Robin McKELLE – Impressions of Ella
« Impressions of Ella est comme un retour à la maison pour moi. Comme une réunion familiale après des années de séparation, une reconnexion avec la musique qui m’a nourrie pendant toutes mes années de formation musicale, et qui furent largement influencées par Ella Fitzgerald. »
Le décor est planté. Sur Impressions Of Ella, Robin McKelle réinterprète Ella Fitzgerald entourée de trois pointures du jazz : Kenny Barron au piano, Peter Washington à la contrebasse et Kenny Washington à la batterie.
Dès les premières notes de piano, aussitôt qu’apparaît la voix, nous sommes plongés dans un monde où plus rien ne compte qu’écouter et prendre du plaisir. Étrangement, on voit Steve McQueen étreindre Faye Dunaway sur une plage de sable blond, l’Affaire Thomas Crown en toile de fond, Michel Legrand survolant les ivoires de son Gershwin.
Robin Mc KELLE – April in Paris
Les « classiques » se suivent mais ne s’enchaînent pas. Telles des œuvres d’art, des tableaux de maîtres, ils exposent leur sublime singularité au public éberlué. Ils sont ponctués de délicats solos de claviers, de contrebasse ou de batterie « balayée », enluminures du timbre unique de cette voix divine qui les côtoie. Pour exister parallèlement au chant, les trois performers produisent leur meilleur, en respire l’esprit, en absorbe l’humeur.
Lorsque Robin McKelle approche ses lèvres du microphone, le souffle vibratile et sensuel qui s’en échappe apaise les âmes les plus torturées. Empreint de félicité, l’auditeur se coule dans la mélodie, ce jacuzzi de notes, ce zéphyr offert. Alors, le monde peut bien s’écrouler…
Soon
D’autres interprètes se sont essayées au jazz, parcourant des champs hors leurs horizons habituels, devant un grand orchestre ou assises sur un « piano / voix ». Pat Benatar, habituée des rock band, brave tout un orchestre sur True Love (1991), Norah Jones, plus intimiste, nous invite Come Away With Me (2002), jusque dernièrement Ricky Lee Jones qui dévoile quelques Pieces Of Treasure (2023). Et puis, en 1984, il y a l’icône country rock Linda Ronstadt qui unifie les genres dans l’album Lush Life. Sur Impressions Of Ella, Robin reprend « Lush Life », titre initialement composé par le jazzman Billy Strayhorn (1935) – et depuis mainte fois repris – non pas pour en livrer une version définitive, comme une résurrection, simplement pour Ella.
Robin McKELLE – Lush Life
« J’admire chez elle la manière dont elle arrive à se fondre dans le groupe qui l’accompagne, alors que c’est elle qui en est la star. Sa voix puissante, son scat explosif et son ton si délicat m’ont marqué à jamais. Je voulais célébrer son style et ce son tout en gardant ma propre individualité… Avec cet album, j’ai visé les étoiles et j’espère que vous l’aimerez autant que je l’aime. »
Au pays de l’Auto-Tune et du Vocodeur, remettre les années 50 au goût du jour est un sacré challenge. Des voix (trafiquées) pour s’en plaindre ? Pas les nôtres. Et parce qu’elle ne fait pas que susurrer, allez donc vous promener sur les lignes de chant de Robin McKelle. Il persiste des bonheurs instantanés.
Old Devil Moon
Thierry Dauge
Robin McKELLE – Impressions Of Ella – Label : Naïve Records – disponible depuis le 2 juin
