Open vinyles – 1984, la horde scandinave
Open vinyles 1984, ces musiciens qui venaient du froid : voyage en Scandinavie.
Vivre sous un climat rigoureux freine-t-il les velléités guerrières ? En référence à l’Histoire, que nenni ! Les Vikings et leurs raids dans toute l’Europe à bord de leurs fameux drakkars en sont la preuve formelle. La glace, non seulement ça conserve, mais ça excite également ! Aspect purement guerrier passé, voici venir des hordes métalliques aux guitares et partitions tels des muscles bandés. Attention ! L’évocation du jour ne touche qu’au heavy metal. Point de Death ou de Grindcore chez nos quatre postulants. Les cataclysmes musicaux précités, certes appréciés et abondamment pratiqués dans ces contrées : tressautements de batterie recouverts d’échardes de guitares sursaturées et de hurlements suraigus, le tout extirpé de gouffres sans fonds, seront éventuellement traités comme la vérité, « ailleurs ».
En matière d’engelures, nous proposons un match Suède vs Danemark. Le score ? Deux partout ! Pardon ? Vous auriez apprécié qu’il soit discouru de profils plus velus ?
NOCTURNUS AD – Apotheosis
220 VOLTS – Power Games
Commençons par les électriciens suédois de 220 Volt. Le Metal proposé dans Power Games est truffé de mélodies irrésistibles. À cet égard, on n’évolue pas dans une carrière de granit, plutôt dans un champ de roses, certes en acier chromé. Les guitaristes se tirent la bourre puis harmonisent autour d’une voix très claire noyée de réverbération. Ces cordes se tressent parfaitement aux douze autres, habillement épicées par les deux « tricoteurs ».
Soixante-quinze pour cent des titres proposés feraient chacun un sérieux candidat au top 50 d’une radio rock. Tout à fait recommandable, ce disque n’attend que la tête de lecture susceptible de se glisser dans sa prise. Pour l’auditeur, se soumettre à l’électrocution apparaît inéluctable.
220 VOLT – Firefall
PRETTY MAIDS – Red, Hot and Heavy
Que Pretty Maids enclenche Red, Hot and Heavy par « O Fortuna », extrait de Carmina Burana de Carl Orff, annonce la couleur ; le Red du titre étant vermillon, comme il se doit, celui du sang. Les deux guitaristes barattant des rythmiques XXL, l’intention prête à pétarader dans les chaumières. Ces Danois, s’ils conservent une approche musicale mélodieuse, rivalisent de brutalité avec leurs homologues suédois. Le metal se voulant classifiable en tous genres, celui des Maids se décline « speed », sous amphétamines.
Avec Pretty Maids, avant que le syndrome Venom ne vienne contaminer les jeunes scandinaves sous la forme d’une prolifération de corpse paint astreint au Black Metal, le nord de l’Europe se révélait ainsi tout aussi remuant que la vieille Angleterre et ses cadors. Pour le plus grand bonheur des aficionados de cuir et de clous.
PRETTY MAIDS – Night Danger
OVERDRIVE – Sword And Axes
Deuxième suédois du quartette : Overdrive avec Sword and Axes. Dans la gamme des traitements de surface, ce groupe opte pour le cémenté / trempé. Les guitares découpent des tranches d’inox rougies par l’usinage. Si les mélodies persistent, elles sont moins provocantes. Dans une configuration où deux bretteurs se répondent, l’harmonisation n’est plus de mise, ceux-ci lui préférant la baston. Les gnons pleuvent aux quatre coins des chansons. Dites « à tiroirs », celles-ci changent raisonnablement de trajectoires tout en gardant la même direction. S’il fallait citer une influence, Judas Priest correspondrait. Rien d’innovant dans cet ouvrage, mais une lessiveuse y tournoie rageusement au bénéfice du genre.
OVERDRIVE – Dream Away
MERCYFUL FATE – Melissa
Finissons au Royaume de Danemark, sans Hamlet mais avec Melissa. En 1984, Mercyful Fate se mesure à Metallica. Mieux, le groupe peut castagner n’importe quelle formation de la NWOBHM (New wave of british heavy metal) sans plier d’un iota. Metal, pseudo progressif, à partir d’un seul des titres de cet Lp d’autres auraient enregistrés un album entier ! Les guitares ignorent les sourires. Leur seule expression consiste à froncer les sourcils et montrer les dents. Conséquemment, le chanteur s’apparie.
King Diamond parcourt les octaves à la scie sauteuse, passant du grave à l’aigu quasiment sur la même note. Surhumain ! Diabolique ! Son maquillage et ses paroles vont dans ce sens. Melissa représente une sorte de pierre philosophale dont bon nombre se sont servis pour construire leur propre répertoire. Ce redoutable prédateur tournait si bien sur les platines qu’il y rode encore.
MERCYFUL FATE – Satan’s Fall
1984, ça n’est pas qu’un livre, c’est aussi une réalité musicale éprise de « bruit ». Ou lorsqu’on pratique le sifflement tympanique avec bonheur.
Thierry Dauge