Catherine Laboubée Interview – Les Dogs de Rouen
On s’appelle Les Dogs, on vient de Rouen
Too much class… Dogs – Les groupes qui peuvent se vanter de faire l’unanimité ne sont pas pléthore. On aime pas tel album, on critique le nouveau line-up, on a à redire sur la prod… Bref, il y a souvent quelque chose qui cloche. Sauf, sauf… pour de rares artistes bénis des Dieux, et pour lesquels on ne peut être qu’élogieux au fil du temps. Les Dogs font partie de ces groupes touchés par la grâce. Alors aujourd’hui, nous avons la chance, et le privilège d’avoir le témoignage “in situ” de quelqu’un qui a vu naître, puis s’épanouir le phénomène Dogs.
Catherine laboubée : Too much class…Dogs, l’histoire
La soeur des Dogs
Catherine Laboubée, la sœur de Dominique, le leader charismatique et l’âme du groupe. Il y a quelques temps, elle a gravé son témoignage en écrivant un livre en forme de documentaire sur l’histoire et la vie du groupe. Too much class… Dogs, l’histoire. Un livre exquis, magnifiquement broché, qui devrait obligatoirement trôner dans toutes les bibliothèques des aficionados des Dogs. Too Much Class… est toujours disponible aux éditions La Belle Saison (labellesaison@orange.fr)
Pour les passionnés, ceux d’entre vous qui ont côtoyé, écouté et aimé les Dogs, ce livre, de par son contenu et sa qualité d’édition représente un témoignage inestimable. Photos, articles de presse, interviews des anciens membres et de ceux qui ont partagé leur route, nous accompagnent et nous dirigent tout au long de l’histoire des Dogs. Il était donc grand temps de rencontrer Catherine Laboubée, auteur de ce livre et “soeur des Dogs”.
Catherine laboubée : Too much class…Dogs, l’histoire
Comment t’es venue l’idée de l’écrire?
J’y pensais depuis longtemps, mais j’avais peur qu’un livre «ferme» l’histoire… J’ai cogité 10 ans avant de me décider, grâce surtout à une demande pressante de pas mal de fans sur les réseaux sociaux…
Combien de temps a pris la réalisation?
Un an environ, entre la plongée dans les documents et photos laissés par Dominique et les interviews, puis deux mois d’écriture.
As-tu retrouvé facilement tous les protagonistes?
Oui, sans problème. Les musiciens, amis et journalistes ont été très coopératifs avec moi. J’ai aussi lancé un appel à témoins auprès de ceux qui aiment Dogs, car je tenais beaucoup à ce que leur voix soit aussi entendue. Il y a eu énormément de réponses de gens que je ne connaissais pas ou que nous avions perdus de vue. Beaucoup de ces témoignages ont été publiés. Certains ont refusé, pour des raisons compréhensibles… ou moins. Quelques-uns parce qu’ils n’avaient pas la force de parler. Je me suis aussi laissé la possibilité de ne pas contacter certaines personnes.
Quels sont les retours que tu as pu en avoir?
Excellents pour tous, enthousiastes pour pas mal de gens.
Quelle est ta place dans la fraterie?
Je suis de deux ans l’aînée de Dominique, nous n’étions que deux. Née en 1955, lui en 57. Jusqu’au bout, il m’a toujours présentée aux gens comme: ma grande sœur, grrr
Quelle profession exerçaient tes parents?
Notre père était pharmacien, notre mère médecin généraliste.
Te souviens-tu du tout début du groupe?
Oui et non… Nous étions fans de rock depuis 1965, date de l’achat de mon premier 45 Tours des Beatles… Dominique a commencé à gratter sur une guitare sèche qu’on m’avait offerte la même année et que j’avais vite abandonnée (pas mon truc…), puis à faire de la musique avec un ou deux copains de vacances et… le reste s’est fait tout seul, en deux ans. Oui, deux ans à peine entre la rencontre (enfin, nous étions amis avec Mimi depuis quelques bonnes années…) et le premier passage au Golf-Drouot en 1974.
Ni l’un, ni l’autre, en fait. Mais ils nous ont toujours laissé une grande liberté. Bon, l’idée du Bac et de deux ou trois ans d’études supérieures leur plaisait bien, et Dominique a respecté ça sans problème. Par ailleurs, ils ont été très présents pour aider le groupe, tout le temps.
Et toi, comment as-tu vécu le succès croissant du groupe?
«Normalement», sans surprise, car j’étais témoin du quotidien, ce qui n’a rien à voir avec le ressenti des fans ou des connaissances moins proches.
Quels étaient vos rapports de frère et sœur?
Les rapports d’un frère et d‘une sœur: complicité et bagarres suivant les humeurs, partage tout le temps. Cela n’a pas changé avec le temps, bagarres en moins! Nous sommes restés très proches, avec nos parents aussi, et nous avons toujours vécu dans la même maison, ce qui explique aussi cette proximité, même si chacun avait ses propres centres d’intérêts. Mais nous nous rejoignions toujours sur tant de points. Pas beaucoup de secrets dans cette famille, même si chacun avait sa vie.
Donnais-tu ton avis à Dominique? Avais-tu la primeur de ses nouvelles chansons?
Mon avis? La primeur? Oui et non… Uniquement quand il le demandait, car je n’ai jamais sollicité une écoute privilégiée. En fait, il me consultait parfois sur des ébauches, dont j’entendais forcément la ligne à travers les portes, même si je n’écoutais pas… Ensuite, la construction des morceaux jusqu’à leur aboutissement se passait plus discrètement, et je les retrouvais une fois terminés et, bien souvent, enregistrés.
Lionel Herrmani, quand nous l’avons rencontré, a particulièrement insisté sur la gentillesse extrême de ton frère. Que peux-tu nous en dire?
Tout et rien. Ce n’est pas à moi de juger, mais oui, je peux insister de la même manière que Lionel: faire de la peine à quelqu’un était épouvantable pour Dominique, à quelque niveau que ce soit, et faire plaisir aux amis était essentiel, même si ce sont des choses parfois difficiles à réaliser; on n’y arrive pas toujours. Cela lui a joué quelques tours dans la mesure où lorsqu’il répondait «non» à une demande (alors qu’il ne pouvait pas faire autrement), il déclenchait fréquemment la colère de son interlocuteur… Il le vivait très mal.
Lionel nous a également parlé d’ Antoine (Tony Truant), qui lui téléphonait régulièrement pour savoir «s’il n’y avait pas une place de guitariste chez les DOGS». Te souviens-tu de son arrivée à Rouen?
Oui, bien sûr! Je me souviens de son enthousiasme – qu’il n’a jamais perdu – et de son avidité à progresser. Nous l’hébergions chez nous et rassurions sa mère (il était mineur) sur sa bonne arrivée à Rouen après qu’il ait fait le mur de chez lui et bien souvent traversé la France en stop…
Mimi, le batteur, vient de décéder. Vois–tu encore Hugues et Tony? Lionel?
Nous nous voyons très peu, mais avons gardé le contact, plus régulièrement avec Hugues, mais très chaleureusement avec tous les trois.
Comment Dominique vivait-il le fait de n’avoir jamais décroché de hit majeur?
La musique n’a jamais été pour lui envisagée en termes de «carrière», mais… Dominique jouait pour le plaisir et parce que cela lui était nécessaire, mais il savait ce qu’il valait, sans pour autant se croire supérieur: il était si exigeant sur ce qu’il produisait qu’il ne mettait en lumière que ce qui était de bonne qualité à ses yeux. J’ajoute qu’il était aussi curieux de tout, dans de nombreux domaines et dans des styles parfois éloignés du rock.
La comparaison avec le succès de certains était souvent dure à avaler, parfois incompréhensible pour lui, mais il n’aurait pour rien au monde accepté de renier quoi que ce soit.
Penses-tu que chanter en français aurait pu leur permettre de toucher un plus large public. Dominique l’avait-il envisagé?
Ça aurait peut-être pu, mais je ne sais pas vraiment. Dominique a écrit quelques titres en français, sans renier sa «ligne». Il pensait parfois à en écrire davantage, mais il fallait que ça arrive naturellement.
Les Dogs sont devenus culte: on en parle encore plus de 30 ans après, il y a une place Dominique Laboubée à Rouen, le groupe reste la référence pour de nombreux fans. Quel est ton sentiment à ce sujet?
En deux mots: TANT MIEUX! Quant à mon sentiment… J’en suis très émue, toujours et encore, et fière aussi d’autant que de nouvelles générations découvrent DOGS et sont touchées aussi par sa musique et sa démarche. Et ça, c’est épatant! On pourrait penser à une victoire, à une revanche, mais la victoire, ce serait que Dominique soit toujours vivant…
À l’époque, aurais-tu pu imaginer l’impact que le groupe aurait plusieurs décennies plus tard ?
Non, la question ne se posait même pas. Là, je ne peux rien dire d’autre.
Es-tu encore souvent sollicitée pour parler de ton frère?
Non, pas souvent, même depuis le livre. Je ne suis pas «du sérail». Quelques questions ou quelques précisions de temps en temps, ici et là…
N’est-ce pas parfois trop envahissant par rapport à ta propre profession, écrivain?
Comment trouver envahissants 45 ans de ma vie? Au contraire, écrire des chansons, écrire des livres… C’est un peu la même chose, non? Partager ses passions avec les autres, quelle que soit la manière, c’est ce qu’il y a de mieux…
Un grand merci à Catherine Laboubée pour la gentillesse, la franchise et la simplicité de ses réponses. Son excellent ouvrage sur les Dogs est toujours disponible aux éditions La belle saison. Pour ceux d’entre vous qui n’auraient pas encore découvert cet indispensable, vous pouvez en faire l’acquisition en contactant : labellesaison@orange.fr .
Catherine laboubée : Too much class…Dogs, l’histoire
Pour parfaire ce témoignage, nous vous invitons à écouter cette interview de Lionel Herrmani (Melodies Massacre), producteur des deux premiers albums, et ami des Dogs.
Interview Lionel Herrmani (et non Hermani comme il nous l’a précisé !!) Novembre 2017