The BLACK CROWES – en studio et en concert
En studio
Amorica est un album décrié au prétexte qu’il serait : «Moins bon que les précédents». A sa décharge, il suit le deuxième et plus abouti de tous les disques des Black Crowes : The southern harmony and musical companion (1992). Nonobstant, ce troisième Lp contient de formidables et inusables chansons que le groupe a mainte fois repris sur scène, «P25 London» en tête.
The BLACK CROWES – P.25 London
Le southern heavy rock teinté de soul que le groupe a initié à ses débuts est toujours d’actualité, ce revival 70’s, réinterprétation d’un genre toute aussi talentueuse que lorsque Humble Pie en faisait sa lyre. La guitare slide intervient à bon escient entre deux solos « Tacos », relevés à souhait, la voix rivalisant avec celle des plus grands : Paul Rodgers, Robert Plant, David Coverdale, Steve Marriott, pour ne citer que ceux affûtant la même scie. L’auditeur écoute ce disque sans avoir à « zapper » un titre ou deux, son unité dans la qualité faisant modèle. Au final, si Amorica commence par une mèche de perceuse, il aligne un « brise-glace » en fin de sillon, une ballade construite autour d’une formidable partition de piano: Descending. Ainsi vêtu, l’album flatte tout autant l’oreille que n’importe quel autre enregistrement du groupe. CQFE : ce qu’il fallait écrire.
The BLACK CROWES – Descending
En concert
La photo ci-dessus n’a rien d’anodine. Qu’y et qui voit-on ? Le groupe apparemment «stadifié». Ce cliché date de 1995, année où la tournée promeut « Amorica ». Le groupe? Mais The Black Crowes, hormis les rares fois où son chanteur se saisit d’une guitare de «contenance», n’a jamais fonctionné à trois guitaristes ! Alors ? Non ! Si !!! Dieu le père lui-même! Celui sans qui la face du monde musical n’eut jamais été la même : Jimmy Page. Le 4 février 1995, au Zénith de Paris, il est bien sur scène avec eux. Précision: pour deux titres seulement, l’interprétation de standards de blues au moment du rappel. L’idée d’un peu plus germera qui se concrétisera cinq ans plus tard, aboutissant au phénoménal «Live et the Greek» garni de titres 100% Led Zeppelin.
The BLACK CROWES witn Jimmy PAGE – Shake your money maker
Lors de ce concert, quatre titres d’ « Amorica » sont joués : « P25 London », « High head blues », « Ballad in urgency » et « Wiser time », des titres typiquement Black Crowes. Sans pyrotechnie, sans jeu de scène délirant, simplement aux commandes de leurs instruments, les musiciens font voyager le public en terre d’Atlanta, centre d’un cercle imaginaire passant par l’Alabama, la Géorgie, la Caroline du Sud, la Cherokee National Forest et le Tennessee. Comme en studio, le propos est rock, rugueux, hard, soul et groovy, toujours chaleureux, parfois sucré comme des volutes de fumée bleue, des fragrances de tabac blond. Southern rock moins typé « provincial » que celui de leurs cousins de Jacksonville : Lynyrd Skynyrd ou Blackfoot, il n’en parle pas moins de ces terres parsemées de villas à colonnades, de ces vastes étendues piquées de coton. Un privilège, un bonheur, une contemplation.
The BLACK CROWES – Wiser time
https://www.youtube.com/watch?v=8ClZFX8AsXc
Une chose encore
A mon sens, les tickets d’entrée font partie intégrante d’un concert. Les regarder génère des images et du son assimilables au plaisir ressenti lors de l’évènement. A quel moment la dérive « économique » est-elle survenue ? On peut la situer aux alentours de l’année 1997. Jusqu’alors, les « contremarques » acquises aux guichets des revendeurs, pour les parisiens, essentiellement la FNAC et le Virgin Mégastore, s’échangeait contre des vrais billets « en couleur » le soir du concert. Mieux, ces billets « imagés » : photo des artistes, patronyme et, éventuellement, visuel de l’album en lien avec la tournée, étaient disponibles dès l’achat.
Un « vilain » matin : « Pfuuuiiiit ! », plus rien que des « écritures » sur fond plus ou moins coloré. De nos jours, c’est pire ! Dématérialisation aidant, le scan du smartphone clone la preuve d’achat ! Au mieux, on imprime soi-même le sésame au format A4 sur du papier ordinaire. Une misère ! Permettez donc aux nostalgiques de « fabriquer » des « faux billets » qui ressemblent à ce que devraient toujours être les « vrais ». Alors, à nouveau, le spectacle renaît depuis une image. Sensation garantie.
Thierry Dauge