THIN LIZZY – Philip Parris Lynott
Once upon a time a Rock Legend …
Avant d’aborder Thin Lizzy par son aura d’immortalité, légende entretenue lors de concerts qualifiés de « tribute » par certains des musiciens qui ont fait partie du groupe, revenons sur cette légende au temps où Philip Parris Lynott en tenait les rênes … les cordes vocales et la basse.
Les années dorées : 1976-1983
Phil Lynott passe de vie à trépas en 1986, victime des multiples abus qu’il s’est imposé. Précisons que les dix années qui viennent de s’écouler ont vues son groupe passer de la formation reconnue à un des combos les plus adulés du macrocosme heavy rock. Pourtant, Lynott aime à taquiner le groove, la soul, voire encore plus « cool » : la dance music. Mais ce qui fait la renommée de Thin Lizzy est ailleurs, dans les duels de guitares que se livrent ses deux bretteurs.
THIN LIZZY – Emerald (Jailbreak – 1976)
A cette période, et jusqu’en 1977, pour trois albums en tout, Brian Robertson donne la réplique à l’inamovible Scott Gorham. Les manches des Les Paul, une Sunburst Standard pour Scott, une Custom Black Beauty pour Brian, fument, rougissent, se délitent sous les doigts arachnéens des guitaristes. Chacun leur tour, les musiciens se renvoient des grappes de notes avant d’unir leurs savoirs autour de phrases mélodieuses harmonisées à la tierce. Outre la voix de son chanteur, c’est en cela que Thin Lizzy est identifiable : une marque déposée.
Opium trail (Bad reputation – 1977)
Un homme s’en va : Robertson, les stigmates restent. Après le « Live and dangerous » (1978), l’ami irlandais de toujours : Gary Moore, revient dans le groupe graver un unique Lp, mais quel Lp ! « Black rose : a rock legend » (1979) peut, à juste titre, être considéré comme un des meilleurs albums du combo, voire « le » meilleurs. Il contient notamment la chanson éponyme pour moitié rebaptisée en irlandais : « Rosin dubh : a rock legend ». Elle présente quatre parties mêlées les unes aux autres, chacune reprenant un arrangement versus hard rock d’une gigue folklorique irlandaise. Une perle !
Rosin Dubh : a rock legend (Black Rose : a rock legend – 1979)
Plus prompt à suivre le chemin pierreux du blues, Gary Moore repart. Snowy White vient alors croiser les cordes de Scott Gorham. Entre 1980 et 1982, il œuvre sur deux enregistrements. Ayant accompagné Pink Floyd sur scène, l’opinion des fans reste dubitative quant à ce choix. Son jeu de guitare se mariant « façon puzzle » à celui de l’américain, les aficionados revoient favorablement leur critique. On peut même envisager que le plus apaisé des albums du groupe : « Renegade » (1981), lui doit pour beaucoup. Nonobstant, ligne atmosphériques mises de côté, les batailles épiques à deux guitares continuent de griffer la cire.
The pressure will blow (Renegade – 1981)
Encore une fois : dernier arrivé, premier parti, White quitte le navire. Pour sa dernière livraison en studio, Thin Lizzy recrute un futur mercenaire, de ces musiciens aux milles projets : John Sykes, ex Tygers Of Pan Tang, futur Whitesnake et Blue Murder (…). A cette occasion, les harmonisations se font plus discrètes, moins évidentes, laissant place à un aspect démonstratif, la libre partition d’un « guitar hero ». « Thunder and lightning » (1983) livre des chansons alambiquées et d’une enveloppe sonore plus métallique. Il en sera donc ainsi du dernier album de Thin Lizzy qui, à contrario de la concurrence, durcit le ton en fin de parcours. Adieu Lizzy historique, adieu Phil Lynott, voici venir l’héritage …
Cold sweat (Thunder and lightning – 1983)
A Tribute Band
Figure iconique et principale cheville ouvrière disparue, le futur de Thin Lizzy s’annonce exclusivement live. Jusque-là, en matière de prestations « vivante », il n’existait que deux doubles officiels : « Live and dangerous » (1978) et « Life/Live » (1983). Viennent alors se greffer tout un tas d’enregistrements captés au décours de la carrière du groupe, ainsi que des témoignages récents sur ce qu’il est devenu : un Tribute Band à géométrie variable.
Cette variabilité vient, une nouvelle fois, du turn-over des guitaristes. Ce ne sera une surprise pour personne de retrouver Scott Gorham au sein de toutes les moutures. Autre musicien quasiment permanent, l’excellent Brian Downey. Loin d’être monolithique, son jeu de batterie est toujours apparu d’une finesse et d’une technicité « jazzifiantes », privilégiant légèreté et virevoltes au pilonnage intensif. Acteur ayant participé aux destinés du groupe dès ses débuts, c’est un plaisir de le réentendre lors des hommages périodiquement mis sur pied.
THIN LIZZY – Don’t believe a word (live 1996)
Darren Wharton, claviériste sur « Thunder and lightning » fait également partie des derniers line up. A ce noyau central viennent se greffer des « cavaleurs de manche », dont John Sykes, tricoteur émérite qui en profite pour chanter également.
En 2011, il laisse la place à deux musiciens. Vivian Campbell, alors guitariste chez Def Leppard, et connu pour avoir officié dans divers combos dont : Dio, tient la deuxième rapière. Par contre, un inconnu se dresse derrière le micro, un chanteur/guitariste assez étonnant : Ricky Warwick. Le mimétisme entre sa voix et celle du défunt Phil Lynott laisse l’auditeur … sans voix !
THIN LIZZY – Jailbreak (live 2011)
C’est dans cette configuration que Thin Lizzy se produit le 26 janvier 2011 au Bataclan : plaisir de tous les instants. Les classiques s’enchaînent et l’on ne pensait pas se trouver à pareille fête : qualité du son, fastueuses interprétations, bonheur d’en saisir à nouveau l’essence. Si cette « Rock Legend » vient à passer près de chez vous, précipitez-vous !
L’héritage …
Outre ce Tribute Band de luxe, car estampillé 75% pur produit d’origine, il existe des groupes qui « simulent » de si près leur aîné qu’on en vient à l’évoquer. La première de ces formation est Black Star Riders, et pour cause, Scott Gorham y propose ce qu’il a toujours choyé : du made in Lizzy estampillé !
Non loin, les suédois de Dead Lord assurent fièrement leur filiation en pratiquant les célèbres harmonies à la tierce. Dans ce cas, que dire des américains de Gygax ?! Que leur patronyme prête à sourire ? Oui. Et leur musique ? Pour clore cette petite histoire du rock, je vous laisse en apnée. Il n’est qu’à écouter.
GYGAX – Pure hearts
Le chapitre est-il clôt ? Personne n’oserait l’écrire …
Thierry Dauge