En route vers la gloire… Trust interview de 1978
TRUST interview : un an après la première rencontre!
Que s’était-il passé en un an ?
De tous les groupes qui avaient vu le jour fin 77, Trust était sans aucun doute le plus intéressant à l’époque. Malheureusement, ils n’avaient sorti qu’un 45 tours que Pathé s’était empressé de ne pas promouvoir, laissant pourrir dans ses tiroirs un talent certain. De ce fait, la presse n’avait pas suivi et ils n’obtinrent pas en 1978 le support qu’ils auraient mérité. Par rapport aux textes gentillets de Téléphone ou à ceux débiles de… (remplissez vous-mêmes cet espace), ceux de Trust ne pouvaient que vous toucher direct au cœur. Leur carte de visite se présentait sous une très belle pochette des Studios de l’Air, un original d’un côté, et de l’autre une adaptation en français d’un morceau d’AC/DC : «Prends pas ton flingue» et «Paris by night». Des textes ravageurs qui leur avaient valu l’animosité de certains.
Que vous est-il arrivé de positif depuis notre dernière rencontre, il y a environ un an ?
Tout d’abord nous sommes arrivés à récupérer notre contrat. Il fallait vraiment le casser car nous avions signé pour trois ans et, en fait, il n’y avait eu aucune promotion. Le premier pressage, de deux ou trois mille exemplaires seulement, n’avait même pas été renouvelé. Il n’y a qu’au moment où nous étions vraiment décidés à quitter Pathé qu’on nous a vaguement proposé de faire éventuellement une maquette de 33 tours…
Et aujourd’hui ?
Et bien nous répétons actuellement, nous mettons au point un nombre de titres suffisant pour proposer un album sérieux qui doit être enregistré chez CBS au mois de février.
Hervé Muller est-il votre nouveau manager ?
Pas exactement. C’est lui qui doit produire notre album au niveau artistique, au niveau réalisation, etc…
Comment s’est effectuée cette rencontre ?
Un soir au Swing Hall., Nous y jouions et Hervé est venu en compagnie de Malcolm McLaren et Steve Jones. Nous avons sympathisé. Le tout aujourd’hui forme une très bonne équipe. Hervé ayant certaines connaissances, il nous a plus ou moins pris en main à une époque où nous n’avions ni manager, ni maison de disques. Hervé fit venir des gens de chez CBS pour nous écouter et je pense que nous les avons assez intéressés. Donc si tout va bien l’album doit sortir pour l’été prochain.
Vous avez assuré la première partie de AC/DC à Paris. Quelle fut la réaction du public ?
Fantastique ! Pourtant au départ nous étions tout de même un peu effrayés car il est généralement difficile de faire une première partie à Paris. Mais tout s’est très bien passé grâce, entre autres, aux musiciens d’AC/DC, des gens formidables humainement parlant alors que souvent les groupes étrangers ont tendance à saboter leurs premières parties ! Et pourtant cela faisait deux mois que l’on n’avait pas joué ensemble sur une scène, nous avions juste répété une semaine avant le concert.
Quelles sont vos influences ?
Elles sont les mêmes qu’il y a un an. C’est-à-dire les Pistols, AC/DC, Lavilliers…
Certains disent que votre chanteur a carrément pompé le costume et le jeu de scène du chanteur des Boomtown Rats…
La comparaison s’arrête au tee-shirt rayé !
Avez-vous des contacts intéressants avec d’autres musiciens français ?
Les Calcinator, le groupe Paris, Jean-Louis de Téléphone, Eric, guitariste de Shakin’ Street.
L’année dernière vous aviez été carrément interdits à Blue-Jean, je crois ?
Oui, mais cela s’était arrangé rapidement, ce qui fait que nous avons pu passer un mois plus tard.
Y a-t-il eu un petit coup de pouce de la part de Lavilliers, en ce qui concerne cette histoire?
C’est possible qu’il ait parlé de nous, effectivement.
Une partie du public vous reproche d’utiliser un rythme de hard-rock, musique foncièrement «récupérée», sur des textes aussi engagés que les vôtres.
Le public a tout de même évolué en un an et demi. Au début effectivement, on choquait un peu car les gens schématisaient. Ils voyaient un chanteur punk et un guitariste «à la Jimmy Page». Cela avait de quoi dérouter certains. Mais ce genre de problème s’estompe à la longue. De plus, nous trouvons que c’est réellement la musique qui colle le mieux aux textes que nous écrivons. En France il y a un malentendu en ce qui concerne le mouvement punk.
Lorsqu’on arrive en Grande-Bretagne par exemple, on considère le hard-rock comme un mode d’expression totalement récupéré, accepté comme un simple produit de consommation. En ce qui concerne la France par contre, il n’est même pas encore admis réellement. Donc pourquoi Trust se forcerait-il à avoir une image punk puisque le hard-rock n’est pas moins «marginal»? De plus, c’est tout de même la musique qui nous défoule, qui nous pousse à nous surpasser. Alors pourquoi se priver de cet excitant naturel…
TRUST interview
A part Métal Urbain et vous-mêmes, l’ensemble des textes français sont quand même «mignons», c’est le moins qu’on puisse dire.
Il y aussi tout récemment un nouveau groupe, Extraballe, qui a écrit «1000 kilomètres en Union Soviétique». Il y a tellement de choses à dire, il se passe tant en France et ailleurs, qu’il serait débile de continuer à ne chanter que des chansons d’amour. C’est pas parce qu’on chante en français qu’il faut raconter des conneries.
N’avez-vous pas peur qu’on vous reproche un jour de vous attirer les bonnes grâces de Rock and Folk en ayant choisi de travailler avec Hervé?
On n’est pas putes à ce point-là. Si l’on obtient un jour un article dans Rock and Folk, tant mieux. Mais on n’ira pas pleurer pour l’obtenir. Hervé d’ailleurs refusera d’en écrire un lui-même.
Trust, en fait, s’agit-il d’un chanteur bien accompagné ou plutôt d’une équipe soudée où chacun a la même importance?
(Réponse du chanteur): c’est une équipe solide et soudée. Sans les autres je ne serais qu’un pauvre con!
Les groupes français se divisent généralement en deux camps : ceux qui refusent de jouer s’ils n’ont pas un minimum assuré, et ceux qui par contre se forgent des admirateurs à longueur d’années, jouant parfois devant seulement cinquante pèlerins. De quel côté vous situez-vous ?
Il faut partir du principe que devant dix personnes ou devant dix mille, dans un cas ou dans l’autre, le spectacle doit être toujours aussi bon. A chaque concert, le moindre sou gagné doit servir à améliorer le matériel : éclairages, sono, etc… Néanmoins ce genre de galère peut parfois durer très longtemps, plusieurs mois… Nous en sommes tous très conscients et sommes prêts à jouer le jeu tant qu’il le faudra !
Quel est le but de Trust ?
TUER.
Qui ?
Tuer, jouer pour tuer, s’imposer, que toute personne qui vienne nous voir soit satisfaite en sortant du concert.
Retrouvez la première interview de Trust : Première Interview de Trust 1977