Le Disquaire – Music 2000

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Le Disquaire – Music 2000

Le Disquaire

Il y a un disquaire dans ma rue. Le saint établissement s’appelle Music 2000. Comme nous sommes au beau milieu des 70’s, lorsque nous franchissons le seuil du divin magasin, palais du vinyle, notre imagination nous projette vers le changement de siècle, les voitures volantes, le Futur ! En lieu et place, la plupart du temps, de la musique « rock » nous saute au visage depuis le fond de « l’antre », là où se situent platine et enceintes. Jouée à un volume conséquent, si les écharpes de notes font trembler les murs de l’échoppe, nos quenottes suivent le mouvement.

DEEP PURPLE – Highway Star (live)

Sans qu’on n’en sache rien, le disquaire a un passé glorieux. En effet, au milieu des 60’s, Pierre Chevalier joue de la guitariste lead au sein des Murators, collectif où une future vedette de la chanson française œuvre au clavier : Alain Le Govic. Lorsque, devenu Chamfort, il entame une carrière en solo, le combo continue.

Le Disquaire

Les MURATORS – Live juin 1964 – Porte Saint-Germain – Argenteuil

Par la suite, Pierre rejoint un groupe, Indiana, qui « accompagne » Coreen Sinclair pour un heavy rock psychédélique anglophone (1971/1972) ; un 45-Tours deux titres en témoignage.

Coreen SINCLAIR & INDIANA – Hey Man

Entre 1972 et 1973, nous perdons la trace de notre homme. Toujours est-il qu’en 1974, on le retrouve à Bezons, disquaire et propriétaire de Music 2000, commerce qu’il a créé (devenu ces jours-ci une boulangerie : Au Fournil). Ecriture bleu outremer sur fond mauve / violet, Pierre vous reçoit à cette enseigne, cheveux noirs, mi-longs et bouclés, gentillesse avenante.

Le Disquaire

Emplacement de Music 2000 en 1974, à côté du marché

Sa compagne, blonde sylphide en gilet afghan et bottes havane sur jean délavé, promène deux lévriers racés devant le magasin. Elle adopte une marche et un port princier, laissant à sa suite une fragrance d’extraits d’ambre et de patchouli où nous nous perdons, yeux étoilés témoignant de l’admiration profonde dont elle fait l’objet de notre part. Derrière la vitrine, des présentoirs de pochettes colorées vibrent au fil des écoutes dont bénéficient les clients.

Johnny WINTER – Highway 61 Revisited (live 76)

Chez Music 2000, ça se passe comme ça. On rentre, on choisit un disque dans les bacs et on demande à l’écouter. Qu’on l’achète ou pas, que vous ayez douze ou trente années au compteur, Pierre vous accueille sans à priori, vous tutoie d’une voix douce et posée.

Souvenir … 1975. Le frère d’un copain lui a prêté Sheer Heart Attack (1974) de Queen et on l’écoute entre potes. Conquis, je me rends « chez Pierre » pour me le procurer. Il ne l’a pas. Je le commande. Il me propose : « Tu as écouté le dernier de Queen ? Il est numéro un en Angleterre. J’en ai un exemplaire, là ». Il s’agit de A Night At The Opera. Je ne connais pas, et pour cause, je viens de découvrir le groupe. « Tu veux l’écouter ? ». On passe « Death On Two Legs » et je craque. Je n’ai pas l’argent, là, avec moi. « Je te le mets de côté et je commande l’autre ? ».

QUEEN – Death On Two Legs

Je vais sur mes treize ans et travaille sur les marchés : déballer, vendre, remballer, minot mais pas loin du mètre soixante-dix, ça aide. Il va me falloir deux samedis matins, de 7h à 13h, pour gagner l’argent. Lorsque je l’ai, je retourne au magasin et, effectivement, le disque est toujours-là, il m’attend … et ma commande également.

Et ainsi de suite jusqu’à … un sale jour. Music 2000 est en feu, le disquaire brûle ! Quelle année ? Sais plus. Traumatisé. J’y ai acheté News Of the World (quand on aime …) en 1977. Après cette date, avec la concurrence d’Euromarché, à Sartrouville, un « super » qui casse les prix … Que s’est-il passé ? On n’en sait rien. Toujours est-il que c’en est fini de notre disquaire, dans ma rue, à moins de cent mètres de chez moi … Le temps passe …

KISS – God Of Thunder

1981. Une nouvelle échoppe vinylique ouvre dans ma rue ! Pas au même endroit, un peu plus bas mais à moins de cent mètres de chez moi ! Le disquaire se prénomme Patrice, pas d’enseigne sur ce magasin-là. Il est sympa et commande tout ce que tu veux. Encore une fois, que tu achètes ou pas, tu peux écouter n’importe quels disques qui trônent dans les bacs. L’engouement revient, juste avant l’avènement du CD, le vinyle « roide » bien droit !

MÖTLEY CRÜE – Live Wire

Par défaut d’une clientèle suffisante, Patrice ferme. Plus tard, le boulot, les sous qui rentrent, Paris à proximité, ils y passent tous : Monster Mélodies et Parallèles (du côté des Halles), Plus de Bruit (du côté de Pigalle), Crocodisc et Gibert Musique (pas loin du Boulevard Saint-Germain), et tant d’autres …

Mais, comme pour toutes premières fois, persiste un pincement au cœur lorsque le souvenir de Music 2000 resurgit du passé. Il était chouette ce disquaire. Pierre ? Qu’es-tu devenu ? Sur Youtube, un type te situe aux States, en 2007, du côté de Las Vegas … Peu importe, pour moi et mes amis mélomanes, tu es toujours à Bezons, assis sur un tabouret de bar, derrière ta platine, au fond de ce magasin tout en longueur.

STATUS QUO – Live 77

Je suis persuadé que, des histoires comme celle-là, toutes celles et tous ceux qui écoutent de la musique « pour » la musique en ont vécues. Le disquaire ? « LE » Disquaire, s’il vous plait. Il serait toujours-là qu’on y serait aussi. Le premier disquaire, c’est pour la vie !

Thierry Dauge

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