales. Peut-être parce qu’il renvoie l’auditeur à l’enfance, période où rien n’a d’importance, y adhère-t-on plus volontiers qu’à la sonnerie de l’usine. Un champ de pop-corn agité par un souffle de vent, des nuages cotonneux tels des barbes à papa fondant sous la langue, un churros, an ice-cream, les métaphores imagées évoquent le sucre glace, une saveur addictive.
The CARDIGANS – Lovefool (1996)
Les chansons de Gran Turismo sont plutôt linéaires, mid-tempo, voir lentes, et très atmosphériques dans l’esprit. On peine à différencier les instruments réels des séquences de programmation, seule la voix de la Belle figurant, « organique », au-dessus des fractales électroniques. Pour qui s’intéresse au « format », le pressage vinyle original se monnaye à des valeurs comptant plusieurs zéros. Si ce n’est sa rareté, l’attraction de la proposition musicale, plutôt diaphane, peine à justifier le prix. En va-t-il de même pour First Band On The Moon ?
Do You Believe (1998)
Dans cet album de 1996, même si la tendance pop l’emporte sur le versant rock, l’attraction est plus prégnante. Pour comprendre l’évolution qui conduit le groupe à adopter davantage de technologie, il faut reprendre sa discographie de façon décroissante, remonter aux origines jusqu’en 1994. Cette année-là, à des kilomètres de Claude François, Soudgarden envoie Superunknown, Nine Inch Nails The downward Spiral ou Green Day Dookie, des « gentillesses ». Pour The Cardigans, le climat est plus « ambient », plus 60’s sur Emmerdale (1994), avec de nombreuses interventions de flûte traversière et de guitare acoustique. Globalement, car il en va de même avec Life (1995), l’album qui suit, la pop est légère, aérienne, un rien figée dans son approche minimaliste.
The CARDIGANS – Carnival (1995)
L’apport de synthétisme accordé à Gran Turismo correspond-il à un désir de contemporanéité ? Constatation, il ne modifie pas pour autant le postulat initial. Ainsi, The Cardigans seront restés droits dans leurs Krisprolls durant les « 11 » années de leur tracé discographique, carrière en forme de comète, de cotonnades destinées à démaquiller le grunge ambiant.
Choke (1996)
Au final, grâce soit rendu aux Cardigans d’avoir promu une proposition musicale vaporeuse et astrale, un baume apaisant sur les blessures du quotidien. Besoin de douceur dans un monde de brute ? Peut-être … à moins qu’une raison plus profonde … des mélodies subliminales et récurrentes soient à l’œuvre. Après tout, puisque le groupe est reparu sur scène en 2016, « 11 » ans après la parution de leur dernier Lp, il est tout à fait possible qu’il revienne en 2027. Le nombre « 11 » leur va si bien …
Thierry Dauge