Joe JACKSON – Graham MABY – Gary SANFORD – David HOUGHTON : The Magic 4th
En studio
Selon les explications de Mr Jackson, « Volume four » (2003) s’inscrit à la suite de « Look sharp » (1979), « I’m the man » (1979) et « Beat crazy » (1980).
A l’évocation de ces trois premiers albums, la couleur monte aux joues, la chair de poule gagne, des chansons rejaillissent des mémoires, des sourires naissent : quel bonheur ! Sont-ils nombreux les enregistrements qui provoquent ce genre de réactions sans qu’aucune note ne soit jouée, uniquement sur la persistance de sensations ? Alors, pourquoi ces trois-là ?!
Joe JACKSON – Look sharp
Tout d’abord, il y a « Look sharp » et ses pépites power pop, dynamiques, tendues, accrocheuses, toutes pétries de complexité sous une apparente simplicité. Au-delà de mélodies au cordeau, il y a le son. Rare sont les vinyles à produire autant de puissance drapée de précision. On prend les mêmes, on les confie aux mauvaises personnes et, à tous les coups : trois petits tours et puis s’en vont. Dans leur écrin original, fruit d’un travail conjoint entre David Kershenbaum et Joe Jackson lui-même, elles rutilent et pénètrent les esprits tels des méritants du Paradis. « C’est lorsque tout va bien qu’il faut aller plus loin », certitude qui pourrait justifier ce deuxième Lp sorti la même année.
Joe JACKSON – I’m the man
Sur « I’m the man », les chansons sont toutes aussi étincelantes que celles du premier essai. L’inspiration étonne, la musique détonne ! Pourtant, le son n’est plus aussi « racé ». Un soupçon de « retenu » entrave le sentiment de perfection que le contenu des deux sillons aurait dû provoquer. Nonobstant, l’adepte sourit à pleine dents ou à pleines gencives, selon l’âge, la musique de Joe Jackson couvrant un large panel d’initiés, de la naissance à la vieillesse avancée. Après ces deux « épées », le chanteur et ses boys peuvent-ils assurer un troisième podium d’affilé ?
Joe JACKSON Band – Beat crazy
« Beat crazy », l’année qui suit, laisse à penser qu’ils y sont parvenus, même si le Jackson blanc commence à tourner sept fois ses phrases musicales sur sa partition avant de les jouer. Ses ambitions sont à l’étroit dans un format où la guitare bride la musique qu’il imagine. En conséquence, l’accessibilité des titres est moins directe et, bien qu’éclatant, le disque déçoit ses supporters. Ces derniers standardisent le futur du chanteur/auteur/compositeur anglais sur un modèle préprogrammé, d’où leurs ronchonnements. Blessé dans sa fierté, Joe s’en va visiter d’autres contrée … jusqu’en 2003.
Joe JACKSON Band – Take it like a man
Persuadé qu’un retour vers le passé n’a rien d’impossible, que le brelan initial peut tourner au carré et rafler à nouveau la mise, Joe rappelle à lui les trois autres cavaliers de l’apocalypse. Résultat ? Indéniablement, « Volume four » est réussi. Les titres sont colorés, gorgés de cette inspiration qui brode les trois premiers Lps. Pourtant, un paramètre ne permet pas de s’en goberger comme on aurait apprécié de le faire : le son. De l’écho a été adjoint aux instruments, perturbant la netteté, brouillant la dynamique, « éloignant » le groupe de l’auditeur, proximité extraordinaire qui caractérise les « anciennetés ». Rien de dramatique. Aux oreilles du véritable amateur, l’essentiel est ailleurs. La parution de ce disque évoque l’éventualité d’une tournée, d’une séance de rattrapage à destination de celles et ceux qui les ont ratés.
En concert
Au Bataclan, le 26 mai 2003, l’atmosphère vibre d’un désir trouble, cet espoir de voir ou revoir une icône pop encadrée de ses mousquetaires préférés.
Les musiciens originels sont donc sur scène. Pour n’en rien rater, les fanatiques se placent au plus près des planches, oreilles collée aux amplis. Malgré les aigus de Sanford qui fracturent des chaînes d’osselets à tours de médiator, l’ambiance est tous sourires, électrique et passionnelle. Les classiques défilent, l’un chassant l’autre : « Sunday papers », « Is she really going out with him » … associés aux nouveautés.
Joe JACKSON Band – Awkward age (live)
« L’échange » à quatre figurant l’attendu, le plus grand nombre est comblé. Mais il serait réducteur de faire abstraction des merveilleuses chansons que Joe Jackson interprète seul au piano. Parce que, dans notre moi profond musical, subsiste l’artiste en son seul nom. Alors, penchons-nous sur son clavier. Pardonnons lui ce visage renforcé de collagène et rendons-lui hommage. En l’écoutant ainsi, revêtu de son seul habit, on se prête à rêvasser. Et si l’artiste pop des 80’s, c’était lui ? …
Joe JACKSON – Hometown + Number two (live)
Thierry Dauge – CulturesCo