Les Visiteurs du Son
1967 – 1987
Cela paraît invraisemblable qu’il n’existait aucun livre en français retraçant la carrière d’un groupe comme Tangerine Dream. Heureusement, et mieux vaut tard que jamais, Emmanuel Saint-Bonnet vient remédier à cet oubli consternant.
Consternant est l’adjectif idéal pour remettre à leur juste place ce qui s’est appelé au début des seventies la Kosmische Musik. Même si, d’après l’auteur, les prémices viennent d’Espagne, force est de constater, que ce style provient avant tout de l’Allemagne de l’Ouest (forcément, vu le contexte politique à cette époque).
Tangerine Dream – Atem
Tout débute et se termine par un seul homme : Edgar Froese (1944 – 2015). Il s’intéresse avant tout à la musique improvisée à travers ses maîtres comme Karlheinz Stockhausen. Et quand arrive les premiers synthétiseurs (pour faire simple, le début des Moog), le coup de foudre est saisissant.
Le rock, si on peut l’appeler encore ainsi, devient progressif, c’est à dire qu’il se rapproche de tout ce dont il voulait s’éloigner sans pourtant le dédaigner, la musique classique. Ce sont les débuts de Yes ou Genesis par exemple mais les sons habituels demeurent majoritaires : guitare, basse, batterie, chant. Quelques claviers ont leur place mais lointaine.
Tangerine Dream – Ricochet (Live at Coventry Cathedral, 1975)
C’est là que surgit le trio à géométrie variable dont l’épicentre sera Edgar Froese. Les premiers sons laissent la place à l’improvisation, chacun possédant une armoire de boutons remplis de claviers. Seule la batterie a le droit d’être présente et le sera, pas systématiquement. Progressivement ce style brut deviendra planant et sera repris dans moults musiques de films ou de pub. Mieux, dès les années quatre-vingt, une partie de la new wave s’en empare, avant que l’ambient et l’électro n’en fasse une figure majeure de la musique actuelle jusqu’à devenir inepte, mais c’est une autre histoire.
Tangerine Dream – Rubycon part one (1975)
Voici donc le trajet sur vingt ans de la carrière débutante et tumultueuse en 1967 jusqu’à son avènement en 1987, là où les choses se compliquent. Venez planer et déguster ses moments inoubliables de sons venus d’ailleurs et pourtant bien d’ici dont la Science Fiction s’est emparée. Et n’oublions pas un certain Klaus Schulze (1947 – 2022), qui fit parti du groupe à ses débuts et dont il faudra bien parler un jour quand il prit la tangente.
Tangerine Dream de Emmanuel Saint-Bonnet
Le Mot Et Le Reste – 146 pages – 17€
Patrick Bénard