Philippe Manoeuvre – Rock – Autobiographie
Le maître se livre – Entre anecdotes et autodérision
Philippe Manoeuvre : sur le bandeau rouge on peut lire « Ma Vie est un Roman ». Il n’a pas tort, le brave, l’authentique, Philippe Manœuvre quand il s’attaque à son autobiographie.
The Stooges
En quatrième de couverture, il se découvre vieillissant :
«C’est donc le temps du grand bilan, mon devoir d’inventaire à moi. Mémoires binaires, rock and roll».
Et pour bien faire sentir cette sensibilité, il offre un «roman autobiographique». Depuis ses débuts de jeunot dans Rock & Folk, il sait se mettre en scène. Ce sera sa marque de fabrique: être là au bon moment, par un coup du sort. Ici, cela devient un peu trop systématique mais tellement lui: alors qu’il ne demandait rien, un coup de fil inopiné lui propose un tas de choses hallucinantes. C’est fou ce que le téléphone pouvait réserver à l’époque où le portable restait encore à inventer.
Philippe Manoeuvre : Ma vie est un roman
Mais c’est tout lui, ça, faire de sa vie un roman. Bien persuadé qu’elle est plus réelle qu’inventée, sa vie se confond avec ses articles car il s’est toujours arrangé pour se donner le beau rôle tout en admettant qu’il s’est retrouvé parfois dans la merde. Mais ça, ça fait partie du personnage engoncé dans un système qu’il maîtrisera parfaitement avec le temps.
On va juste lui reprocher que «Rock» soit un peu trop court. On imagine à juste titre le nombre d’anecdotes qu’il doit avoir à raconter avec sa façon toute personnelle de les écrire. Voici sa marque. Elle restera à jamais dans l’écriture et surtout l’esprit rock, que ce soit au sein de Rock & Folk et aussi de Métal Hurlant, revue de BD révolutionnaire pour l’époque de cette fin des seventies, début des eighties. Il a réellement marqué cette période, en tant que rédac chef, avec la découverte des romans gonzos de Hunter S. Thompson, de Bukowski, de Harlan S. Ellison, de Hubert Selby.
On lui pardonnera ses égarements du côté de chez La Nouvelle Star, il faut bien vivre ma p’tite dame.
BB Brunes
Il co-fonde Radio Perfecto en juin 2018 sur le net et s’en désengage quelques mois plus tard sans expliquer pourquoi. Philippe Manoeuvre est ainsi et le restera: un découvreur, talentueux et autoproclamé, passeur de musique au sein d’un perfecto un peu usé, de lunettes noires revisitées et de boots un peu arrondies au bout désormais. Qu’il continue autant qu’il le voudra. Il ose même, à la fin de l’ouvrage, de faire un listing de toutes les personnes rencontrées et interviewées. Si c’est pas de l’égocentrisme, çà… sauf qu’on s’en fiche.
Harper Collins – 286 pages – 19 €
Patrick Bénard