Alex Chilton – Au panthéon des losers magnifiques du rock
Au Panthéon des losers magnifiques du rock, Alex Chilton est depuis une nuit de mars 2010, allongé au côté des plus grands songwritters maudits (pléonasme?). Inutile de citer Brian Wilson, Scott Walker ou Syd Barret – voilà c’est fait – chacun les siens et légendes rock’n’rolliennes pour tous.
Comme dans toute légende qui se respecte, l’histoire débute dans un monde parfait. En 1967, Alex Chilton a 16 ans, joue avec les Box Tops dont il est le leader. Il compose alors The Letter. Mélodie pop imparable, voix rocailleuse et cuivres sucrés… une recette efficiente qui l’envoie aux étoiles. Il en reste aujourd’hui un tube mondial, certifié en or massif.
The Box Tops : The Letter
Quelques poignées de hits et de dollars plus tard, Chilton jette ses fringues d’idole non pas à ses fans mais à la poubelle. Exit les Box Tops jugés trop mainstream, voilà Big Star qu’il monte avec Chris Bell en alter-égo. En 1972 sort #1 Record adoubé par la critique, boudé par le public. Deux ingrédients parfaits pour en faire un disque culte… ce qu’il deviendra.
Big Star : Feel
En attendant, Big Star commence déjà à pâlir. Le sublime mélange de soul, de pop et de ballades – labélisé Power-Pop – qui court encore dans les sillons de Radio City (écoutez September Gurls !) n’est plus qu’une version désenchantée dans le troisième, presque entièrement composé par un Chilton en crooner toxico largué de tout. (Et de Chris Bell dont la route s’arrête en 78 dans la tôle froissée de sa Triumph).
Rideau?
Non, le chemin qui mène au Panthéon est encore loin, pavé de seringues, de bouteilles et d’espoirs brisés, de résurrections, de rédemptions… et de rencontres improbables. Comme celle avec les Cramps qui le choisissent pour produire leur Songs The Lord Taugh Us après avoir écouté Flies On Sherbert (cité dans Rolling Stone parmi les pires disques). Ou d’avoir enregistré Bangkok, un de ses meilleurs singles, avec Richard Lloyd. Puis d’avoir retrouvé ses influences blues-country-rockab’ auprès du fantasco-classieux Tav Falco et ses Panter Burns.
Alex Chilton : Free Again
La rencontre avec New Rose
Que dire enfin de la rencontre avec les français Patrick Mathé et Louis Thévenon, les deux boss du label New Rose? Après deux compiles dont l’indispensable Stuff, sortait sur le label de la rue Pierre Sarrazin une série d’albums où s’exprimait le talent de songwritter et coverman de Chilton. Soul et Rhythm & Blues sur High Priest – 1987 – Rock et reprises sur A man Called Destruction – 1995 – jazz et chansons italiennes sur Clichés… Enfin, surtout le talent de ne faire que ce qu’il avait envie de jouer (et bien). C’est ce dont témoignera P.Mathé, évoquant un de ses artistes favoris, devenu un de ses meilleurs amis. En passant, Chilton produira le 1er album des Gories et des Lolitas, deux groupes sortis chez New Rose.
Alex Chilton : Cant’s seem to make you mine
Après un dernier album live en 2004, c’est à la Nouvelle Orléans qu’Alex Chilton refait surface, hélitreuillé de sa maison pendant l’ouragan Katrina. Et puis le 17 mars 2010, à la veille d’un concert-reformation avec Big Star, son cœur coupe le courant et le renvoie définitivement aux étoiles…
Gilles de Kerdrel de la page Facebook Ecoutons nos pochettes – Culturesco