The Perfect Kiss (Version Longue) – Official Video (1985)
Les Quatre Mousquetaires… Du Cinéma
Il existe des instants captivants où il faut parler d’un moment, d’une vision particulière à remettre dans le contexte où l’on est saisi la première fois et qu’on adore ad vitam æternam.
The Perfect Kiss est sans aucun doute le meilleur single fourni par New Order, quatuor issu du cultissime groupe Joy Division, avec l’appoint de Gillian Gilbert, girlfriend éternelle de Stephen Morris, batteur, découvrant la boîte à rythmes, les synthés et tout ce qui est possible de créer avec. Pendant ce temps Bernard Sumner peaufinait son jeu de guitares et surtout sa voix parce qu’il fallait bien remplacer l’indispensable Ian Curtis, tandis que Peter Hook aiguisait sa basse comme jamais pour qu’elle devienne non pas un instrument qui incite à se trémousser mais qui pousse plutôt à mettre en avant la mélodie.
Le Choix
Mais plutôt que de parler du morceau en lui-même, il faut remonter à ce qui a renversé l’idée même du clip (encore a-t-il malheureusement repris toutes ses débilités faussement cinématographique à coup de flashes exponentielles ou d’onirismes démesurés).
Donc la Factory fait appel à l’idole montante du moment à la réalisation. Nous sommes fin 1984 – début 1985 et Jonathan Demme (1944 – 2017) devient lentement la coqueluche d’Hollywood avec son film Dangereuse sous tous rapports avec Mélanie Griffith et Jeff Daniels (qui ne sortira qu’en 1987 en France). Par la suite, histoire de donner envie de baver, il mettra en scène Le Silence des Agneaux en 1991 et Philadelphia en 1993. Ca vous classe son homme tout de suite.
Dans tout bon film et clip, il faut un responsable de la photographie et de la lumière hors-pair : pas d’hésitation, faisons appel à l’un des maîtres de l’illusion et de sa vision du cinéma. Il est français, a travaillé avec les plus grands, notamment sur La Belle Et La Bête de Jean Cocteau et La Bataille Du Rail de René Clément. Tout cela en… 1946. Henri Alekan (1909 – 2001), avec qui il faut associer Louis Cochet, son éternel et valeureux second, est pourtant en train de commencer le tournage de l’un des films les plus importants de toute l’histoire du cinéma : Les Ailes Du Désir de Wim Wenders. A 75 ans, il n’hésite pas à affronter New Order et en même temps Nick Cave And The Bad Seeds et Crime & The City Solution. Respect total. Dans la foulée il embarque Agnès Godard, alors débutante, cadreuse sur le film.
Les Ailes Du Désir – Wim Wenders (Bande-Annonce)
Le Tournage
Et voilà nos quatre mousquetaires qui débarquent en studio pour enregistrer live la version longue. Celle-ci dure près de dix minutes :The Perfect Kiss. New Order, même après le succès mondial de Blue Monday, demeure un groupe très introspectif et se demande bien à quelle sauce il va être mangé. L’ensemble se déroule pourtant comme un état de grâce, en très peu de prises. On leur demande de jouer réellement, sans playback surtout, sans en rajouter. L’équipe de tournage s’occupe du reste. Le final se fera au montage. Et c’est de la magie pure. Des gros plans fixes de chaque musicien, concentrés, intenses, avec des instants qui virent volontairement ou non à l’hommage.
Le Passage De Témoin
Une première fois on aperçoit, à côté de Peter Hook, un type accoudé à la porte et derrière lui une lumière blanche qui se profile, donnant une apparence fantomatique. La ressemblance avec Ian Curtis est sidérante. Il regarde, opine du chef, semblant accepter cela et s’en réjouit. Peu après, derrière Bernard Sumner, une affiche d’un concert de Joy Division annonçant la tournée de Unknown Pleasures symbolise l’importance de ce clip. Les couleurs sont claires, légères pendant que la musique est profonde, réjouissante mais inquiétante, enjouée mais respectueuse. Le clip parfait et inoubliable des années quatre-vingts.
New Order – The Perfect Kiss (Version Longue) – Clip Officiel
New Order – The Perfect Kiss, version longue
Official Video (avril 1985)
Filmé par Jonathan Demme
Directeur de la photographie : Henri Alekan
Responsable lumières : Louis Cochet
Cadreuse : Agnès Godard
Patrick Bénard