David Bowie et Iggy Pop – Une amitié de longue date
Iggy Pop et David Bowie, une histoire d’amitié
On parle souvent de jalousies, de tensions ou de vieilles rancœurs dans l’histoire du Rock mais un peu plus rarement d’amitié. Et pourtant, s’il en est une qui est remarquable, c’est bien celle entretenue par David Bowie et Iggy Pop. Les deux hommes vont se lier d’amitié dans les années 1972′ – 73′. Iggy Pop, alors pas mal rongé par une consommation excessive d’héroïne, s’est fait virer de son label Elektra. A cette époque, David Bowie alors au faîte de sa gloire, décide de lui filer un sacré coup de main. Il convainc son manager Tony DeFries de le faire signer chez CBS. La suite se concrétise autour de l’enregistrement à Londres de l’album Raw Power sous le nom d’Iggy & The Stooges, un disque bruyant, sauvage et sanguinaire comme l’indique son titre « puissance de brute ».
Dans cet autre article, le récit du premier concert de la tournée The Idiot d’Iggy Pop avec David Bowie au clavier, en 1977 à Montréal !
« Il était davantage un bienfaiteur qu’un ami au sens où on l’entend généralement »
A la séparation des Stooges, Iggy essaie de remonter un groupe sans succès. Mais son addiction aux drogues dures et son état dépressif l’enfoncent chaque jour un peu plus. Iggy est arrêté par la police, interné en hôpital psy. On raconte que son seul visiteur fut… David Bowie.
En 1977, Bowie l’emmène à Berlin où il produit à peu d’intervalle deux albums brillants de l’Iguane The Idiot et Lust for Life. C’est à cette époque qu’ils écrivent ensemble les paroles de China Girl. Cette chanson que Bowie propulsera au rang de tube planétaire.
David Bowie – China Girl (Live)
C’est également la découverte de cette China Girl, chanson inspirée de Kuêlan Nguyen, muse momentanée de nos deux compères, qui n’est autre que la femme de Jacques Higelin.
La China Girl en question n’est pas un personnage fictif. Elle n’est pas non plus chinoise, mais vietnamienne et l’histoire qui la relie à nos deux compères mérite d’être relatée. A cette époque, Jacques Higelin occupe une loge au château d’Hérouville en compagnie de sa femme Kuêlan NGuyen. A l’aube d’une nuit blanche, elle y fait la rencontre d’Iggy Pop, personnage sulfureux mais émouvant. Son fidèle ami David, intrigué par le récit de cette troublante rencontre, désir à son tour faire sa connaissance. Kuêlan NGuyen et David Bowie ont le coup de foudre mutuel. Mais Kuêlan écoutera la voix de la raison laissant à Bowie ce parfum de désir inassouvi. Elle deviendra même le temps de l’enregistrement, l’idylle nocturne des deux amis, partageant leurs soirées à refaire le monde.
Kuêlan NGuyen témoignait dans le JDD peu après le décès de Bowie :
« Son regard est devenu rêveur, d’une lumière inoubliable. Il m’a embrassée puis il a posé sa tête sur mon épaule, avec un petit gémissement bouleversant. Il était beau, très beau, j’ai pris peur de lui, de moi, de ce qui nous arrivait, je me suis lentement dégagée et je me suis enfuie.
Toute la nuit j’ai pensé : que faire, comment pourrais-je les aider? Le moyen le plus civilisé était de devenir une voisine parfaite, et je résolus de passer presque toutes les nuits, dès lors, avec eux deux, Iggy et David ».
The Idiot et China Girl
L’enregistrement de The Idiot a lieu au château d’Hérouville en la présence de deux musiciens français, Laurent Thibaut à la basse (ingénieur du son pour Higelin et alors propriétaire du studio) et Michel Santangelli batteur d’Higelin.
On raconte d’ailleurs que « David Bowie aurait fait jouer Michel Santangelli sur les bandes préparatoires. Il ne lui aurait donné qu’un minimum d’indications. Le travail de Michel aurait été réalisé avec une justesse et une spontanéité exemplaire. A tel point que l’iguane et le caméléon se seraient limités à la première prise pour chaque chanson. Tout le reste se serait articulé autour de ces parties de batterie ».
Iggy Pop a conservé à jamais admiration et reconnaissance pour celui qui l’a sauvé d’une perte certaine. En témoigne les nombreux extraits d’interviews dans lesquels il relate leur relation amicale quasi fraternelle :
« Bowie a tenu à aller rendre visite à mes parents qui vivaient dans une caravane à Détroit. Les voisins de mes parents étaient si effrayés par cette voiture et les gardes du corps qu’ils ont appelé la police. Mon père est un homme merveilleux. Il a dit à Bowie: Merci pour ce que vous avez fait pour mon fils ».
« Bowie me voyait parfois comme un personnage de Dostoïevski actuel ou un Van Gogh moderne. Mais il savait aussi que je ne suis qu’un plouc au fond. Avec lui, j’ai appris des choses dont je me sers encore aujourd’hui. J’ai rencontré les Beatles et les Stones, untel et untel et cette actrice et cet acteur et tous ces gens puissants grâce à lui. J’ai observé. Et une fois de temps en temps, je me comporte de façon un peu moins rustique lorsque j’ai affaire à ce genre de personnes »
Iggy Pop – China girl
« Ce type (David Bowie) m’a sauvé de l’anéantissement professionnel et peut-être même personnel – c’est aussi simple que cela. Il m’a ressuscité. Plein de gens étaient curieux de ma personne. Mais il était le seul qui avait suffisamment de points communs avec moi. Il aimait ce que je faisais et il avait véritablement l’intention de m’aider ».
Iggy Pop – New York Times, 2016
Gail Ann Dorsey, sa bassiste émérite témoignera également de son respect et de son admiration pour le Thin White Duke.
Le jour de son décès, elle déclare:
«David, tu brilleras toujours comme la plus lumineuse des étoiles, quelle que soit la couleur du ciel.»
Auguste Marshal