ALICE IN CHAINS – Black Gives Way To Blue

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ALICE IN CHAINS – Black Gives Way To Blue

Alice in chains

Du point de vue purement musical, Alice in Chains est bien plus proche d’un hard rock métallisé versus Black Sabbath, que du grunge de Nirvana. Pourtant, le groupe hérite médiatiquement de cette labellisation. Autre « occasion » de passer sur le fil de l’information, la mort de Layne Staley, le premier chanteur du groupe. Lorsque Jerry Cantrell, guitariste mercuriel d’Alice in Chains, pourvoyeur d’accords carbonisés tout autant languissants que destructeurs, décide de relancer la machine, il titre son retour dans l’esprit où AC/DC titra le sien après la mort de Bon Scott. Back in Black pour ces derniers, un horizon moins sombre pour lui : Black Gives Way to Blue.

Black Gives Way To Blue

Remontons le temps …

Chapitre I – Layne Staley

Alice in chains

Le premier album d‘Alice In Chains, Facelift, sort en 1990, un an avant l’explosion « Smell Like Teen Spirit ». Heavy loud, peut-être un rien trop « long », alignant quelques chansons peux convaincantes, il est introduit par un titre prémonitoire, « We die young ». On y discerne déjà les stigmates caractéristiques d’une certaine musique, la « patte » du quatuor, ces saillies distordues tressées de plomb fondu sur lesquelles la voix désincarnée de Staley déverse ses blessures.

ALICE IN CHAINS – We Die Young

L’album qui suit, manifeste obscur à la psychogénie poisseuse et dépressive, ensanglante 1992 : Dirt. Au cœur du vacarme, Alice in Chains déploie ses ailes noires au-dessus de gouffres aux profondeurs insondables. Enlisé bien plus loin dans son enfer personnel, Layne Staley inonde les morceaux de sa voix chargée d’héroïne. Lesté d’électricité, Dirt pilonne l’auditeur, désintègre les sphères incandescentes d’un continuum espace-temps métallique. Corrodé par l’acide qui le dévore, le groupe y perdra son chanteur. Bien que présent sur l’enregistrement suivant, il semble déjà mort.

Angry Chair

L’éponyme Alice In Chains, troisième du nom, sort en 1995. Bizarrement, il sonne d’avantage grunge que les deux précédents. Nonobstant, l’estampille reste de mise avec ces guitares torturées à outrance et cette voix glauque, chair blessée chargée de pus, suintement fétide précarisant l’avenir de qui l’émet. L’issue parait inévitable. Comme pour tous consommateurs, la compulsion gagne sur l’existence. La recherche des produits devient vitale. Dans ces conditions, la musique s’éloigne et ce chien à trois pattes impudiquement livré en pâture au public sur le visuel du disque présume du futur. Avril 2002 signe l’inéluctable attendu.

ALICE IN CHAINS – Grind

Chapitre II – William DuVall

Alice in chains

En 2009, quatorze longues années après le dernier album du groupe, Black Gives Way to Blue nous est livré sur une lame de fond … et sa pochette n’envisage rien de bon. Dès la première écoute, le quasi mimétisme est saisissant. Contrairement aux groupes qui, dans un contexte similaire, mise sur l’opposé, Jerry Cantrell opte pour l’appellation AIC contrôlée.

Même si la voix de William DuVall, le nouveau venu, est différente, l’emballage est identique. Alice In Chains est de retour. Assombrissant l’encre noire des textes, le mille-feuilles de distorsion persiste, empilage de pistes sursaturées. Alourdissant à l’extrême le son du guitariste, l’association basse / batterie pulvérise tout espoir d’exister hors des graves. Ces langues de goudron chaud lestent les tympans puis les carbonisent, monstrueuses coulées d’acier liquéfié.

Check My Brain

Moins funeste et incantatoire que Staley, DuVall use néanmoins de réverbération, ses vocalises invoquant à l’identique de glaçantes litanies. Les fragrances souffreteuses perdurent, l’agonie en moins. The Devil Put Dinosaurs Here (2013) en témoigne, le trou noir se veut lumineux bien que pris dans les brumes. Apport non négligeable, le chanteur joue également de la guitare, ce qui permet d’épaissir les réinterprétations live. Sous l’ère Staley, lorsque Cantrell prenait un solo, un vide stellaire réduisait l’impact des chansons sur l’auditoire (CF chronique d’un concert en fin de publie).

ALICE IN CHAINS – Stone

Avare de son talent, il faut patienter encore cinq ans avant d’ouïr Rainier Fog (2018), le dernier né d’Alice In Chains. Les néo doomers sont-ils passés à la pop, à la new wave, voir au punk ? La bonne blague ! La production s’allège tout juste de quelques hectopascals, naviguant un rien sur la rive des médiums tout en conservant cette sensation de presse hydraulique. Le parallèle avec les premiers enregistrements s’accentue, William DuVall serrant d’un peu plus près les intonations de feu Layne Staley.

The One You Know

Alice in Chains, contrairement à Nirvana et Soundgarden, aura survécu à la perte de sa voix. Certainement parce que Kurt Cobain et Chris Cornell étaient plus que cela, âmes ravagées véhiculant maints tourments sur les eaux tumultueuses de leurs formations respectives. Suicides contre cocktail héroïne/cocaïne, les vaisseaux spatiaux croisent aux confins des galaxies ionisantes. En Mélomanie, restent des sillons pour voyager vers l’infinie …

Thierry Dauge

Concert du 19 février 1993 à l’Elysée Montmartre

Alice in chains

Je me rends à l’Elysées Montmartre le 19 février 1993 pour assister à un des concerts parisiens du groupe. La période et l’endroit sont propices aux performances. Pantera le 21 janvier 1993, avec un Phil Anselmo passablement « défoncé », et Rage Against The Machine le 8 février 1993 se sont révélés être des tsunamis !

Alice in Chains en concert … je suis déçu. Au point de vue du son, passer de dix pistes de guitare empilées les unes sur les autres à un unique instrument sonne un peu « léger ». Le jeu de scène du bassiste consiste à relever la tête pour cracher en l’air. Derrière la batterie, un batteur bat et, au niveau du chant, un chanteur chante. Où est passé l’épaisseur du désespoir affirmé en studio ? Dans la salle …

ALICE IN CHAINS – Sickman (live)

Qu’écrire de plus ? J’ai vu Alice in Chains avec Layne Staley. Rideau.

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