Fred Pallem et le Sacre du Tympan – L’Odyssée – Musique imaginée pour film imaginaire

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Fred Pallem et le Sacre du Tympan
L’Odyssée
Musique imaginée pour film imaginaire

Fred Pallem

L’ouvreuse vient juste de faire sa distribution, le panier en osier autour du cou. Bonbecs, pains au chocolat. Le pop-corn ne sévit pas encore. La lumière commence à baisser. L’écran s’agite. Générique.

Te souviens-tu ?

Le héros, debout sur le toit du bus lancé à pleine vitesse, poursuivi par le flic obstiné. Belmondo. Bébel les biscotos. Descente en rappel de l’hélico au-dessus des immeubles. Le méchant tueur psycho s’en prendra plein la tronche. Bien fait.

Te souviens-tu ?

La poursuite en bagnole élevée au rang d’art majeur. Steve McQueen. Les rues de San Francisco au petit matin. Moteurs au point de rupture. Boîte de vitesse en souffrance. Carrosseries joyeusement broyées. Qu’on se demande, Steve, comment il peut encore rouler ton tas de ferraille. On s’en fout. Tu les a bien eus.

Te souviens-tu ?

Mexique. Panoramique sur le désert. Puis les yeux noirs du desperado, impitoyables, immenses, qui dévorent la toile en cinémascope. Lee Van Cleef. Gueule taillée à coup de tomahawk. La main fébrile au-dessus de la crosse. Ca va chier. Aussi sûr que le cri du coyote me glacera les sangs à la nuit tombée.

Toutes ces images. Oui, te souviens-tu ? Et la musique ?
Parce qu’il y avait aussi la musique…

Belmondo
Dessin : Poup

Michel Magne

François de Roubaix, Lalo Schifrin, Ennio Morricone… Belle brochette non ? Âge d’or de la B.O du cinématographe estampillé sixties et seventies. Les metteurs en scène ne s’y trompent pas. Les studios d’enregistrement de l’époque ne désemplissent pas de compositeurs et d’arrangeurs de génie.

Un demi-siècle plus tard ces musiciens d’exception sont toujours là, dans nos mémoires et nos oreilles. Et surtout dans celles d’un autre surdoué, Fred Pallem

François de Roubaix
François de Roubaix

C’est au coeur de cette époque bénie…

… de la zizique du septième art, en 1973, que le petit Fred se décide à passer une première tête dans le vaste monde. La tête, le reste et surtout les feuilles car ce qui semble titiller ce jeune humanoïde tout neuf ce sont les sons, si possible plus ou moins organisés. Plus que moins, d’ailleurs, car arrivé à ses 14 tours du soleil le chenapan vibre déjà aux planeries de Pink Floyd tandis que la science mélodique des Beatles interroge les neurones idoines qui , à leur tour, déclenchent dans son encéphale juvénile et survolté des réactions du type : « Wow !!! » « Yeah !!! » ou bien encore « Bigre !!! » pour la touche franchouillarde.

Fred Pallem

Après une longue période…

… d’autodidactisme forcené il entre, en 1996, au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris au département Jazz et musique improvisée, s’il vous plaît. Découverte de l’arrangement, de la contrebasse puis de la basse. Fred, atteint de boulimie sonique, expérimentalise, concocte, tambouille, bidouille, explore dans des formats divers et variés : orchestre à cordes, big band, quintette de saxos. Et ne présentant visiblement pas d’accointances pour la traînaillerie, il compose, cette même année, pour la compagnie de théâtre et de music-hall, la Troupe du Phénix, des petites bricoles comme « La Nuit des Rois » de Shakespeare. Rien de moins.

Fred Pallem

1998

Fred is ready.
Il monte son propre orchestre à géométrie variable avec des potes du Conservatoire.
Le Sacre du Tympan.
C’est ce cher Igor qui se serait bien marré.
Il adorait les blagues.
Quoique…

Fred Pallem réalise alors la fusion dont il rêve depuis longtemps. Musique et cinoche…

Le Sacre du Tympan
Le Sacre du Tympan

Car elle le tient aussi depuis longtemps cette passion là…

… Le cinéma de genre, de l’après-guerre aux années 70, fait carburer l’imaginaire du musicien depuis l’adolescence. Thrillers italiens, polars « french touch », séries z d’horreur, nanars sci fi, tout est bon. Nourri de ces kilomètres de pellicule, Pallem se fait son cinéma, tel un Nougaro sur l’écran noir de ses nuits blanches.. Alors mettre une bande son sur ce film imaginaire… La tentation est grande et, comme le disait fort à propos ce cher Oscar Wilde, la meilleure façon de résister à une tentation c’est d’y céder…

L’Odyssée

L'Odyssée

Fred Pallem, avec cet album…

… n’en est pas à son premier coup d’essai dans l’exercice de la musique fantasmée et référencée. « Soulcinéma », dédiée à la blackploitation, et « François de Roubaix », brillante revisite de son idole ultime, avaient déjà imposé le chef d’orchestre. En 2018, avec L’Odyssée, il atteint un véritable pic dans sa production.
L’Odyssée. Pas de doute, le bon titre. Fred Pallem nous embarque dans un film qui ne fut jamais tourné et ne le sera certainement jamais, superproduction irréelle et inatteignable que la réalité ne pourra jamais nous offrir.

Ca commence grand angle…

… « Astringent Mouse Trap ». La basse claque comme dans les vieux Gainsbourg. Une gratte western s’invite dans une ambiance urbaine posée par les cuivres et, nouveauté dans le gang Pallem, par un quatuor à cordes . Des bruitages cosmiques évoquent une cité SF à la Blade Runner.

Fred Pallem et le Sacre du Tympan – Astringent Mouse Trap

Panoramique…

… Entrons dans « Le Village du Sorcier ». Là on remémore sévère. Des bribes de vieilles séries télé affleurent. Lalo Schifrin surfe sur les volutes entrecroisées de l’orchestration. Mission impossible ? Pas pour Fred Pallem…

Fred Pallem et le Sacre du Tympan – Le Village du Sorcier

Caméra subjective…

… dans un dédale de rues. « L’Intrus part. 1 ».  Ambiance flippante. Peur sur la ville. Pallem nous plonge en plein trip polar à la française seventies. Cuivres et cordes distillent un cocktail malsain à souhait.

Plan large…

… sur les côtes américaines pour « L’Intrus part. 2 ». Les cordes se font dissonantes tandis qu’un saxo et une flûte dansent un vaudou free et déjanté. Nouveau plan large sur les rivages yankees qui s’éloignent. Retour nocturne sur les quais d’un port du nord de l’hexagone pour un final frenchy.

Sacre du Tympan

Fondu à l’ouverture…

… Brume. Péniches sagement rangées le long du canal comme de gros animaux endormis. Une atmosphère à la Simenon plante le décor de « Death and Life of a Suburban Guy ». La basse Gainsbourgienne sixties revient pointer le bout de ses frets. On aperçoit au loin Melody Nelson balançant ses hanches et ses cheveux rouges. Les cuivres rutilent, luttant de charme avec les cordes. Des gangsters, doulos savamment incliné, costard impeccable, fêtent leur dernier coup dans une grande brasserie du Paris de Nestor Burma. Dehors, sur le trottoir encore humide de la dernière pluie du soir, un solo de violon se fait entendre, qui ferait saliver Jean-Luc Ponty. Puis on retrouve la Picardie brouillardeuse pour une conclusion mélancolique.

Fred Pallem et le Sacre du Tympan

Multiscreen…

… Écran affolé. « Hemophilus Aphrophilus » bombarde nos rétines de couleurs psychés sur un orgue qui doit faire se trémousser les popotins sur Bételgeuse.

Fred Pallem et le Sacre du Tympan
Le Sacre du Tympan

Zoom arrière…

… lent. « L’Odyssée » se laisse découvrir aux accents d’un clavecin dans une veine flirtant avec la musique classique. C’est léger, sautillant, comme un menuet un brin désuet dans un film de Philippe de Broca.

Fred Pallem et le Sacre du Tympan – L’Odyssée

Montage speed…

… Stroboscopique. « L’Enfant dans la Jungle Urbaine » nous chope à la gorge pour une virée funky dans les bas-fonds de New York, les cops au cul toutes sirènes hurlantes. La basse tabasse un groove redoutable et ça déboule comme ça à perdre haleine jusqu’à un final cuivré grandiose.

Fred Pallem et le Sacre du Tympan – L’enfant dans la Jungle Urbaine

Les mots « The End » s’inscrivent sur la toile…

… Générique de fin. Les lumières de la salle se rallument. Le projectionniste va rembobiner la belle odyssée de Mister Fred Pallem. Alors, passéiste ? Non, un nostalgique moderne bien ancré dans le son d’aujourd’hui. Alors, imitateur ? Non, un vrai créateur dont la docte patte évite les pièges du pastiche.

Fred Pallem et le Sacre du Tympan – Petit best of live

Retour sur image…

… Parler de cet album sans évoquer la pochette serait impardonnable. Car on a affaire ici au talentueux Elzo Durt. Artiste belge, il crée depuis bientôt 20 ans d’innombrables visuels qui font la part belle à l’univers musical avec affiches, pochettes de disques, flyers et j’en passe. Détournant des gravures du 18ème et 19ème siècle, Durt crée un monde Steampunk-Psychédélique aux couleurs Pop Art, fascinant et unique.

Pour en voir plus : Elzo Durt

Fred Pallem et le Sacre du Tympan – L’Odyssée

Musique composée et dirigée par Fred Pallem

Face A
Astringent Mouse Trap – Le Village du Sorcier – L’Intrus part.1 – L’Intrus part.2

Face B
Death and Life of a Suburban Guy – Hemophilus Aphrophilus – L’Odyssée – L’enfant dans la Jungle Urbaine

Label : Train Fantôme

2018

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POUP
Laurent Poupinais, alias Poup. Diverses aventures dans le monde du fanzine (Nestor Mag, La Chronique Du Vermifuge), dans le Rock Punk/Garage (Les Ambulances, Mystery Machine, Traffic Drone) en tant que batteur. Dessinateur addict au noir et blanc qui réalise des illustrations pour des fanzines (Rock Hardi , Cafzic) mais aussi des visuels pour des groupes (pochette de disque, T-shirt, affiche, flyers et toutes ces sortes de choses).

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